Report des usines Intel en Allemagne et en Pologne : un revers pour l'Europe
Entre surcoûts et ralentissement de la demande, le géant américain des puces électroniques revoit ses priorités et reporte ses projets européens. Une décision qui complique les efforts de l'Union européenne pour renforcer sa présence dans le secteur des semi-conducteurs.
L'industrie européenne des semi-conducteurs subit un coup dur. Le géant Intel a récemment confirmé le report de deux ans de ses projets d'usines en Allemagne et en Pologne. Alors que ces projets, fortement subventionnés, étaient censés renforcer la production de puces en Europe, leur suspension souligne l'incertitude qui règne autour de la demande mondiale de semi-conducteurs. Un revers inattendu pour Berlin et Varsovie, qui avaient misé des milliards d'euros sur ces investissements stratégiques.
Les projets d'Intel freinés par des surcoûts et une demande incertaine
Intel, en pleine réorganisation stratégique, a justifié ce report par des prévisions incertaines sur l'évolution de la demande en semi-conducteurs. Initialement prévus pour débuter en 2023, les chantiers de Magdebourg, en Allemagne, et de Wroclaw, en Pologne, devaient renforcer la souveraineté industrielle européenne dans un secteur critique. Cependant, des surcoûts liés à l'inflation et une demande stagnante ont poussé l'entreprise à revoir son calendrier.
Le projet allemand, dont le coût total est estimé à 30 milliards d'euros, devait bénéficier selon Le Monde, d'une subvention de 10 milliards d'euros du gouvernement. Une aide massive qui souligne l'importance de ce projet pour Berlin. En Pologne, Intel avait également prévu d'investir près de 4,6 milliards de dollars, générant ainsi 2 000 emplois directs.
L'Europe face à un camouflet économique
Ce report est perçu comme un échec pour l'Europe, notamment pour l'Allemagne qui voyait en ces projets une opportunité de relocaliser la production de semi-conducteurs sur le continent. Les ambitions de l'Union européenne visant à réduire sa dépendance aux importations de puces, principalement en provenance d'Asie, sont sérieusement compromises par cette décision.
Malgré l'ampleur des subventions promises, l'entreprise américaine semble prioriser son expansion sur le sol américain. En effet, les États-Unis d'après Les Echos, sous l'impulsion de la loi CHIPS Act, ont alloué 20 milliards de dollars pour soutenir le développement d'Intel dans plusieurs États comme l'Arizona et l'Ohio. Ce soutien public américain contraste avec l'incertitude qui pèse sur les projets européens.
Un contexte global marqué par l'intelligence artificielle et l'IA générative
Intel, confronté à une baisse de ses ventes de PC post-pandémie, se tourne désormais vers de nouvelles opportunités, notamment dans le domaine de l'intelligence artificielle (IA). Alors que la demande pour des puces adaptées à l'IA générative explose, la concurrence s'intensifie, notamment avec Nvidia qui domine ce marché.
Le directeur général d'Intel, Pat Gelsinger, a confirmé que l'entreprise investit massivement dans des technologies de pointe, telles que la lithographie en ultraviolet extrême (EUV), pour rattraper son retard sur ses concurrents asiatiques comme TSMC et Samsung. Toutefois, ces avancées technologiques ne suffisent pas encore à redresser la situation financière du groupe.
Conséquences pour les plans industriels européens
La suspension des projets en Allemagne et en Pologne renforce l'idée que l'Europe devra trouver d'autres moyens de maintenir sa compétitivité dans la production de semi-conducteurs. Le continent, qui ambitionne de produire 20% des puces mondiales d'ici 2030, voit ses espoirs retardés.
Pour l'instant, Intel maintient son site industriel à Leixlip, en Irlande, mais aucune nouvelle usine ne devrait voir le jour sur le Vieux Continent dans un avenir proche. Ce recul est d'autant plus difficile à accepter pour les gouvernements européens que la souveraineté technologique est devenue une priorité dans un contexte de tensions géopolitiques accrues.