Mobilité urbaine : repenser les déplacements en temps de pandémie

La mobilité urbaine a-t-elle vraiment été bouleversée par le COVID-19 comme pourrait le laisser croire le deuxième confinement et la baisse drastique du nombre de voyageurs ?

La plupart d’entre nous travaillent maintenant de la maison et lorsque nous devons voyager, nous préférons la sécurité de la voiture individuelle aux transports en commun, qui, comme leur nom l’indique, pourraient favoriser la prolifération du virus. S’il est impossible de nier que la demande est moins forte que pendant la période pré-COVID, l’ambition de proposer une solution unique, orchestrée, fluide et environnementale, elle, n’a pas disparu.

Et si le COVID-19 a rendu certains de nos déplacements obsolètes, la pandémie a aussi été l’occasion de réaliser l’impact de la circulation routière sur la qualité de l’air : avec la réduction du trafic, les taux de pollution ont dramatiquement diminué. Pour perpétuer cette amélioration, des politiques favorisant les modes de transports écologiques et réduisant le nombre de voitures en ville ont été mises en place comme les zones sans voiture que l’on voit fleurir outre-manche.

En mai, le gouvernement britannique a libéré un fond de près de 300m£ pour financer des initiatives visant à encourager les modes de déplacement "doux". Dans les derniers mois, 200 projets de réattribution des routes ont été proposés et 54 conseils municipaux ont mis en place une restriction de la circulation des véhicules y compris Birmingham, Manchester and Edinburgh. A Londres par exemple, 141 arrondissements ont été classées « Low Traffic Zones », quartiers où seules les voitures des résidents ont le droit de circuler.

La France va dans la même direction en créant plus de 500 kilomètres de nouvelles "coronapistes" dont beaucoup sont prévues pour durer bien après la crise. Cette démarche avait déjà commencé en décembre 2019 avec le passage de la Loi d’Orientation des Mobilités qui a créé des zones à faible émission (ZFE) pour réguler le trafic des véhicules les plus polluants. Ces ZFE sont déjà en place à Grenoble, Lyon et Paris, et de nouvelles zones seront créées en 2021 dans sept nouvelles agglomérations : Aix-Marseille-Provence, Montpellier-Méditerranée, Nice-Côte d'Azur, Rouen-Normandie, Strasbourg, Toulon-Provence-Méditerranée et Toulouse.

Si la voiture ne peut pas être complètement bannie des centres villes, les voitures électriques et partagées, elles, se développent. Ainsi, Renault a lancé son service d’autopartage électrique ZITY en plein COVID faisant écho à des initiatives similaires, par exemple à celle de Volkswagen avec WeShare qui compte s’étendre depuis la capitale allemande à toute l’Europe en 2020. Les deux entreprises partagent des chiffres rassurants citant 11 000 clients pour ZITY à Paris et 335 000 à Madrid et 50 000 clients pour WeShare à Berlin.

C’est aussi en plein COVID que la mairie de Paris a attribué l’appel d’offre pour les trottinettes en libre-service, qu’Intel a racheté le calculateur d'itinéraires israélien Moovit pour près d’un milliard de dollars, que la SNCF a signé un accord avec Uber, que FREE NOW a intégré l’offre de trottinettes Voi et que la RATP a racheté Mappy. Ces exemples montrent que l’avenir de la mobilité réside dans la complémentarité des modes de transports, et la volonté des acteurs privés et publics d’investir massivement dans la mobilité de demain. Dans certaines villes comme Paris, avec 3,5 millions d’habitants et plus de la moitié des foyers non équipés d’un véhicule, le modèle Mobility-as-a-Service (MaaS) n’est pas une option, mais une vraie nécessité.

Le COVID-19 n’a pas sonné le glas de la mobilité urbaine. Au contraire, la pandémie a mis en lumière un des principaux avantages du MaaS : sa flexibilité à prendre en compte une variété de contraintes, allant de la restriction de circulation de voitures dans certaines zones, à la limitation du nombre de passagers par wagon. Le vrai défi de la mobilité urbaine n’a pas été impacté lui par le COVID : c’est celui de la rentabilité. Là aussi, une solution est possible : au lieu de diriger leur offre vers les voyageurs, les entreprises de MaaS comme Trafi, la startup lituanienne derrière l’application berlinoise Jelbi, s’allient aux villes, partout en Europe. La mobilité urbaine est morte ; vive la mobilité urbaine !