Internet fixe : Bouygues lance la guerre des prix... pour mieux se vendre ?

Internet fixe : Bouygues lance la guerre des prix... pour mieux se vendre ? Bouygues Telecom passe à l'offensive sur l'Internet fixe. Une agressivité commerciale qui ne peut déboucher que sur une guerre de prix... ou un mariage de raison.

A peine quatre jours après le déploiement par Bouygues Telecom de son offre fibre à 25,99 euros, c'est au tour d'Orange de riposter par l'intermédiaire de Sosh. Les 2,1 millions d'abonnés "quadruple play" de l'opérateur low-cost pourront en effet bénéficier du très haut débit fixe à partir de 34,99 euros par mois (soit 5 euros de plus que le forfait ADSL d'entrée de gamme). Ces derniers seront par ailleurs équipés de la Livebox Play, la box de dernière génération d'Orange

Si du côté d'Orange on parle de simple "hasard de calendrier", il est difficile de ne pas voir dans cette initiative le prélude de cette "guerre dans l'Internet fixe" que Martin Bouygues prophétisait fin décembre 2013. Le PDG de Bouygues annonçait ainsi qu'il allait casser les prix dans l'Internet fixe pour réduire les marges de d'Iliad, accusé de pratiquer une politique de la terre brûlée sur le mobile grâce aux bénéfices confortables dégagés par son offre fixe. Des velléités qui se sont concrétisées au premier trimestre avec le lancement d'une offre ADSL à 19,99 euros qui à séduit près de 100 000 nouveaux clients au premier trimestre

En remettant le couvert sur le très haut débit, Bouygues Telecom montre aussi qu'il est déterminé à se défaire de cette étiquette de petit poucet que lui valent ses moins de 10% de part de marché sur l'Internet fixe. Pour se donner les moyens de ses ambitions, le groupe s'attelle à la construction d'un vrai réseau fixe, condition sine qua none pour gagner en indépendance vis-à-vis des opérateurs, Numericable pour le très haut débit et SFR pour l'ADSL, dont il utilise les réseaux. Un moyen également de réparer les erreurs du passé pour celui qui a toujours sous-investi sur le fixe alors que tous ses concurrents devenaient "convergents". En dégroupant le cuivre et en investissant dans la fibre, Bouygues Telecom espère donc combler une partie de l'écart qui s'est creusé au fil du temps.

La nouvelle offre de fibre du groupe, disponible depuis le 30 juin à Paris et dans les principales villes de France est aujourd'hui accessible aux 1,1 million de foyers qui y sont éligibles, Bouygues s'étant à terme fixé un objectif de 3,3 millions. Le groupe espère que son nouveau "référent tarifaire" (contre 40 euros jusque-là), lui permettra de séduire de nouveaux usagers. Car comme le rappelait Olivier Roussat, "en France, seuls 2,5% des foyers ont adopté la fibre, alors que 13% sont éligibles".

Une nouvelle consolidation pour mettre fin aux hostilités ?

Les opérateurs vont-ils s'aligner les uns après les autres, comme ils l'ont fait dans le mobile ? SFR opte pour l'attentisme, trop occupé à digérer son rachat par Numericable. Free est de son côté étrangement silencieux mais a besoin des marges du fixe pour déployer son réseau mobile. Il s'est pour le moment contenté de multiplier les opérations de ventes privées, avec des box à prix cassés. D'autant qu'en toile de fond se dessine une lutte d'un autre genre, avec les rumeurs persistantes qui entourent une fusion entre Bouygues et l'un de ses deux rivaux, Orange ou Iliad. Car beaucoup voient dans cette agressivité commerciale un appel à la consolidation, un moyen de forcer la main à l'un de ses meilleurs ennemis en l'obligeant à le racheter pour mettre fin à la saignée.

Alors que le rachat de Bouygues Telecom par Orange se heurterait à de nombreux réglementaires, notamment en ce qui concerne le réseau mobile (dans la mesure où l'entité combinée posséderait 61,7% des antennes 3G et 80,4% des antennes 4G en service à fin mai, selon des experts de la Société générale), c'est du côté de Xavier Niel que se tournent aujourd'hui la majorité des regards. En rachetant celui qui lui a déclaré la guerre, l'entrepreneur du Web ferait aussitôt disparaître la menace qui pèse aujourd'hui sur son activité la plus lucrative et en profiterait pour faire grimper d'un coup sa part de marché mobile à plus de 25%.