David El Sayegh (Snep) "Couper l'accès Internet comme on envoie les contraventions établies par les radars"

Directeur juridique et prochain directeur général du Snep, David El Sayegh explique comment il espère que le gouvernement mettra en place le dispositif de riposte graduée.

Comment analysez-vous l'avis du Conseil Constitutionnel pour qui il est nécessaire de confier la décision de couper l'accès Internet d'un internaute à un juge et non à une autorité administrative, comme l'Hadopi ?

La décision du Conseil Constitutionnel consacre Internet comme une liberté fondamentale, mais il ne dit pas non plus que l'on peut y faire n'importe quoi. En conséquence, il ne s'agit pas de la mort du projet de loi Si l'on y regarde de plus près, l'ensemble du dispositif a été validé : qu'il s'agisse de la détection des IP d'où sont effectuées les téléchargements illégaux par les ayants droits, ou du processus pédagogique de riposte gradué. Seul le dispositif de sanction a été invalidé. La Conseil Constitutionnel y introduit une modification : ce sera au juge et non à l'Hadopi de procéder à la sanction. C'est le seul changement.

Difficile toutefois d'automatiser des poursuites s'il faut passer par un juge. On imagine mal un tribunal gérer plusieurs centaines ou milliers de demandes de coupure d'accès par jour...

Il n'a jamais été question d'automatiser les poursuites, mais de les personnaliser, même si elles pourraient être nombreuses. A ce propos, je ne vois pas de difficultés à ce que l'autorité judiciaire assure un traitement de masse des coupures de connexion. C'est déjà ce qui se pratique avec les radars installés sur les routes de France, par l'intermédiaire du Centre automatisé de constatation des infractions routières. Une autorité judiciaire pourrait décider de couper un accès Internet comme on traite déjà les contraventions établies avec des radars. Je ne suis pas dans la tête du gouvernement, mais j'imagine que le projet de loi sera adapté dans cette logique là. Christine Albanel est très attachée à cette idée de riposte graduée.

Passer devant un juge pourrait-il faire craindre à un internaute visé que se rajoutent des poursuites pénales pour contrefaçon ?

Non, il n'y aura aucun risque de sanction pénale car ce qui est sanctionné, c'est de ne pas avoir protégé sa connexion Internet après des actes de contrefaçon. Pas d'avoir commis des actes de contrefaçon. C'est en effet le titulaire de la ligne qui est visé par la riposte graduée, par forcément l'internaute qui télécharge des contenus de manière illicite. Nous ne poursuivrons pour contrefaçon que des individus qui en font le commerce ou qui organisent ces réseaux.