Francesca Bria (Barcelone) "Barcelone lance un plan numérique sur trois ans doté de 70 millions d'euros"

La chief technology and digital innovation officer de la ville veut mettre l'accent sur l'innovation urbaine et réserve 10 millions d'euros aux jeunes pousses catalanes.

Francesca Bria est ‎chief technology and digital innovation officer à la mairie de Barcelone. © Ajuntament de Barcelona

JDN. Barcelone accueille pour la cinquième année consécutive le Smart City Expo World Congress et est souvent citée en référence parmi les smart cities les plus abouties dans le monde*. Où en êtes-vous aujourd'hui dans le développement de votre projet ?

Francesca Bria. Nous sommes en train de remettre à plat toute notre stratégie. Nous venons de lancer un plan numérique sur trois ans doté d'un budget d'environ 70 millions d'euros. Au lieu de ne voir que l'aspect technologique de la smart city nous voulons désormais travailler l'innovation urbaine. La start-up Sotavia, par exemple, que Barcelone a récemment repérée lors d'un hackathon, a développé une sorte de Google Street View dédié à la détection automatique des routes les plus dégradées grâce à un véhicule bardé de caméras qui parcoure nos rues. Nous venons aussi d'expérimenter pendant un mois un outil de gestion des flux de piétons basé sur le big data qui, grâce à des caméras 3D et des capteurs GSM, permet de visualiser les déplacements des visiteurs autour de la Sagrada Familia et ainsi d'anticiper les points de congestion.

Quelles sont vos priorités pour le futur ?

La technologie doit régler les problèmes urbains mais aussi sociaux. Nous sommes en train de réduire considérablement la fracture numérique avec de la fibre déployée dans toute la ville et des bornes Wifi publiques pour que les habitants se saisissent du numérique. Nous sommes également en train de développer une cartographie big data basée sur nos données publiques, comme la consommation d'eau ou d'électricité, pour repérer les habitations vides et en faire du logement social. Cela pourra aussi nous aider à mieux appréhender les prix du marché et anticiper les effets des locations Airbnb sur l'immobilier, par exemple. Nous avons également lancé le projet Vincles BCN pour développer la e-santé et l'usage de la télémédecine. Par ailleurs, la distribution de l'électricité sera bientôt sous la responsabilité de la ville, nous comptons donc travailler sur les smart grids et les énergies renouvelables.

Croyez-vous en l'open data ?

Nous avons une grande stratégie de data governance. La donnée est à nos yeux une infrastructure comme l'eau ou l'électricité qui doit être publique est ouverte. Notre portail open data est doté de plus de 300 datasets et ses API sont ouvertes. Nous avons envoyé une directive aux services publics pour qu'ils ouvrent tous leurs données mais nous voulons que les citoyens en soient les propriétaires donc nous faisons très attention à ce que leurs droits sont respectés.

Nous croyons aussi à l'open source pour encourager l'économie circulaire et nous tenons à ce que tous les réseaux de capteurs de la ville, principalement sur le réseau d'eau, les transports, les parkings et la collecte des déchets, soient dotés d'une infrastructure ouvertes. Les codes que nous utilisons sont consultables et réutilisables sur GitHub.

Nous avons également créé la plateforme de participation ouverte Decidim qui permet aux habitants de soumettre leurs idées quant à l'avenir de la ville et à laquelle 70 000 citoyens ont déjà participé.

Quelles sont vos principales entreprises partenaires ?

Nous en avons beaucoup comme Cisco ou Telefonica mais il est difficile de toutes les citer car nous avons mis en place un système d'approvisionnement ouvert (ou open procurement, ndlr), c'est-à-dire qu'aucun contrat n'est exclusif ni immuable.

Nous voulons aussi aider les start-up et les petites entreprises à se faire une place sur ce marché. 10 des 70 millions d'euros de notre plan numérique seront utilisés pour aider ces sociétés naissantes à se développer. En plus de ces 70 millions, le gouvernement va investir massivement dans la formation et l'éducation au numérique et nous allons continuer d'encourager les Fab labs, sur lesquels Barcelone a été l'une des villes pionnières dans le monde.

*Juniper Research a classé Barcelone en seconde position de son classement des meilleures smart cities du monde.