Sovaldi, le médicament qui plombe le budget de la Sécurité sociale

Sovaldi, le médicament qui plombe le budget de la Sécurité sociale Ce traitement contre l'hépatite C est efficace mais hors de prix. Les autorités tentent de faire baisser la facture par tous les moyens.

Dans les bureaux de l'Assurance maladie, le bras de fer dure depuis plusieurs mois autour du Sovaldi. Ce nouveau médicament contre l'hépatite C a été commercialisé en janvier 2014 en France par Gilead, un laboratoire américain spécialisé dans les maladies virales. Une véritable révolution pour les 200 000 patients atteints de la maladie : il affiche une efficacité de 90% contre 50% pour les médicaments classiques, et supprime les injections d'interféron, aux graves effets secondaires. "C'est la première fois au monde qu'on arrive à guérir complètement une maladie virale chronique potentiellement mortelle", s'enorgueillit Michel Joly, qui dirige Gilead France.

En 2014, le Sovaldi pourrait coûter 800 millions d'euros à la Sécu, soit 3,5% de la totalité des dépenses de remboursement de médicaments en 2014

Mais il y a un hic : son prix. 666 euros le comprimé, soit 56 000 euros pour les trois mois de traitement, selon le prix provisoire fixé par le laboratoire. En 2014, le Sovaldi a déjà coûté plus de 440 millions d'euros à la Sécurité sociale et sur l'ensemble de l'année, la facture pourrait grimper à 800 millions. Soit 3,5% de la totalité des dépenses de remboursement de médicaments en 2014. Et c'est sans compter les molécules auxquelles il doit être associé (comme le siméprévir de Janssen ou le daclatasvir de BMS). Au final, le coût par patient atteint entre 91 000 euros et 147 000 euros.

Inacceptable pour le gouvernement, qui multiplie les pressions sur le laboratoire pour faire baisser ses tarifs. La ministre de la Santé Marisol Touraine a ainsi dégainé un projet de loi intégré au prochain PLFSS, qui doit être voté en décembre, pour taxer les laboratoires dont le chiffre d'affaires pour un traitement qui dépasse 450 millions d'euros en 2014. Gilead et son Sovaldi sont explicitement visés. 

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Un seul comprimé de Sovaldi coûte 666 euros. © Gilead

En septembre, les ministres de la Santé de 14 pays européens se sont réunis pour tenter ensemble de négocier une baisse de prix. Une première.

Du côté de Gilead, on se veut plutôt conciliant. "Le prix définitif sera certainement inférieur au prix actuel temporaire", rassure Michel Joly. Au Royaume-Uni, où le Sovaldi sera mis sur le marché en novembre, le tarif a par exemple été fixé à 43 000 euros pour trois mois. Le laboratoire s'engage en outre à rembourser à l'Assurance maladie l'intégralité de la différence entre le prix provisoire et le prix définitif. 

Pour autant, il entend bien faire valoir ses arguments dans la négociation. "Même avec un tarif de 56 000 euros, le Solvadi reste rentable par rapport aux coûts engendrés par la maladie", rappelle Michel Joly. Qui met aussi en avant que son médicament sera disponible dans 91 pays du Sud à prix cassé. En Inde et en Egypte, la cure coûtera ainsi à peine 900 dollars par personne.

Un nouveau traitement encore plus cher

Mais Gilead est d'autant plus prêt à lâcher du lest sur le Sovaldi qu'il prépare une nouvelle botte secrète : la mise sur le marché début 2015 de l'Harvoni, une version "deux-en-un" du Sovaldi associé au ledipasvir, une nouvelle molécule. "Avec ce nouveau traitement, on atteint des taux de guérison de 99% voire 100%", annonce Michel Joly. "Et il suffit la plupart du temps de prendre un seul comprimé par jour". Du coup, son prix est encore plus cher que celui du Sovaldi. 

Aux Etats-Unis, où le médicament a reçu une autorisation de mise sur le marché le 10 octobre, il s'élève à 94 500 dollars pour 12 semaines (74 800 euros) et 63 000 dollars (49 900 euros) pour 8 semaines. "Cela reste bien inférieur au coût actuel total des traitements associés", rappelle Michel Joly. Qui assure aussi que de nouvelles recherches sont en cours pour faire baisser la durée du traitement à six voire quatre semaines.

Finalement, c'est la concurrence qui pourrait faire baisser les coûts : le laboratoire Abbvie a déposé en mai un dossier d'AMM auprès des autorités européennes pour un nouveau traitement combinant trois antiviraux, avec une efficacité de 99%.