Guerre des talents dans le retail : à quoi sert (encore) le vendeur ?

Alors qu'elle fait rage partout et n'épargne quasiment aucun secteur, aujourd'hui, le retail ne fait pas exception face aux difficultés de recrutement.

Bien qu’employer ce terme dans le contexte européen qui nous préoccupe puisse sembler déplacé, c’est bel et bien une bataille acharnée qui se joue entre les recruteurs de tout bord, prêts à additionner les concessions pour attirer les professionnels les plus motivés dans leurs rangs.

Mais tandis nous sommes nombreux à appeler de nos vœux une refonte du point de vente qui repositionne l’humain en son cœur, n’aurions-nous pas eu tendance à oublier l’humain qui en est le cœur : le vendeur ? Bien souvent soumis à des horaires impossibles, victime d’un manque de considération du siège comme de certains clients, et, disons-le, traditionnellement faiblement rémunéré, ce métier semble, à juste titre, ne plus attirer… Il est temps de le transformer avec bon sens et radicalité !

Faire du vendeur un conseiller

Dans le secteur particulier du luxe, il est à noter que 95% des clients priorisent le point de vente physique à l'e-commerce, pour y être conseillés (source : Boston Consulting Group) ! Et pour cause : tandis qu’il paraît indéniable d’affirmer que rien ni personne n’égalera la performance et l’expérience transactionnelles de l'e-commerce, à quoi peut bien encore servir le magasin si ce n’est de pouvoir y trouver la qualité et la préciosité d’un conseil ? Parce qu’ils bénéficient bien souvent d’une connaissance produit très approfondie, d’un relationnel consommateur concret, et aussi parfois d’une véritable passion pour leur métier, les vendeurs terrain sont aujourd’hui les mieux placés pour devenir des ambassadeurs de la marque, à même de la présenter, et de la défendre. Pour les y accompagner, il sera bien évidemment nécessaire de les former, d’une part, mais aussi de les outiller – y compris digitalement – pour leur permettre de ritualiser la découverte des produits, et d’être en mesure de délivrer le bon conseil, au bon moment.

À la bonne place dans le parcours client

Dans le point de vente, le lieu et le moment où apparaît l’humain est capital. Il détient en effet la première clé de l’expérience avec la marque. Que penser, par exemple, d’une enseigne (souvent haut-de-gamme) qui positionne dès l’entrée un vigile ? Ou encore de celle (dans l’univers du bricolage majoritairement) au sein de laquelle il est quasiment impossible d’avoir accès au vendeur pour comprendre les (mille) subtilités d’un coloris de peinture ? Aussi, au-delà même du professionnalisme du personnel recruté, lui garantir une juste place et un juste rôle dans le parcours de vente est indispensable. Il doit être une plus-value dans la boutique ! Et à ce titre, rappelons-le, disposer d’un confort de travail à la hauteur de son rôle : emplacement des réserves, aménagement d’espaces de pause, choix des lumières, de l’ambiance sonore…. Il paraît capital de revoir les agencements des points de vente, pour eux aussi, voire pour eux surtout !

 Un pilier de la vie locale !

Il n’y a pas que la marque et ses produits que les vendeurs connaissent comme leur poche, il y aussi les clients ! En fonction du quartier, du village, de la région, ils sont différents, et expriment des attentes spécifiques, que le siège parisien ne peut absolument pas imaginer, anticiper, traiter… Aussi, dès aujourd’hui, le personnel de vente doit être utilisé à bon escient par les directions marketing pour cette connaissance terrain sans égal (reconnaissance plus qu’utile de la fonction), puis avoir le pouvoir d’animer la boutique dans le temps, en s’adaptant à la culture locale, aux évènements locaux, mais également via les réseaux sociaux. Ces derniers particulièrement peuvent leur permettre d’assurer un suivi entre deux visites, par exemple, ou tout simplement d’ultra personnaliser la relation avec la marque, à un niveau que là encore, aucun CMS ne saurait atteindre.

En définitive, je gage que le métier de vendeur tel que nous l’avons connu jusqu’ici ne répond plus aux attentes des clients, ne correspond pas aux nouvelles ambitions du retail physique, et soyons honnête, n’intéresse plus beaucoup de candidats. Or, il n’a, je crois, jamais été aussi stratégique pour les marques, dans la multiplicité des inputs et des fonctions qu’il pourrait bientôt remplir. Il y a donc urgence (et pénurie) : écoutons-les, formons-les, outillons-les, et, respectons-les.