De la crise sanitaire à identitaire : les entreprises se remettent en question

Cette année, le confinement a bousculé toutes les habitudes de travail dans les bureaux en imposant un 100% télétravail auquel. Revenir en arrière semble exclu.

Les dernières études à ce sujet montrent que les salariés aimeraient télétravailler en moyenne deux jours par semaine. Ils ne sont d’ailleurs pas tous prompts à revenir au bureau. Les entreprises doivent donc s’interroger : qu’est-ce qui motive les collaborateurs à venir ? Qu’est-ce qui fait leur singularité, leur intérêt, leur attrait ? Au fond, quelle est réellement leur identité, ce qui fait que leurs salariés revendiquent d’y travailler et ont plaisir à s’y retrouver ? Quelle UX (expérience utilisateur) proposent-elles à leurs salariés au quotidien ?

Ce que révèle l’appétence des collaborateurs pour le télétravail

Si le télétravail permet de mieux réaliser des tâches à forte concentration comme la rédaction de documents, il reste souhaitable que les collaborateurs se rencontrent physiquement dans les bureaux pour toutes les synergies de groupe : émulation/motivation, points d’équipe, travail de groupe, etc. La crainte d’une réactivation épidémique n’est de toute évidence pas le seul frein au retour au bureau. Aussi est-il essentiel pour les entreprises de diagnostiquer le plus finement possible à quoi les collaborateurs disent « non » en souhaitant plus de télétravail.

Il peut s’agir d’inconvénients indépendants de l’entreprise (transports, fatigue, amplitude horaire, etc.) mais aussi parfois de stress, management toxique, inconfort (bruit, température, etc.), difficultés à se concentrer, piètre équilibre vie pro-vie perso… Il faut que les entreprises balayent devant leur porte et se demandent quelle « UX » (ou en l’occurrence, "EX" pour employee experience) elles offrent à leurs collaborateurs. Tout point négatif sur lequel elles peuvent agir mérite qu’elles cherchent et apportent des solutions qui ne soient pas uniquement le télétravail.

Placer l’humain au centre du monde du travail

Les salariés ne doivent pas juste se sentir les bienvenus dans l’entreprise – même si c’est déjà un très bon début ! –, mais au centre des préoccupations et stratégies de celle-ci. La protection de la santé physique et mentale des collaborateurs a été remise au premier plan en période de confinement, puisqu’elle est devenue le principal ingrédient de la continuité d’activité des sociétés. Il est fondamental que le retour à la normale ne voit pas cette préoccupation accrue pour le bien-être des travailleurs disparaître ou s’amoindrir.

Il faut aussi s’appuyer sur les connaissances en neurosciences pour revoir la façon dont nous travaillons tous : une entreprise plus humaine n’est pas seulement bienveillante, conviviale et respectueuse, c’est aussi une organisation qui permet à chacun de travailler selon le rythme qui lui convient le mieux (celui où il est le plus performant, ou le plus motivé, voire le plus créatif). La technologie est désormais en mesure d’accompagner et d’"augmenter" chaque individu pour lui permettre de dédier son temps à ce qui compte le plus, le libérer de tâches moins utiles ou urgentes, et (même si cela peut sembler paradoxal) l’aider à se déconnecter des nombreux facteurs de distraction qui nuisent à sa créativité et sa productivité.

Plancher sur l’identité profonde (et réaliste) de son organisation

Chaque société doit se demander en quoi elle est unique, singulière, et intéressante pour ses collaborateurs et ses partenaires. Depuis plusieurs années déjà, les entreprises mettent des mots sur les valeurs qui les caractérisent. Les études récentes sur le recrutement et l’impact de la marque employeur démontrent que les valeurs d’une entreprise sont essentielles pour attirer les talents – et en particulier ceux qui sont compatibles avec ces dernières, faisant gagner du temps aux employés comme aux recruteurs.

Une nouvelle tendance émerge : celle de la raison d’être des entreprises (qui s’approcherait officieusement de cette fameuse "raison de venir"). Celles-ci ne décrivent plus seulement qui elles sont dans les grandes lignes, ou qui elles souhaitent être, mais également le sens qu’elles donnent à leur activité, et donc au travail que vont fournir tous leurs collaborateurs. Cette réflexion est la bienvenue, avec une quête de sens toujours plus présente parmi la population active (déjà avant la crise sanitaire, qui n’a fait qu’accentuer le phénomène). En mai 2019, la loi PACTE a d’ailleurs donné une existence légale à la raison d’être, faisant inscrire ce concept dans l’article 1865 du code civil.

Les entreprises peuvent également communiquer sur leur culture, ce qui n’est pas un exercice facile : on ressent souvent davantage une culture qu’on la verbalise ou décrit, et elle est le fruit de tellement de facteurs qu’il est difficile de lui donner une nouvelle orientation lorsqu’on le souhaite. Le temps où les employés se rendaient au travail n’est pas fini, il n’a juste plus rien d’évident ou d’obligatoire. Ce n’est pas à un désamour de l’entreprise que l’on assiste, mais à une réaffirmation de la quête de sens et de bien-être chez tous les collaborateurs. Les entreprises détiennent les clés de ce qui fera (re)venir leurs salariés, à elles de ne pas les égarer !