Banque et service comptable, bientôt la convergence ?

L'actualité tech de ces derniers mois a vu émerger une tendance de fond : le rapprochement des banques avec les services et outils dédiés à la comptabilité.

De nombreux signaux faibles ont été observés aussi bien aux Etats-Unis avec le lancement par Intuit de Quickbooks Cash, un nouveau compte bancaire d’entreprise, qu’en France avec BNP Paribas et son nouveau service "My Business Assistant", la Société Générale avec l’acquisition de la néobanque Shine offrant un outil de facturation et une comptabilité simplifiée, ou encore le Crédit Agricole qui lance prochainement sa néobanque Blank, en partenariat avec un cabinet comptable en ligne. 

Nous sommes certainement en train d’assister à la naissance d’un modèle de gestion d’entreprise inédit, basé sur la convergence des services bancaires et comptables.

Offrir un service global aux entreprises

Aujourd’hui, il est possible d’ouvrir un nouveau compte bancaire dans une néobanque en quelques minutes. Il est aussi plus simple d’obtenir un crédit ou des solutions de financement avec la montée en puissance de sociétés spécialisées dans le financement aux indépendants et petites entreprises. Les banques ont donc besoin de trouver de nouveaux services à valeur ajoutée pour se différencier des autres et retenir davantage leurs clients. Par exemple, aider les entrepreneurs à facturer leurs clients, à payer leurs fournisseurs, à gérer leur trésorerie et leur comptabilité.

Le Banking-as-a-service qui consiste à fournir via des APIs divers services bancaires, permettra à de plus en plus d'entreprises de proposer à leurs clients des produits similaires à ceux de la banque tels que la gestion de portefeuilles, le transfert d'argent, les cartes de crédit, le crédit, etc. Et cela à un coût très faible et sans effort. Les comptables sont d'excellents candidats car l'offre de tels services aidera à la fois leurs clients et eux-mêmes (si les entreprises utilisent le portefeuille des comptables pour initier les paiements tant des clients que des fournisseurs). Avec l’explosion des paiements numériques, notamment dans le secteur B2B, le rapprochement entre les paiements et les factures, probablement la tâche la plus fastidieuse et la plus chronophage, deviendra plus simple. On remarque également que les entrepreneurs et les professionnels de la finance en ont assez des silos et des interfaces manquantes entre tous leurs outils et systèmes. Ils veulent pouvoir piloter leur entreprise facilement et se concentrer sur leur business plutôt que sur la gestion de la comptabilité.

La comptabilité "augmentée" : une nécessité pour les entreprises

Les banquiers et les comptables veulent tous deux être le tiers de confiance de l'entrepreneur : c’est à lui que le dirigeant s’adressera lorsqu’il aura besoin de conseils, d'une nouvelle assurance, d'une nouvelle solution de financement, etc. À l'ère du numérique, proposer une marketplace de services financiers à ses clients est un atout considérable.

Généralement, c’est vers son banquier que l’entrepreneur se tourne pour un crédit ou un financement alors que le comptable a une relation plus étroite avec son client et possède des données plus complètes. En effet, le comptable rassemble toutes les données des comptes bancaires, toutes les factures, sait à quels fournisseurs l'entrepreneur doit de l'argent, quels clients sont en retard dans leurs paiements, à quoi chaque transaction correspond, etc. Malheureusement, le comptable collecte et traite toutes ces données tardivement et ne peut donc pas vraiment les utiliser pour fournir des conseils stratégiques.

Il est ainsi fort à parier que banquiers et comptables se battront pour devenir LE tiers de confiance de l'entrepreneur et posséder ce marché. Le comptable semble être en pôle position pour remporter cette bataille car contrairement au banquier, il possède une connaissance fine de l'activité de son client et peut donc lui fournir des conseils pertinents au bon moment. Il a de plus, une relation plus personnelle avec l'entrepreneur parce que son service est plus étendu (en France, pour les PME, le panier moyen des services comptables est de 250 euros par mois alors que les dépenses moyennes en services bancaires sont environ six fois moins élevées) et que cela nécessite une certaine compréhension des enjeux et un travail humain beaucoup plus important. 

Le comptable tech-enabled, c’est-à-dire, associant outils technologiques de pointe et conseils,  sera ainsi en mesure de rassembler et d'analyser tous les flux financiers de l'entreprise en temps réel. Grâce à l’automatisation de la collecte et du traitement de base des données, le comptable se concentrera sur le conseil personnalisé à l'entrepreneur. L’avantage avec le comptable, c’est qu’il est en mesure de fournir le système financier de base aux entrepreneurs sans frais supplémentaires, facilitant grandement leur quotidien, d’un point de vue opérationnel. Enfin, la comptabilité est un secteur réglementé et protégé. Les comptables pourront bénéficier du service de "banking-as-a-service", contrairement aux banquiers, privés de "accounting-as-a-service", qui est encore trop complexe et trop personnalisé pour être entièrement automatisé pour la plupart des entreprises (à l'exception des indépendants).

La convergence banque et services comptables, la nouvelle norme

Dans un futur proche, il est fort à parier que les comptables offriront davantage de services de type bancaire. Grâce à l'open-banking et à la directive DSP2, les banques pourront proposer des outils de gestion financière à leurs clients (module de facturation, catégorisation des dépenses, projections de trésorerie, pré-comptabilité, factures et rapprochement des transactions). Banquiers et comptables continueront de s'associer pour proposer des options personnalisées (plus la banque dispose de données, moins elle est exposée au risque et plus elle peut proposer des options de financement personnalisées).