De l'anecdote individuelle au risque collectif : l'usurpation d'identité, angle mort de l'économie européenne

Chaque année, plus de 200 000 Français continuent de subir une usurpation d'identité. Cette fraude se révèle désormais un risque économique et stratégique majeur !

Chaque année, plus de 200 000 Français continuent de subir une usurpation d’identité. Longtemps considérée comme un problème individuel, cette fraude se révèle désormais un risque économique et stratégique majeur ! Les dernières attaques visant les aéroports, hôpitaux ou établissements publics l’illustrent : la menace n’est plus circonscrite à l’individu mais touche désormais les fondements même de la confiance numérique, socle indispensable de notre compétitivité.

Une menace invisible mais systémique !

L’usurpation d’identité ne se limite plus à une carte bancaire piratée ou un prêt contracté au nom d’autrui. Elle touche désormais des processus de masse : ouverture de comptes bancaires, demandes d’aides sociales, remboursements de frais de santé, dépôts de brevets… Et chaque brèche dans ces mécanismes entraine des coûts cachés qui dépassent largement la seule victime directe. En 2024, la CNIL a ainsi reçu plus de 5600 notifications de violations de données personnelles, soit une hausse de plus de 20% en un an[1]. Faux créanciers, faux ordres de virements, escroqueries via des justificatifs d’identité contrefaits… les fraudes complexes sont de plus en plus nombreuses. Et le coût estimé du phénomène d’usurpation d’identité en France se situe entre 1 et 3,4 milliards d’euros sur quatre ans[2]. Au-delà des victimes individuelles, impactées autant financièrement que psychologiquement, ce sont aussi les banques, les mutuelles, les assurances et les administrations qui absorbent les coûts administratifs, les litiges et les pertes d’exploitations qui y sont directement liés. Avec un risque majeur : l’érosion lente et diffuse de la confiance numérique, pourtant indispensable au fonctionnement de notre économie.

L’usurpation d’identité et ses conséquences menacent donc tout à la fois notre économie, notre société et notre innovation !

Vers une riposte coordonnée et européenne contre l’usurpation d’identité

Répondre à l’usurpation d’identité suppose désormais de dépasser les approches fragmentées, et appelle au contraire une stratégie collective articulée autour de plusieurs leviers : renforcement des standards d’authentification, mutualisation de l’information sur les fraudes inspirée des bonnes pratiques de la cybersécurité, formation et sensibilisation de masse... Surtout, cette stratégie doit s’inscrire dans une vision européenne de la souveraineté numérique ! En cela, le futur portefeuille européen d’identité numérique, issue du règlement eIDAS2.0 trace une voie claire : créer une infrastructure commune d’authentification, interopérable et sécurisée, et fondée sur des standards techniques et éthiques élevés. Mais la construction de cet écosystème de confiance requiert plus qu’un cadre règlementaire. Elle suppose la mobilisation coordonnée des acteurs publics, privés et technologiques, dans un modèle de co-investissement et de partage de responsabilité.

Encourager ces investissements, c’est favoriser une industrie de la sécurité et de la conformité made in Europe, compétitive face aux acteurs extra-européens, et capable d’assurer la maitrise de nos données sensibles !

De l’urgence du sursaut collectif !

L’usurpation d’identité n’est plus un épiphénomène : c’est une menace systémique qui met à l’épreuve notre sécurité collective et notre souveraineté numérique ! Le secteur public, avec France Connect, prouve qu’une authentification forte et centralisée peut être une réponse efficace. Aux acteurs privés, désormais, de prendre le relais : ils ne peuvent plus se contenter d'attendre que tous les règlements européens soient finalisés pour agir ! Et des solutions existent dès aujourd’hui pour renforcer la sécurité des parcours, protéger les usagers et bâtir, ensemble, un espace numérique européen de confiance.

Car la bataille de l’identité numérique se joue maintenant. La France et l’Europe disposent d’atouts considérables — expertise technologique, cadre réglementaire solide, écosystème d’entreprises innovantes — mais ces forces doivent s’unir. La question n’est plus de savoir si nous serons capables d’assurer notre souveraineté numérique, mais si nous aurons le courage politique, économique et collectif de la défendre.
 

[1] https://www.cnil.fr/fr/rapport-annuel-2024?utm_source=chatgpt.com

[2] https://www.cnil.fr/sites/cnil/files/2025-06/economie_cyber_benefices_rgpd.pdf?utm_source=chatgpt.com