Emmanuel Hembert (KPMG) "Marques et e-commerçants doivent créer des modèles économiques et opérationnels pour créer de la valeur"

Organisé par la Fevad, l'événement Les Enjeux E-commerce sera consacré à l'arrivée en force des marques dans l'e-commerce. Pour l'occasion, KPMG révélera une étude exclusive sur cette tendance.

JDN. Vous présenterez à Enjeux E-commerce le 26 juin prochain une étude inédite réalisée pour la Fevad sur l'engagement des marques face au e-commerce. De quoi s'agit-il ?

Emmanuel Hembert est associé global strategy group, secteur biens de consommation et distribution de KPMG en France. © KPMG

Emmanuel Hembert. On a essayé de voir comment les marques travaillent avec les marchands pour développer leurs ventes e-commerce et comment les sites peuvent s'adapter à ce phénomène. Au départ, les e-commerçant ont poussé les marques à vendre sur leurs sites. Ils avaient besoin d'offre, de légitimité et d'image. Mais les marques ont plutôt subi ce phénomène, en retrouvant leurs produits sur des sites sans l'avoir choisi, ou en voyant les ventes physiques baisser, comme ça a été le cas dans les jouets.

Elles ont donc été amenées à réfléchir à se lancer dans l'e-commerce. Elles y ont découvert de nouvelles opportunités, se sont affranchies des limites physiques des magasins en offrant des stocks beaucoup plus larges, en mettant en place des offres qui ne pouvaient pas être présentes en magasin car il n'y avait pas de place… Cela leur a aussi permis de contourner les canaux de distribution traditionnels quand les relations étaient compliquées, et même d'avoir un contact direct avec le distributeur, ce qui n'est pas toujours le cas dans le retail. Et certains sont même allés plus loin en lançant des marques directement sur Internet, on les appelle les digital native vertical brands, ou DNVB.

Comment se sont-elles adaptées ?

Cela demande des moyens, de nouvelles compétences et de nouvelles approches. On change de perspective : il faut penser client au lieu de penser marque. Segmenter son offre, car tous les produits ne peuvent pas être vendus sur Internet, par exemple des produits à faible valeur ajoutée ou facilement périssables. Il faut revoir son marketing, avoir des descriptions de produits adaptés aux moteurs de recherche, il faut aussi revoir la logistique et sa supply chain, car on n'envoie plus des camions dans un entrepôt de distributeurs.

Quels sont leurs différents modèles ?

Le plus commun est d'intégrer l'e-commerce comme un canal de distribution à côté du canal de distribution physique. Sur Internet, il y a différents types de distribution : les grands distributeurs traditionnels qui font du drive ou de la livraison à domicile, des e-commerçants spécialisés comme La Redoute qui vont essayer de compléter leur offre avec des marques en adéquation avec leur secteur et leurs clients, et enfin les pure players qui vendent des données et des services via leur écosystème, comme Cdiscount ou Amazon.

Quelles sont les opportunités pour les marchands ?

Ils ont besoin des marques car leurs clients les demandent. Donc ils ne peuvent pas s'en passer. Pour eux, la difficulté est de proposer une base de clients suffisamment attractive. Il faut aussi qu'ils aient une proposition économique. Ce que les marques demandent le plus c'est de la data, pour comprendre les performances, les drivers de la vente, quels consommateurs achètent quels types de produits. C'est ce qu'elles font déjà dans la distribution traditionnelle avec Kantar, Nielsen, les données de cartes de fidélité qu'elles peuvent acheter... Et c'est ce qu'elles recherchent le plus souvent sur Internet.

Que reste-t-il à faire pour améliorer ces partenariats entre marques et e-marchands ?

Les demandes des e-commerçants sur la technologie et la logistique sont très disparates. Cela empêche les marques de réaliser des économies d'échelle. Elles ont créé des standards dans le commerce traditionnel. Il faut que la même chose soit mise en place dans l'e-commerce. Il faut aller vers plus de coopération. Il faut arriver à créer des modèles économiques et opérationnels qui permettent de la création de valeur tout le long de la chaîne. Créer des standards technologiques, de logistique, d'images, de textes…