Grande démission : les DRH lui disent merci !
Les entreprises françaises mettent enfin les gaz sur leur marque employeur. Une opportunité pour les DRH de faire enfin bouger les lignes.
Vous aussi, vous travaillez dans une entreprise “bienveillante” qui oeuvre pour un monde meilleur ? Oui, bien sûr, et moi je suis le cousin de la Reine d’Angleterre (RIP) ! Pour limiter les dégâts sur leurs effectifs, les entreprises françaises mettent enfin les gaz sur leur marque employeur. Une opportunité pour les DRH de faire enfin bouger les lignes. Mais gare aux promesses non tenues.
Un demi-million de Français en CDI ont démissionné rien que sur les trois premiers mois de 2022 ! Un chiffre qui s’ajoute au million de postes non pourvus dans l’hexagone. Mais attention aux erreurs d’interprétation : non, la crise Covid et le recul qu’elle a entraîné par rapport au monde du travail ne sont pas à l’origine d’une hémorragie sur le marché de l’emploi. Les démissionnaires ne sont en fait que les nouveaux “talents” - flatterie désormais consacrée pour désigner les collaborateurs - de l’entreprise d’en face. Bref, une “grande rotation” plus qu’une “grande démission”.
Alors oui, pour les DRH, la rétention du personnel est devenue une véritable tannée. Car une fois recrutés à grand renfort de campagnes qui font pâlir d’envie les pro du marketing, les nouveaux collaborateurs expriment des attentes désormais non-négociables. Pour faire simple, ils veulent être sûrs de savoir pour qui ils travaillent, comprendre comment ils vont pouvoir s’épanouir dans leur job et préserver leur vie privée. Plutôt sain, non ?
Sauf que jusqu’à un passé récent, bon nombre d’entreprises ont allègrement confondu marque employeur et attrape-nigaud. Vous aussi, vous travaillez dans une entreprise bienveillante qui oeuvre pour un monde meilleur ? Oui, bien sûr… et moi je suis le cousin de la Reine d’Angleterre (RIP) ! Pas étonnant qu’une fois recrutés, beaucoup déchantent et choisissent d’aller voir ailleurs. Ou pire, qu’ils rejoignent le club de moins en moins fermé du quiet quitting, cette “tendance du moindre effort” popularisée par TikTok et qui s'apparente de fait à une démission silencieuse.
Social washing : effet boomerang garanti
Nécessité faisant loi, il semble qu’aujourd’hui le flou artistique trop longtemps entretenu sur l’ADN de l’entreprise et ses pratiques RH tend à disparaître au profit d’une démarche plus sincère et plus exigeante. Exit donc le social washing, à l’effet boomerang garanti.
Toutes les entreprises - et pas seulement les grands groupes - comprennent désormais l'intérêt d’être parfaitement claires et transparentes sur leur identité RH : culture de management, modèle de rémunération, QVT, place des femmes, diversité et inclusion… Autant de thèmes sur lesquels elles doivent d’abord s’évaluer et se positionner avant de communiquer.
Pour le dire autrement, la marque employeur “nouvelle formule” n’est plus un simple exercice de communication. Réjouissez-vous, cher.e.s DHR, car vous avez là une formidable opportunité de reprendre la main pour faire bouger les lignes sur les sujets que vos dirigeants avaient pris l’habitude de mettre sous le tapis.
Et ce n’est pas un détail : dans son étude de juillet 2022, l’éditeur de solutions RH ADP révèle par exemple qu’un retour au tout présentiel serait un motif de démission légitime pour plus de la moitié des jeunes actifs. Alors autant avoir un discours clair sur le télétravail et, plus largement, sur la flexibilité. Idem sur les salaires qui restent en ces temps d’inflation la préoccupation principale.
Vers une démarche d’amélioration continue
Mais alors comment faire ? Commencez, bien sûr, par écouter vos collaborateurs. Questionnez-les sur leurs propres ressentis puis comparez-les à la vision du top management. C’est le grand écart ? Foncez voir votre DG et provoquez un électrochoc pour le faire revenir à la réalité et repartir avec un consensus sur les chantiers à mener.
Il m’est évidemment impossible de citer ici les entreprises que j’ai en tête en écrivant ces lignes… Mais preuve qu’il y a du pain sur la planche : l’Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH) vient de publier une enquête menée auprès de quelque 500 DRH de tous secteurs. Elle confirme en particulier le malaise présent dans de nombreuses entreprises sur le partage de la valeur, faute de dialogue.
A l’inverse, identifiez les points forts soulignés par vos équipes et sur lesquels vous allez pouvoir communiquer. En associant vos salariés à l’activation de votre marque employeur, vous renforcerez le sentiment d’appartenance au sein de votre entreprise. Ils deviendront alors vos meilleurs ambassadeurs pour témoigner sur ce qui fait déjà de votre entreprise une “cool place to work”.
Enfin, et je dirais même surtout, fixez avec la direction des objectifs mesurables pour inscrire votre marque employeur dans une démarche d’amélioration continue. Les plans d’actions qui en découleront, partagés avec tous, seront autant d’occasions d’entretenir un bon climat social et, par ricochet, de fidéliser les équipes.
Alors oui, la crise Covid a rebattu les cartes du marché du travail. Mais cette mutation apparaît finalement comme assez vertueuse, en ce sens qu’elle remet le capital humain au cœur des préoccupations managériales… et les DRH à leur juste place.