Info JDN : Gel de 110 millions d'euros d'avoirs de Google France dans une procédure engagée par Google Russie
Ce 10 décembre 2025 après-midi, un huissier de justice a signifié à Google France une mesure de saisie conservatoire portant sur 110 millions d'euros d'avoirs. Immédiatement applicable, cette décision s'inscrit dans le cadre d'une assignation en justice par Google Russie contre sa société-mère, Google International LLC.
Pour comprendre ce gel en France, il faut aller en Russie, où Google International LLC a été condamnée en 2024 pour la faillite organisée de sa filiale russe sur fonds de conflit russo-ukrainien et de sanctions financières adoptées contre le pays belligérant. "Dès 2018, la maison-mère a commencé à adopter un politique très agressive vis-à-vis de sa filiale russe", précise William Julié, avocat chargé de représenter les intérêts de Google Russie en France et qui nous a confirmé l'action de l'huissier qui a eu lieu vers 16 heures ce 10 décembre. La justice russe exige que la maison-mère rembourse à Google Russie des dividendes transférées hors de Russie, ainsi qu'à acquitter l'impôt afférent, pour un montant total d'environ 110 millions d'euros (10 milliards de roubles).
Dans les faits, Google International LLC a procédé à la remontée intégrale des dividendes de sa filiale russe, avant que celle-ci ne se déclare en cessation de paiement. Les juridictions russes ont décidé que ces transferts violaient le droit commercial au détriment de sa filiale, de ses employés, de ses fournisseurs et de ses partenaires commerciaux.
Prochaines étapes au tribunal judiciaire de Paris
Ce gel des avoirs de Google France vise à garantir la disponibilité des fonds durant l'examen de l'affaire par le tribunal judiciaire de Paris. Google Russie a en effet demandé de bénéficier de l'exequatur de jugements rendus en Russie. En droit international, l'exequatur est une décision par laquelle un tribunal rend exécutoire sur son territoire national un jugement étranger.
Les prochaines étapes se joueront donc désormais devant la justice française. Le tribunal judiciaire de Paris devra décider s'il reconnaît et autorise l'exécution des jugements russes sur le territoire français. Google France et Google International LLC auront la possibilité de solliciter la mainlevée des mesures devant le juge de l'exécution, tandis qu'en cas de confirmation de l'exequatur, les sommes gelées pourront être saisies au bénéfice de Google Russie.
"Ce qui est en jeu ici, c'est la responsabilité d'un géant des GAFAM envers sa propre filiale, et la capacité de la justice à faire appliquer le droit, y compris face à de très grands groupes internationaux", observe William Julié. "Une entreprise ne peut pas engranger les profils localement pendant des années, puis organiser la disparition de sa filiale en transférant les fonds et en abandonnant employés, fournisseurs et clients".