ICO ou le financement de l'avenir

Nils Lataillade, co-CEO de The Poken Company et ayant réalisé une ICO de 10,7 millions de dollars, livre son expertise sur ce mode de financement méconnu en France.

La fougue entrepreneuriale continue sa lancée, avec plus d’1 million d’entreprises créées en 2021, la France continue d’être un vivier économique fort. L’arrivée des nouvelles tendances digitales apportées par le Web 3. , tels que les crypto-monnaies ou les NFT n’ont fait qu'encenser la création de nouveaux concepts. Le Web 3.0 donne aussi le pouvoir aux utilisateurs en redéfinissant les règles et l’ICO en est le parfait exemple. Un financement par la communauté, pour la communauté. Depuis sa création, ce mode de financement a permis d’accélérer de nombreux projets, dont certains qui sont devenus des piliers de l’écosystème Web 3.0.

Par la communauté, pour la communauté

Intimement lié au Web3.0, la première ICO a été réalisée en 2013 lors d’un projet lié au Bitcoin. En 30 jours, ce sont plus de 500.000 dollars qui sont collectés. L’année suivante, le projet Ethereum lève plus de 18 millions de dollars, pour faire de l’Ether aujourd’hui, la deuxième cryptomonnaie la plus valorisée après le Bitcoin. Mais au-delà de l’objectif financier évident de cette pratique, c’est sa force de rassemblement communautaire qui est remarquée. Le “community growth” comme appelé par les experts du secteur est considérable lors d’une ICO, car ce sont des milliers de personnes qui s’investissent personnellement et financièrement. Des investisseurs mais aussi des prescripteurs, leur implication dans le projet les motivent aussi à en garantir le succès, ce qui par conséquent produit une acquisition organique phénoménale.

Mais une ICO implique aussi une grande part de responsabilité de la part de l’entreprise. L’écosystème d’investisseurs qui entoure le projet est beaucoup plus considérable que celui d’une entreprise classique. Cette situation force l’entreprise à l’origine de l’ICO à adapter son développement autour de cette communauté. Transparence et honnêteté sont donc de mise.

On pourrait même comparer cette position à celle d’une entreprise publique cotée, qui implique donc de rendre des comptes régulièrement et adopter une posture de transparence sans reproche. L’écosystème des partenaires est aussi crucial pour une ICO. Malgré un périmètre encore pollué par des opportunistes sans véritable expertise et de nombreuses arnaques, certaines entreprises offrent un accompagnement de qualité pour toutes les organisations peu expérimentées sur le sujet. Que se soit le marketing, la communication ou simplement la gestion de projets, de nombreuses sociétés spécialisées commencent à émerger et à proposer leur expertise du Web 3.0. 

Une régulation qui bat encore de l’aile

Malgré presque 10 ans d'existence, l’ICO est encore peu comprise ou régulée en France. L’AMF, qui a lancé une consultation sur la question en 2017, a commencé à poser un cadre pour cette pratique. Mais malgré un encadrement qui s’installe de plus en plus durablement, cela n’empêche pas certains couacs sur le secteur. L’ICO de Air Next en 2021 le rappelle, avec une mise en garde émise par l’AMF sur l’offre de l’entreprise. L’organisation soupçonnait la levée comme frauduleuse, ce qui a été confirmé depuis. C’est finalement en 2019 que l’AMF pose les premières bases solides grâce à son visa qui instaure un cadre pour les levées de fonds par émission de jetons mais aussi, via un agrément optionnel, sur les prestataires de services sur actifs numériques.

L’accompagnement légal sur le sujet en est aussi à ses premiers balbutiements. Les cabinets de conseils ainsi que les avocats continuent de monter en compétences en même temps que les entreprises. Il est donc important et crucial de continuer à construire ce cadre législatif pour permettre à la pratique des ICO de se pérenniser. Un cadre apporterait aussi sérénité et confiance aux utilisateurs et par conséquent permettrait d'accélérer son adoption par le grand public.

Mais récemment l’inquiétude des acteurs du secteur s’est intensifiée à cause du manque de considération du Web 3.0 par les candidats à l'élection présidentielle. En effet, très peu de candidats ont mentionné ou intégré cet écosystème dans leurs programmes. En espérant que le poids économique de ce dernier, qui continue de croître, va forcer les responsables politiques à le considérer comme une industrie à part entière. Pour faire de la France un des pays leader dans les projets du Web 3.0.

Affaire à suivre . . .