La distanciation sociale ne doit pas instaurer une distance dans l'entreprise

La crise que nous vivons est un épisode traumatisant qui bouleverse déjà durablement notre société, mais aussi les entreprises, leurs pratiques, leurs collaborateurs et leurs dirigeants.

Au moment de commencer le long processus qui va nous amener à retrouver les modes de travail d'avant, il est important d'identifier ce que nous pouvons apprendre de cette épreuve d'un point de vue managérial.

Enseignement 1  :  le collaborateur n’est pas qu’une force de travail

Côté managers, une évidence émerge : il est désormais impossible de ne voir dans un collaborateur qu’un individu producteur d’une tâche contre rémunération. Pendant cette période, et notamment pendant les premières phases de la crise, la plupart des managers et des dirigeants ont montré une empathie plus forte que jamais pour leurs équipes. Il sera difficile de maintenir un niveau de compassion aussi élevé ; pour autant, revenir à la situation initiale semble impossible. Chacun a pris conscience au travers de cette crise qu’il est essentiel de prendre l’individu dans sa globalité et de développer une certaine proximité qui ne fait pas l’impasse sur les spécificités personnelles de chacun (famille, santé physique ou mentale, conditions de vie…). Quid de la meilleure prise en compte des "premiers de corvée" ?

Enseignement 2  :  la confiance comme pierre angulaire du management

Nous avons été, et nous sommes encore, nombreux à travailler à distance, dans des conditions plus ou moins favorables. Lorsque les équipes sont physiquement éloignées de leurs managers, la confiance n’est pas un "plus" : elle émerge comme une nécessité, expérimentée par les managers et les collaborateurs. De cette confiance naît un besoin de priorisation et d’autonomie dans la réalisation des missions. Si elle n’est pas toujours simple à établir ni à maintenir dans la durée, elle est pourtant source d’efficacité économique et d’une véritable agilité managériale et organisationnelle. La confiance est également primordiale pour faire face aux dégâts psychologiques causés par cette situation – et à ceux qui viendront quand la crise économique frappera de plein fouet.

Enseignement 3  :  pas de retour en arrière possible sur le télétravail

Certains managers, réticents au télétravail, l’ont expérimenté. Ils ont pu en apprécier l’efficacité. Côté collaborateurs, c’est le même constat qui s’impose. L’ensemble de l’entreprise doit donc apprendre à gérer le télétravail comme un mode organisationnel complémentaire. C’est la fin du dogme "pour ou contre le télétravail" qui signe un véritable équilibre pensé et organisé. Nous souhaitons cependant insister sur deux fractures sous-jacentes face à cette tendance irréversible :

  • Une attention particulière en matière de formation doit être portée aux collaborateurs qui ne maîtrisent pas suffisamment les outils technologiques.
  • De nombreux métiers ne sont pas concernés par le télétravail et doivent donc être pris en compte lors de la définition par l’entreprise des modalités organisationnelles.

Enseignement 4  : agilité et process à revisiter

De nombreux process n’ont pas pu être appliqués pendant ces deux mois de confinement sans nécessairement altérer la marche de l’organisation. Cette expérience doit ainsi nous aider à les remettre en cause, à nous demander s’ils sont tous réellement utiles, ou s’ils peuvent être revus ou réadaptés dans une optique plus agile.

Enseignement 5  :  efficacité des réunions

Les réunions à distance via les outils de conférence call nous semblent plus efficaces, plus courtes, et surtout plus orientées vers la prise de décision. On observe moins de retards, pas ou peu d’interruptions, une meilleure concentration. La prise de parole individualisée et la capacité d’écoute sont également plus élevées. Il faudra se souvenir des démarches mises en œuvre pendant le confinement pour les faire durer une fois revenus au bureau. Elles sont aussi sources d’économies de déplacements : devra-t-on encore se déplacer deux heures en région parisienne par les transports en commun pour une réunion d’une heure, ou envoyer deux personnes à Londres ou Milan pour une réunion d’une demi-journée qui pourrait être traitée numériquement ?

Les parties prenantes des organisations ont joué un rôle essentiel dans la gestion de cette crise sanitaire. Elles vont devoir continuer à jouer un rôle clé dans les défis qui nous attendent. D’abord, recréer du lien et déconstruire la peur. Ensuite, à plus long terme, se réinventer et évoluer vers une écoute active et renouvelée de l’ensemble des parties prenantes des organisations, et tout particulièrement des collaborateurs.