Avec Loamics, l'Université Côte d'Azur développe le concept de médecin augmenté

Avec Loamics, l'Université Côte d'Azur développe le concept de médecin augmenté Pour parvenir à une médecine personnalisée, les outils de pilotage de la donnée se révèlent indispensables, notamment avec l'essor de l'IoT.

Les données de la médecine de ville représentent une mine d'or inexploitée, dont l'Université Côte d'Azur à Nice entend tirer profit pour faire émerger le concept de médecin augmenté. Dans le cadre du projet Primege (pour Plateforme Régionale d'Information en MEdecine GEnérale) dont il est responsable, David Darmon se base sur les données de la vie réelle des patients pour parvenir à la hiérarchisation des problèmes de santé et l'orientation des pratiques en faveur de la réduction des hospitalisations. "Les médecins ne peuvent pas avoir en tête le suivi de chaque patient. Pour les assister, il faut des outils : de l'IoT pour récolter les données de santé des patients, de l'intelligence artificielle pour les interpréter, mais surtout un outil de pilotage pour gérer correctement ces données", soutient le directeur du département d'enseignement de recherche en médecine générale.

"Rien qu'à l'Université Côte d'Azur, nous avons un parc logiciel de plus de 50 logiciels différents en médecine générale."

La grande problématique au niveau des données de santé est leur hétérogénéité. "Les informations sont encore parfois notées à la main. Il n'y a pas de langage commun pour les terminologies et classifications, il arrive qu'une pathologie ne soit pas décrite de la même façon par les médecins, cela peut aboutir à une confusion. Les outils numériques sont de surcroît variés : rien qu'à l'Université Côte d'Azur, nous avons un parc logiciel de plus de 50 logiciels différents en médecine générale. Une même donnée peut être à plusieurs endroits à la fois. J'ai travaillé cinq ans avec 15 médecins généralistes, qui ont chacun environ 20 patients par jour, cela représente plus de 600 000 patients dans la base de données", raconte David Darmon, qui travaille sur cette problématique depuis plus de dix ans.

Cette expérience l'a mené à la tête du projet Primege, cofinancé par le Feder (fonds européen de développement régional) pour mener un POC . Dans un premier temps, les équipes de David Darmon ont créé un modèle de données et; logiciel par logiciel, ont vérifié quel type d'informations y étaient entrées par les médecins et si elles étaient standardisées. L'Université Côte d'Azur s'est alors associée à Loamics pour utiliser sa base de données assurant l'interopérabilité des données entre les différentes solutions logicielles avec un objectif : rendre accessible des données favorisant une médecine personnalisée, jusqu'alors noyées dans le flux. "On a pu se départir de la logique de contraindre l'information à entrer dans un modèle de base de données et la visualiser selon les besoins", affirme David Darmon.

Coupler les données IoT

Se concentrer sur la médecine de ville était essentiel pour David Darmon : "La recherche en santé alloue 90% de ses moyens sur la recherche hospitalière et 10% sur la recherche en santé publique, détaille-t-il. Or, sur 1 000 personnes exposées à un facteur de santé, 750 éprouvent un symptôme et essaient de se soigner seules, 250 vont consulter un médecin généraliste et un seul d'entre eux arrive au CHU. La crise sanitaire a souligné que l'exploitation des données de ville permettrait d'anticiper les hospitalisations et d'avoir un système de veille épidémiologique. C'est ce système que l'on propose."

"Le cockpit du médecin augmenté doit agréger des historiques et des données arrivant en temps réel"

Un sujet d'autant plus important qu'avec l'essor des objets connectés en santé, il est nécessaire d'avoir "un réseau humain d'analyse de ces données pour ne pas que les patients s'inquiètent inutilement. Cela doit aller de pair", affirme David Darmon. "Le cockpit du médecin augmenté doit en effet agréger des historiques et des données arrivant en temps réel", indique Stéphane Bollon, directeur général de Loamics, qui permettra aux professionnels de santé de partager leurs données de manière sécurisée. Avec le soutien de Loamics, David Darmon est en discussion avec certaines métropoles pour agréger les données environnementales de leurs capteurs. L'Université Côte d'Azur a développé par ailleurs un centre d'innovation et de partenariat proposant aux patients de partager leurs données de santé via l'IoT pour coupler les données environnementales avec celles des patients et des médecins.

Les premiers résultats du POC, dans la mise en place d'outils de pilotage, "sont positifs", se réjouit David Darmon. Ce dernier s'emploie à dupliquer le projet Primege puisque l'Université de Rouen met aussi en place le POC. Avec un challenge supplémentaire : les structures de soin pluridisciplaires sont intégrées, ajoutant de nouveaux flux de données. L'objectif à terme est que chaque région dispose de son observatoire pour l'ensemble des professionnels de santé de la médecine de ville.