Les batteries en papier, le pari de BeFC dans l'IoT

Les batteries en papier, le pari de BeFC dans l'IoT L'entreprise, qui a débuté en incubation à la SATT de Grenoble Linksium prévoit d'ici deux ans une production de cinq millions de biopiles par jour pour les objets connectés à usage unique.

Pour ses biopiles dédiées à l'IoT, l'entreprise française BeFC a fait le choix des enzymes. Elle propose une solution en papier carbone durable et sans métal pour alimenter les objets connectés. Seules quelques gouttes de liquide permettent d'en activer le fonctionnement, les enzymes produisant plusieurs milliwatts d'électricité par centimètre carré grâce à la biocatalyse. Une opération suffisante pour les capteurs ou émetteurs sans fil basse consommation.

"L'alimentation des objets connectés représente un frein pour un certain nombre de marchés, notamment pour la démocratisation des capteurs en logistique. Par ailleurs, 97% des piles dont celles au lithium finissent en décharge et le coût de recyclage pour les entreprises est conséquent. Un industriel nous a confié y dépenser plus de cinq millions d'euros par an", explique Jules Hammond, expert dans le développement de piles à biocarburant à base papier et CEO de BeFC.

Il a fallu plus de deux ans de R&D à l'équipe de quatre personnes de BeFC, qui a démarré en incubation à la SATT de Grenoble Linksium avec le projet Jetcell, pour mettre au point sa solution durable de pile à usage unique et assurer sa miniaturisation. "Les biopiles existantes mesurent 15 centimètres de diamètre. Nous sommes parvenus à en produire une de moins de 1 centimètre carré de surface. Sans nos différentes expertises, qui se sont révélées complémentaires, il aurait été impossible d'y parvenir", souligne le docteur Jean-Francis Bloch, spécialiste des propriétés physiques des matériaux fibreux et de l'optimisation des procédés industriels, en particulier dans le contexte de la fabrication du papier. Au total, six brevets ont été déposés pour protéger l'innovation développée. La start-up BeFC, dont le nom est issu de l'abréviation de Bioenzymatic Fuel Cells, est en cours de création.

Pour des objets en Bluetooth ou en Wi-Fi

BeFC identifie déjà de forts potentiels de croissance dans l'IoT. "Nous ciblons en particulier les marchés de la logistique et de la santé , où les dispositifs médicaux portables, comme les patchs et tests de grossesse, représentent des centaines de millions d'objets jetables", confie Jean-Francis Bloch, qui insiste sur le fait que la biopile n'a pas vocation à remplacer toutes les piles au lithium dans l'IoT. L'équipe met en avant la flexibilité et l'adaptabilité de la forme et des caractéristiques de sa solution. "Nous pouvons jouer sur la surface pour fournir davantage de puissance. La biopile permet d'alimenter des objets en Bluetooth ou en Wi-Fi par exemple", souligne Jean-Francis Bloch. Capable d'être stockée pendant un an, la biopile a une durabilité d'une journée, "un temps suffisant pour traquer un colis".

"Nos partenaires nous incitent à passer à l'échelle rapidement"

"Autre argument de poids avec la tendance actuelle des entreprises d'adopter des objectifs éco-responsables, cette solution permet de réduire l'impact environnemental", ajoute Marie Berthuel, en charge de la communication de BeFC et experte dans le domaine de l'électrochimie et des réactions enzymatiques. Lauréate du Leyton Sustainable Start-up Challenge, BeFC présente sa solution au CES sur le stand du cabinet de conseil Leyton. "Nous l'avons sélectionné pour nous accompagner car le concept est novateur et répond à un vrai sujet, l'environnement", indique Julien Pierrepont, directeur innovation chez Leyton en France.  

Des industriels se sont déjà montrés intéressés par la solution de BeFC. Des contrats sont notamment engagés avec le spécialiste suisse des tests d'ovulation et de grossesse Clearblue et un groupe urologique suédois. "Nos partenaires nous incitent à passer à l'échelle rapidement, un industriel notamment nous demande 100 millions d'unités pour alimenter des patchs médicaux. Nous produisons actuellement 10 000 piles par jour. L'objectif serait de passer à 25 000 dans quelques mois et d'industrialiser la solution à cinq millions de pièces par jour en 2022", précise Jules Hammond, qui prépare une levée de fonds afin de réussir cette industrialisation. "Les capteurs biodégradables constituent une solution d'avenir. On commence à voir des solutions sans lithium mais pour des objets low energy et simples. Il faut tout de même que la batterie fournisse quelques centaines de milliampères et une durabilité, donc je reste prudent", tempère Christophe Fourtet, directeur scientifique chez l'opérateur Sigfox, qui s'intéresse aux solutions d'energy harvesting sur le marché.