Comment Kol et Vesper étendent l'économie à la demande à l'alcool

Comment Kol et Vesper étendent l'économie à la demande à l'alcool Kol et Vesper font partie des nouvelles applications mobiles de livraison d'alcool à domicile. Des modèles différents des pionniers US, afin de pouvoir livrer toute la nuit.

Il est 21h, vous rentrez du bureau et déboucheriez bien une bouteille de vin. Problème, le caviste du coin de la rue a déjà baissé le rideau depuis bien longtemps. Même chose à 23h lorsque vous venez de signer un contrat et aimeriez ouvrir le champagne avec votre équipe. Ou à 2h quand la fête bat son plein mais que la dernière goutte de vodka vient d'être engloutie. Pour toutes ces situations, l'économie à la demande née dans le sillage d'Uber fournit désormais une solution.

Aux Etats-Unis, les applications mobiles de livraison d'alcool à domicile, qui émergent depuis un an et demi pour ravitailler les consommateurs assoiffés pendant la nuit, s'appellent par exemple Drizzly, Minibar, Saucey, Thirstie, Swill, Topshelf ou Klink. En France, plusieurs jeunes pousses ont lancé leur service cet automne. Les premiers à dégainer ont été Drinkz (à Lyon et Paris) et Kol (à Paris) fin septembre. L'application de Drinkz semble actuellement en sommeil, mais celle de Kol n'a pas tardé à décoller tout comme celle de Vesper, lancée début décembre à Lyon.

Baptiste Guez, cofondateur de Kol 

Quant aux livreurs, les quinze de Kol sont pour la plupart des autoentrepreneurs auxquels la start-up recourt de la même façon que Deliveroo ou TakeEatEasy – à la Uber – en leur proposant des créneaux horaires en soirée qui complètent bien leur éventuelle activité pour ces services de livraison de repas. Chez Vesper, ce sont actuellement trois des quatre associés - Julian Guillen, Alex Chavanon et Pierre-Elian Jacquet - qui se chargent d'effectuer les livraisons quand la quatrième, Aude Marjoux, gère le stock et prépare les commandes. "Mais si tout se passe bien, nous commencerons mi-février à constituer une équipe de livreurs indépendants comme TakeEatEasy, Deliveroo et Foodora", explique Julian Guillen.

Des modèles très proches

Les deux start-up se distinguent sur quelques points de détail, mais les modèles sont proches. Vesper vise les 18-35 ans, Kol cible davantage les actifs que les étudiants. Se positionnant comme un caviste à domicile, Kol propose un large choix de références, notamment dans les vins et champagnes, sélectionnés par un œnologue. Vesper en propose moins mais dispose d'au moins quatre références par catégorie pour balayer la largeur de gamme, de 20 à 50€ pour les whiskies par exemple, tout en se ménageant un plus grand choix de vin qui sera bientôt confié à son partenaire Vinify, spécialiste des coffrets de vin sur abonnement. De plus, le lyonnais développe une offre de snacking, entre planches de charcuterie et fromages d'acteurs locaux et biscuits apéritifs Michel et Augustin.

La France en franchise, Londres en propre

Côté similarités, Vesper propose déjà le partage de l'addition, Kol y travaille. L'une comme l'autre compte sortir au plus vite une version Android. L'une comme l'autre livre les alcools à température de dégustation et ceci en 30 minutes environ. L'une comme l'autre compte attaquer d'autres villes de France en faisant appel à des franchisés, pour ne pas avoir à reconstituer un stock et gagner du temps. Et l'une comme l'autre préfèrent miser sur Londres et d'autres grandes villes européennes comme Milan et Bruxelles pour y lancer leur service en direct.

Enfin, Kol fait payer la livraison quelques euros en plus des alcools, eux-mêmes proposés à des prix équivalents aux grandes surfaces. Pour sa part, Vesper inclut la livraison dans ses tarifs mais ceux-ci sont bien plus élevés. Les spiritueux par exemple dépassent d'environ 10 euros les prix en magasin, Vesper s'alignant sur les épiceries de nuit et les concurrents existants. Car la livraison d'alcool à domicile n'a pas non plus débuté avec le mobile. Une simple requête sur Google fait apparaître des dizaines de numéros de téléphone à appeler pour se faire livrer de l'alcool, à des prix défiant toute personne encore sobre. Ces services n'ont pas toujours la meilleure réputation, leurs sites Web peuvent laisser perplexe et l'expérience client, ramenée à son plus simple appareil, ouvre un boulevard aux applications commercialisant une offre plus étoffée et plus attractive, géolocalisant l'adresse de livraison, permettant un paiement sécurisé et accompagnant les livraisons de gobelets, glaçons et goodies.

Vite consolider son avance et sa marque

Estimer le marché adressable n'est pas évident, mais Baptiste Guez note que le chiffre d'affaires des acteurs existants (Aperitissimo, Alerte Apéro…) additionné à celui que les épiceries de nuit réalisent sur l'alcool s'élèverait à Paris à 60 millions d'euros. Sans compter, donc, la création de marché des nouveaux entrants. A Lyon, Julian Guillen estime à 700 000 euros le chiffre d'affaires de SpeedApéro, le plus gros des acteurs historiques qui à eux cinq dépassent le million d'euros, "alors que l'expérience n'est pas bonne et les clients souvent déçus". Bref, le potentiel existe et les axes de développement sont nombreux.

Julian Guillen, cofondateur de Vesper

Ainsi, Kol a lancé la semaine dernière une activité BtoB. "Il existe un gouffre entre la prestation d'un traiteur qui inclut le champagne et la personne qui se fournit elle-même pour un petit événement, analyse Baptiste Guez. Nous nous insérons entre les deux en proposant notre large carte à des sociétés d'événementiel auxquelles nous livrons dès le début de soirée l'alcool et la verrerie." Chez Vesper, on développe actuellement la pré-commande sur des créneaux de début de soirée.

Pour développer leur modèle, les deux sociétés envisagent une levée de fonds au deuxième semestre 2016 qui servira principalement à financer leur expansion dans d'autres villes. Pour sa part, Kol a déjà fait entrer l'Accélérateur à son capital et obtenu des financements bancaires avec une garantie de la BPI.

De quoi aussi solidifier leur position avant que d'autres acteurs ne s'intéressent à cette verticale. Amazon teste déjà la livraison d'alcool à Seattle depuis août et à New York depuis la semaine dernière. Uber, qui vient de lancer UberEats à Paris, pourrait bien ajouter des bouteilles dans le coffre des véhicules qui livrent ses plats chauds. Les jeunes pousses de l'alcool à la demande voient aussi dans Nicolas une menace possible, même s'ils doutent que le caviste s'aventure sur des horaires tardifs. Idem pour les Deliveroo, TakeEatEasy et Foodora, qui raccrochent le tablier bien plus tôt que Vesper et Kol. Julian Guillen note d'ailleurs que "sur le marché de la livraison de nuit, tout reste à faire, y compris sur l'alimentaire". Avis aux amateurs.