Face au télétravail généralisé, quels remèdes ?

Depuis le reconfinement, les employeurs sont obligés de recourir au maximum au télétravail avec toutes les conséquences de dégradations psychologiques que cela comporte pour leurs salariés.

Anticiper les maux

L’ordonnance du conseil d’État dit que le protocole sanitaire est une déclinaison matérielle de l’obligation de sécurité de l’employeur, cela devient donc du droit dur. Un employeur qui ne respecte pas ce protocole pourra être considéré comme n’allant pas au bout de son obligation. C’est une alternative perdant/perdant : être rebelle ou se plier à l’autorité gouvernementale pour éviter les sanctions et par là même occasion, exposer ses salariés au risque de dégradation de leur santé psychique. Ici, deux facteurs délétères se renforcent : le confinement dont la nocivité n’est plus à démontrer avec 44 % d’atteinte de la santé psychologique des personnes et le télétravail généralisé producteur d’un accroissement du risque psychosocial et des addictions.

Tout changement de fonctionnement générant des dysfonctionnements, il convient, non pas de les ignorer, mais d’en repérer les risques, afin d’y apporter les mesures correctrices. C’est ce qui se fait dans le domaine médical, où un médicament ayant reçu son autorisation de mise sur le marché est obligatoirement accompagné de ses contre-indications et d’une information sur les effets secondaires. L’organisation du travail n’échappe pas à cette règle.

Ces modalités spécifiques de télétravail généralisé constituent un piège qui se referme sur les salariés par manque de choix et de préparation tant organisationnelle et matérielle, que psychologique. Si un télétravail respectueux de bonnes conditions de sa mise en place peut aboutir à un équilibre satisfaisant entre ses inconvénients et ses avantages, ce n’est pas le cas du télétravail généralisé, où les difficultés l’emportent sur les bénéfices. Que peut faire l’employeur pour limiter les risques ainsi encourus en suivant l’injonction gouvernementale ?

Les remèdes à mettre rapidement en place

Pour surmonter l’épreuve de ces conditions dégradées de télétravail, les salariés vont devoir faire appel à leurs capacités de résilience. Or, cette dynamique psychologique n’est pas innée, elle est le fruit d’un apprentissage. Pour véritablement aider les salariés engagés de force dans cette situation difficile, il est impératif de les soutenir. Cette aide peut prendre trois formes à développer de manière conjointe pour en potentialiser les effets positifs.

Par rapport aux avantages perçus (réduction des contraintes, augmentation de l’autonomie…) du télétravail, il convient de les renforcer et les valoriser. Il est essentiel d’augmenter la vision positive et la reconnaissance de manière à accroître la représentation de leurs propres ressources par les salariés, contribuant ainsi à installer un meilleur équilibre de leur dynamique psychologique.

Par rapport aux inconvénients liés aux conditions de télétravail, une défaillance dans ce domaine devient rapidement un frein à l’implication, surtout si la distance alimente une source d’anxiété chez le salarié, comme une crainte d’abandon. Celle-ci peut se déclencher à partir d’un problème de matériel ou de connexion non pris en compte par l’employeur.

Par rapport aux difficultés psychologiques les plus souvent repérées en situation de télétravail, la mise en échec du cercle vertueux de la confiance conduit rapidement à la défiance, la discorde et la démotivation. Leur prévention à travers quelques actions managériales, visera à en limiter le risque :

  • Instaurer un rapport de confiance dans cette nouvelle situation et s’interdire de céder à la crispation d’un contrôle soupçonneux ;
  • S’astreindre à délivrer des consignes claires, et s’assurer de leur compréhension ;
  • Accompagner le salarié dans l’installation progressive de son organisation de travail et le développement de ses compétences pour affermir son sentiment d’efficacité professionnelle ;
  • Aider le collaborateur à maîtriser la frontière vie personnelle/vie professionnelle, afin de réguler les possibles tensions et conflits ;
  • Organiser des temps de soutien social et des échanges conviviaux avec d’autres collègues pour lutter contre l’isolement et développer l’intelligence collective ;
  • Offrir une aide à la gestion émotionnelle du collaborateur quand cela s’avère nécessaire, notamment au sujet de ses sources de stress.

Cet ensemble de mesures permettent de concilier la performance attendue du collaborateur à distance avec l’obtention conjointe d’une bonne qualité de vie au travail. Ce niveau de compétences managériales sollicité au regard de ces circonstances réclame un soutien substantiel des managers, tel que la formation, l’accompagnement ou l’analyse des pratiques. Dans les cas les plus défavorables, lorsque le manager s’estime dépassé, il est nécessaire de recourir à un tiers : les ressources humaines, un psychologue ou encore la médecine du travail.