Solaire : la filière sous pression entre incertitude politique et coupes budgétaires
Alors que le gouvernement promet un soutien aux énergies décarbonées, les annonces du Premier ministre et les mesures inscrites dans le budget 2026 provoquent une onde de choc dans la filière solaire. Témoignages d'acteurs de terrain et réactions à la réforme des contrats d'achat.
Des annonces jugées floues et insuffisantes
Dans le Loiret, Romain Roy, PDG du groupe Roy Énergie, spécialisé dans les panneaux photovoltaïques, ne cache pas sa déception après la déclaration de politique générale de Sébastien Lecornu. Son entreprise de 200 salariés vient de construire une extension, mais les machines, d'un million d'euros, n'ont pas encore été achetées. "Quand vous faites des investissements comme je suis en train de vous présenter, le retour sur investissement, c'est 7, 15 ou 20 ans", explique-t-il à France Info. Selon lui, "si vous ne savez pas où vous allez à trois ans, personne ne vous prête d'argent et personne n'entreprend".
Il critique vivement l'absence de cap clair : "Qu'ils se concentrent sur le régalien, l'alimentation, la santé, l'armée, l'énergie. Qu'ils nous donnent des caps et les TPE, les PME feront le reste. On n'a pas besoin de leurs conseils. "Le chef d'entreprise dénonce aussi l'instabilité fiscale : "Ils choisissent la TVA qu'ils veulent et ce sont des formes d'instabilité qui perturbent beaucoup les business plans. "
Dans le même groupe, Quentin Dimanche, directeur financier, observe également une incertitude croissante : "À gauche et au centre, ils veulent maintenir le photovoltaïque, à droite ce n'est plus du tout le cas. Si le RN passe, le carnet de commandes risque de bien diminuer", confie-t-il à France Info.
Un projet de réforme jugé brutal par les professionnels
Le projet de loi de finances 2026 prévoit une révision rétroactive des tarifs d'achat de l'électricité solaire, dénoncée par les organisations professionnelles. Ces contrats, souvent signés entre 2006 et 2010, garantissaient un prix de rachat élevé : 567 euros/MWh en moyenne, selon la Commission de régulation de l'énergie.
La mesure vise à "mettre un terme à des situations de rémunération excessive", a justifié Sébastien Lecornu à l'Assemblée, cité par Les Échos. Elle s'appliquerait aux centrales de plus de 250 kW, comme prévu initialement dans le budget 2021, avant l'annulation du dispositif par le Conseil d'État.
Daniel Bour, président d'Enerplan, réagit : "L'État n'est pas bon joueur, sachant que c'est lui qui avait décidé des tarifs S6-S10." De son côté, Jules Nyssen, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER), dénonce "un acharnement" et alerte sur "la tendance à venir modifier par la loi des contrats, [qui] détruit la confiance des investisseurs".
Outre la baisse des tarifs, d'autres dispositions visent la filière solaire : doublement de l'impôt sur certaines centrales mises en service avant 2021, déplafonnement des contributions en cas de flambée des prix, et retour d'une clause censurée par le Conseil constitutionnel début 2025.