Privacy & Souveraineté : agir ou subir
L'Europe est aujourd'hui vassalisée d'un grand nombre de services américains et prend tout juste conscience de l'impact de ses usages sur le respect de sa vie privée et sur sa souveraineté.
La vie privée est un sujet qu’il sera difficile de faire reculer.
L’Europe avec le RGPD a cadré un ensemble de principes à respecter à destination des états membres et des pays ciblant les européens par le biais de l’extraterritorialité du texte.
Cette extraterritorialité a également inspiré la Chine avec la PIPL, l’Inde et demain les Etats-Unis qui préparent leur propre règlement. En 2024, 71% des pays avait une législation et 9% un draft en cours de rédaction ou d’adoption. 80% des pays sont donc aujourd’hui concernés par ce droit.
Bien qu’attachés à ce droit, nous nous dirigeons de plus en plus vers une société de surveillance.
Cette surveillance explose et nous vivons aujourd’hui dans une société où l’effet panoptique est rentré subrepticement dans notre quotidien.
Ces enjeux de droit à la vie privée ont également mis en exergue des effets de bord concomitants à notre souveraineté technologique.
L’Europe est aujourd’hui vassalisée d’un grand nombre de services américains et prend tout juste conscience de l’impact de ses usages sur le respect de sa vie privée et sur sa souveraineté.
Nous avons laissé les choses se faire en choisissant la facilité d’usage à la place de créer nos propres solutions.
Le résultat c’est vingt ans de retard et un réveil difficile.
Que faire pour l’avenir de nos enfants ?
Lancer une initiative visant à reconstruire une autonomie numérique ?
Aucune stratégie de "dégafamisation" ne viendra de l’Europe, les impacts économiques pour notre continent seraient trop importants.
Pour un décideur, ce dont nous parlons se traduit nécessairement par des budgets de fonctionnement à rebasculer sur de l’investissement alors qu’ils ont tous fait l’inverse il y a dix ans.
La cerise sur le gâteau est certainement que cette stratégie induirait à recul technologique et de compétitivité.
Pour faire simple, tant que notre vision sera voilée par nos objectifs de productivité ou de résultats à court terme, rien ne changera.
Mais que ce passerait-il si nos alliés ne l’étaient plus ?
Que se passerait-il si tous ces services que nous utilisons étaient coupés du jour au lendemain dans un contexte géopolitique différent ?
La vie se résume souvent par le même dilemme : agir ou subir.
Avons-nous vraiment le choix ? Sommes nous vraiment prêt à subir ?
Non nous ne sommes pas prêt.
C’est pour cela qu’il nous faut construire notre autonomie numérique. Cela prendra du temps.
En attendant la seule question que nous pouvons nous poser est la suivante.
Combien de temps allons nous encore nous laisser surveiller ?
Une troisième exigence.
Alex Turk disait que dans une démocratie, il y a deux exigences fondamentales : la transparence de l’état et l’opacité du citoyen.
Les grandes puissances mondiales surveillent le web dans un objectif déclaré de sécurité. Snowden parlait quant à lui d’un objectif sous-jacent de domination économique en évoquant la surveillance de masse.
Il est possible qu’une troisième exigence soit également l’opacité de nos entreprises vis à vis des puissances étrangères.
Nous devons prendre position par des actes forts, bousculer nos habitudes, arrêter d’avoir une vision court terme pour protéger notre société d’une économie mondialisée.
La souveraineté n’est pas synonyme d’autarcie, Elle est synonyme d’autonomie. Il s’agit de garder notre faculté de choisir, de décider.