Nouvelles extensions Internet: l'ICANN se fout du Vin

Deux extensions Internet .VIN et .WINE seront bientôt lancées. Le ministère français de l'agriculture a déposé une "Early Warning" pour indiquer son désaccord quant au manque de protection proposé par le candidat au .VIN dans le cadre de la protection des Indications Géographiques (IGs). Celui-ci rendra sa réponse prochainement.

Quelle que soit sa réponse, qu'elle soit bonne ou mauvaise, l'ICANN se dé-responsabilise totalement dans la solution qui sera trouvée au problème de la question du vin car l'ICANN a proposé de suivre une procédure générale qui ne tient pas compte des problématiques du vin.

Si la protection des Indications Géographiques est une problématique, une autre question pose problème et il est important que celle-ci soit adressée au Conseil d'Administration de l’ICANN (le “board”) au plus tôt. D'après un retour que j'ai eu d'un ancien membre du board de l'ICANN, il semblerait que cette question a été traitée.

Il apparaît que les deux extensions Internet .VIN et .WINE pourront être gérées différemment par des organismes de gouvernance, des registres, différents. Cela implique les choses suivantes:
  1. Si le Ministère de l'agriculture a demandé une meilleure protection des Indications Géographiques pour les noms de domaine .VIN, ni lui ni aucun autre gouvernement ne l'a fait pour les IGs dans l’extension de noms de domaine .WINE. Ainsi, une différence est faite entre les signes “wine” et “vin” sans en reconnaître leur signification. Pour les futurs utilisateurs de ces noms de domaine, cela veut dire qu'ils n'ont aucune garantie de pouvoir enregistrer le même nom de domaine en .WINE qu'en .VIN. Cela veut dire aussi que si ce nom de domaine est celui d'une Indication Géographique, n'importe qui pourra y prétendre dans l'extension .WINE: “le .vin protègerait les Indications Géographiques...but .wine would not”!
    En d'autre terme, cela veut dire qu'une IG qui dispose de son nom de domaine en .VIN pourra voir son .WINE être enregistré par n'importe qui, dans n'importe quel pays, et pour n'importe quelle utilisation (revente, désinformation, spéculation, pornographie...). Bien que l'ICANN propose la solution de la Trademark Clearinghouse, il est illusoire de penser que toutes les IGs, marques, et autres appellations du vin sauront, auront le temps de s'enregistrer, ou voudront payer pour cela.
  2. Les conditions d'éligibilité à un nom de domaine .VIN ne seront pas les mêmes que celles d'un .WINE. Pour les utilisateurs (aussi appelés “Registrants”), cela veut dire:
  • qu'ils devront passer par des procédures d'enregistrement différentes;
  • que la procédure pour présenter son droit antérieur sur un nom devra être effectuée deux fois pour un même nom de domaine dans 2 langues différentes. Une procédure alternative devrait exister via la Trademark Clearinghouse mais elle n’est pas encore connue à ce jour. Elle imposerait de nombreuses démarches pour le candidat souhaitant se protéger ainsi qu’un coût supplémentaire;
  • qu'ils devront utiliser des prestataires peut être différents et à un prix différent;
  • qu'il sera bien trop tard s'ils fustigent auprès de l'ICANN ou du registre en charge de l’extension en cas de problème car la seule réponse qui leur sera donné sera d'envisager une procédure juridique du dit nom de domaine (tarif élevé) ou encore, d’envisager un rachat de celui-ci à un prix défini par l'actuel propriétaire (tarif souvent très élevé).
3. Les "Registres" seront lancés à des dates différentes. Pour les utilisateurs qui souhaiteront prétendre à un même nom de domaine mais dans une langue différente, cela veut dire:
  • qu'ils devront suivre les évolutions de l'ICANN et tenter d'enregistrer leur nom de domaine au bon moment;
  • qu'à partir du moment ou un délais existe pour enregistrer un même nom de domaine à une date ultérieure, le risque grandit que celui-ci intéresse aussi quelqu'un d'autre: un concurrent par exemple;
  • que s'ils ratent l'enregistrement de leur nom de domaine, il y a fort à parier que les spécialistes de la spéculation des noms de domaine y penseront à leur place. C'est malheureusement une pratique courante.
Il est inacceptable, inconcevable, que sous le prétexte de dossier de candidatures pour une même mot qui qualifie toute l'industrie du vin mais dans une langue différente, les futurs utilisateurs aient à faire face à tant de complexité pour enregistrer "leur" nom de domaine, pire encore, qu'il n'existe pas de règle ferme qui leur permette de protéger leur propriété industrielle en amont dans ces deux extensions Internet de façon simple et non différenciée.
Les gens qui traitent du vin sur Internet ne devraient-ils pas être les premiers, sinon les seuls, à pouvoir accéder à ces noms de domaine?

Ne serait-il pas plus simple de consulter les institutions du vin et octroyer la gestion des ces extensions à un seul organisme de gouvernance?

Afin de mettre l'ICANN devant ses responsabilités face à la question du vin et afin que celui-ci propose des solutions aussi basées sur le bon sens, il serait cohérent que les institutions du vin Françaises et étrangères réagissent et s’adressent directement - et publiquement - au conseil d'administration de l'ICANN.

Le monde du vin a bien du souci à se faire si l’ICANN laisse faire.