Le chief IoT officer, le nouveau profil que les entreprises vont s'arracher
Les premiers recrutements sur ces postes complexes, à cheval entre le business et la technologie, auront lieu dans les grands groupes en 2017.
Les entreprises viennent à peine de trouver leur chief digital officer (CDO), qu'elles vont devoir se creuser la tête pour trouver LE profil parfait pour occuper un nouveau poste : directeur de l'IoT, autrement appelé chief IoT officer, ou CIoTO.
"Les premiers recrutements devraient être réalisés dès 2017 par les entreprises qui misent de plus en plus sur les objets connectés, soit pour se muscler dans leur cœur de métier, soit pour développer des business models complémentaires", affirme Emil Berthelsen, analyste chez Machina Research, spécialiste des études de marchés dans le secteur de l'Internet des objets. "Plusieurs membres du Global 500 de Fortune devraient sauter le pas l'année prochaine", affirme son agence dans un rapport publié en janvier 2016.
29% des entreprises utilisent des objets connectés, elles seront 43% fin 2016 selon Gartner
Le mouvement a déjà débuté cette année. "Plusieurs firmes comme General Electric ou PTC ont créé des départements IoT qui sont gérés par un manager. Même s'il ne porte pas encore le nom de directeur de l'IoT et que les contours précis de son poste restent à définir, cela prouve bien que le mouvement est amorcé", affirme Syed Hoda, directeur marketing du spécialiste de l'analyse de données Sight Machine.
29% des entreprises utilisent des objets connectés, selon une enquête réalisée fin 2015 par le cabinet Gartner auprès de 465 sociétés de 18 domaines d'activité différents, implantées en Amérique du Nord, en Asie et en Amérique latine. Ils seraient 43 % fin 2016. Le directeur IoT pourrait donc avoir une utilité dans de nombreux secteurs : "Sociétés technologiques, industrielles, spécialistes de la logistique, fabricants d'électroménager, entreprises de construction… Tous les acteurs susceptibles de mettre des appareils intelligents dans les mains de leurs clients ou de mieux surveiller leur processus de production grâce à ces nouveaux outils sont concernés", énumère Christophe de Bueil, directeur du recrutement digital chez Robert Half.
Les objets connectés sont de nouveaux canaux de collecte de data très puissants. Pour Christophe de Bueil, "la mission numéro un du directeur de l'IoT sera de faire analyser ces informations et de les transformer en atouts business pour son entreprise, tout en veillant à ce qu'elles ne soient pas piratées."
La mission numéro un du directeur IoT : valoriser les données collectées par les objets connectés
Grâce à cet outil, les groupes peuvent créer de nouveaux services, renforcer des activités déjà en place, mais aussi rendre plus efficaces des métiers supports, comme le service après-vente ou le marketing (l'IoT pourrait par exemple permettre de créer des campagnes de pub personnalisées en fonction des données recueillies sur chaque client). "Ce chef d'orchestre des objets connectés devra veiller à ce que tous les départements de sa société aient accès aux informations dont ils ont besoin pour valoriser au maximum leur business, quitte à bouleverser la culture de certains services", pointe Emil Berthelsen.
Au-delà de l'analyse, de la sécurisation et de la valorisation des données, le directeur IoT se frottera à l'objet connecté en lui-même. "Les entreprises qui conçoivent directement leurs appareils intelligents doivent réfléchir à un design simple, à un réseau de communication et à une batterie adaptée, afin que ces produits deviennent de vrais leviers de croissance", souligne Christophe de Bueil.
"La personne choisie doit être à la croisée des chemins entre la technologie et le business. Elle doit avoir un point de vue systémique, être capable de travailler avec les équipes internes et les clients à l'extérieur", souligne Emil Berthelsen. Et Syed Hoda de poursuivre : "Télécommunication, cybersécurité, design, analyse de données, relation client, stratégie… Ce poste doit être occupé par quelqu'un qui sait tout faire ou presque."
Le Chief IoT Officer doit faire partie du top management et prendre directement ses ordres auprès du patron
Pour que ce couteau suisse puisse mener efficacement sa mission, il faut qu'il fasse partie du top management et qu'il prenne de préférence ses ordres directement auprès du patron. Dans les grands groupes, il peut intégrer le comité exécutif. "Dans certaines sociétés, il se peut même qu'il devienne l'homme qui murmure à l'oreille du PDG", conjecture Syed Hoda.
Christophe de Bueil nuance : "en fonction du marché au sein duquel évolue l'entreprise, de son business model, la position du directeur IoT variera. Si elle a décidé de mettre l'accent sur le CRM par exemple, il pourra être placé sous les ordres du directeur digital. Si la société fabrique elle-même ses objets connectés et les vend directement à ses clients, il sera intégré à l'équipe produit."
Une partie des missions du grand manitou de l'IoT, comme la cybersécurité, peuvent être externalisées dans un premier temps. "Mais il faut les réintégrer dans la société sans trop attendre, car c'est toute la stratégie produit et les données client qui sont en jeu, c'est-à-dire son cœur de valeur. L'IoT est un sujet stratégique qui aura un impact durable sur l'organisation interne des entreprises. En sous-traitant la gestion des données collectées par les objets connectés, elles risquent d'être vidées de leur substance", averti Christophe de Bueil. Pour éviter à leur compagnie de se faire évincer par un sous-traitant, les RH n'ont plus qu'à ce mettre en quête de la perle rare.