L'automobile passe à l'ère du service grâce aux data des véhicules connectés

L'automobile passe à l'ère du service grâce aux data des véhicules connectés Les données générées par les voitures intelligentes représentent de nombreuses opportunités d'inventer de nouveaux services sur-mesure.

Elle est en passe de devenir le plus efficace des assistants personnels. La voiture partage de plus en plus d'informations avec son environnement et pourra bientôt communiquer avec les communes qu'elle traverse, qui pourront ainsi conseiller aux automobilistes des services qui correspondent à leurs besoins ou encore des lieux à visiter en fonction de leurs centres d'intérêt. "Et ce n'est là qu'un exemple parmi tant d'autres, car que ce soit pour les villes, les sociétés d'autoroutes ou les commerces, notamment, il leur sera possible de proposer une multitude d'offres adaptées aux usagers qui circulent à proximité à partir des données diffusées par leurs voitures connectées", affirme Damien Alfano, PDG d'Adaccess, bureau d'études et d'ingénierie automobile français, notamment spécialisé dans l'instrumentation embarquée.

"Il sera possible de proposer une multitude d'offres adaptées aux usagers à partir des données diffusées par leurs voitures"

Des idées, les professionnels du secteur n'en manquent pas. "Les data issues des véhicules connectés sont une aubaine pour le marketing. Des sociétés d'autoroutes italiennes se sont déjà rapprochées de nous pour mettre à profit nos solutions télématiques pour profiler les usagers et leur proposer des offres sur-mesure", confirme Alain Sinquin, vice-président en charge des ventes et du marketing d'OctoTelematics.

"Les spécialistes de l'entretien et de la réparation sont par exemple intéressés pour accéder en temps réel à l'état d'usure des pièces et envoyer des offres attractives aux usagers quand les pneus commencent à s'user, par exemple. Elles peuvent aussi proposer des extensions de garantie adaptées, en fonction des statistiques observées sur les différents véhicules", poursuit-il.

Un marché juteux sur lequel Xee n'a pas tardé à se positionner. Grâce à son boîtier commercialisé depuis deux ans qui se branche directement sur la prise diagnostic, la société nordiste rend intelligent n'importe quel véhicule. Concrètement, les données sont envoyées sur une plateforme à partir de laquelle sont développés plusieurs services, disponibles directement depuis l'application smartphone dédiée.

Une boutique d'applications pour véhicules connectés

"Notre service XeeBudget permet notamment de gérer son budget automobile, notamment sur la consommation de carburant, mais aussi d'anticiper l'entretien à faire avant qu'il n'y ait de la casse. Grâce à la data du véhicule équipé mais aussi de celles de tous les autres utilisateurs, couplées aux informations fournies par les constructeurs, l'usager sait à quel moment il doit idéalement faire sa vidange, par exemple", explique Christian François Viala, chief marketing officer de Xee. "Midas offre d'ores et déjà un contrat d'entretien basé sur cet outil avec son service Midas Connect", se réjouit-il.

D'autres partenaires ont flairé le filon en se positionnant sur le XeeStore, boutique en ligne d'applications exclusivement réservées aux véhicules connectés. "Nous voyons arriver des experts de la domotique comme eedomus ou ImperiHome qui permettent aux conducteurs de prolonger leur expérience connectée de leur domicile à leur voiture, sans rupture. Des interactions se créent ainsi entre les véhicules et les maisons, en commandant depuis son volant l'ouverture du portail ou la mise en marche du chauffage, par exemple", observe Christian François Viala. Et pour ne rater aucune opportunité, Xee a fait en sorte de rendre sa plateforme data universelle en l'ouvrant aux développeurs avec le service XeeDev, via lequel elle propose un coaching technique.

"Des experts de la domotique permettent aux conducteurs de prolonger leur expérience connectée de leur domicile à leur voiture"

"Les données, si elles sont ouvertes, peuvent aussi servir aux gestionnaires de flottes, comme les loueurs, pour proposer une facturation plus intelligente", imagine Nicolas Glady, docteur en économétrie et professeur à l'ESSEC. "C'est aussi l'occasion de promouvoir un mix transport optimal, avec un échange de data entre voitures et transports en commun, et ainsi calculer des itinéraires multimodaux", ajoute-t-il.

Tout cela n'a pas non plus échappé aux constructeurs, qui comptent bien eux aussi profiter de cette manne potentielle. "Notre cœur de métier concernait à l'origine les assureurs qui veulent proposer des offres de type pay how you drive ou pay as you drive mais les constructeurs sont de plus en plus demandeurs, notamment en ce qui concerne les data comportementales et les habitudes de dépenses des automobilistes. Ils sont de plus en plus à avoir leur propre société financière et cherchent à ce que, lorsqu'un client achète une voiture chez eux, il prenne leur assurance maison. Ces data leur permettent d'offrir le contrat d'assurance le plus proche possible des attentes de leurs clients", raconte Alain Sinquin. "Nous discutons avec presque tous les constructeurs. Le français PSA est le dernier à avoir signé et Renault devrait bientôt nous rejoindre", avance-t-il.

Mais il n'y a pas que l'aspect commercial qui intéresse les industriels, selon Damien Alfano : "Les données d'usage peuvent aussi les aider à mettre en place leur cahier des charges, c'est-à-dire comment dimensionner un système de freinage ou un power train en fonction des habitudes des conducteurs. Aujourd'hui, les constructeurs sont obligés d'instrumenter des prototypes, de faire des tests normalisés sur des pistes louées et avec des pilotes professionnels. Avec le véhicule connecté, on peut imaginer des business innovants où l'utilisateur ouvrirait ses data aux industriels avec en contrepartie une assurance gratuite, par exemple. Les utilisateurs deviendraient alors des acteurs majeurs de la R&D des constructeurs en leur permettant de tester à plus large échelle et en conditions réelles leurs technologies", s'enthousiasme-t-il.

"Les automobilistes vont devenir des acteurs majeurs de la R&D des constructeurs"

Il reste néanmoins un défi majeur à relever pour tous les professionnels du secteur à en croire Christian François Viala : "Avec Xee, aucune information ne sort du véhicule sans l'accord répété de l'usager et il est indispensable que tout le monde s'en assure car la data doit être au service du conducteur et non pas à son détriment. Il faut à tout prix lui donner les moyens de les comprendre et de les contrôler."