Croissance économique et développement durable : deux notions intimement liées

Depuis le Sommet de la Terre à Stockholm en 1972, les dirigeants de la planète ont conscience que le développement durable représente un atout majeur du fonctionnement de notre société.

Parce qu’il permet d’envisager un modèle de société démocratique viable à long terme, où croissance économique et développement humain seraient réconciliés, les pouvoirs publics doivent nécessairement le prendre en compte dans la conduite de leurs politiques publiques.
Qu'elle soit d'idéologie capitaliste ou collectiviste, libérale ou socialiste, l'économie à l'échelle d'un État est toujours guidée par une main, plus ou moins visible, qui lui enjoint de faire, de ne pas faire ou de laisser faire. Si les gouvernements ont toujours adopté et appliqué, à un instant t, une théorie économique bien précise parmi tant d'autres, toutes les politiques économiques s'appuient sur une même et nécessaire constante : la production de richesses organisée.
Et là encore, chaque État est souverain dans le type de richesses qu'il souhaite voir se développer ou exporter. Un pays tourné vers l'industrie automobile, par exemple, allouera un certain nombre d'aides – financières, juridiques – à ses acteurs afin qu'ils deviennent les plus compétitifs possible et, par-là même, qu'il y ait des répercutions positives sur la balance commerciale, donc sur l'économie. Cependant, tout en tirant nécessairement profit des forces de production et ressources de leur pays, les dirigeants doivent veiller à orienter leurs politiques vers les secteurs clés d'une économie aujourd'hui mondialisée. Autrefois dépendante de l'agriculture puis du commerce, la croissance économique semble de nos jours tournée vers un pan de l'industrie encore trop marginalisé : le développement durable – ou l'industrie verte.

Le développement durable au service de l'économie

Les États n'ont d'ailleurs plus beaucoup le monopole de leur souveraineté en matière d'orientation économique. Ils répondent en effet plus à des besoins globalisés qu'à leurs propres demandes – phénomène issu des théories mercantilistes de l'Ancien Régime, poussé à son paroxysme aujourd'hui. Par conséquent, affirmer que la croissance économique est directement dépendante du développement durable signifie que l'industrie verte, son vecteur principal, est perçue comme l’un des secteurs porteurs de l’économie mondiale, en déclin depuis quelques années. Et comme tout secteur porteur, celui-ci nécessite des investissements importants, aussi bien financiers qu'intellectuels.
Il n'est pas besoin de rappeler la nécessité d'inclure le droit à un environnement sain, issu des premières grandes conférences onusiennes, dans le développement économique mondial.
Pourtant, année après année, la pile des rapports alarmistes en la matière ne cesse de grandir, aucun sujet n'étant alors épargné : réchauffement climatique, élévation du niveau de la mer, pollution de l'air, disparités géographiques flagrantes dans le traitement de ces problèmes... et inefficacité des nombreuses politiques publiques mises en œuvre pour les endiguer.
Cependant, vu l'imminence de la menace écologique, réaffirmer la nécessité d'accroître l'efficacité de telles politiques publiques est primordial. Mais la question n'est plus tellement de savoir « quelle Terre laisserons-nous à nos enfants ? », mais plutôt « quels enfants laisserons-nous à cette Terre ? ».
Car le développement durable est « l'affaire de demain », un secteur tourné vers le futur pour le futur. De la même manière que l'économie numérique doit se développer pour être pourvoyeuse d'emplois dans les prochaines années, l'éco-développement doit représenter l'un des secteurs économiques majeurs du XXIe siècle. Il en va non seulement de notre bien-être et de celui de la planète, mais également de celui de la croissance économique.
Sensibiliser la jeune génération est donc tout aussi important qu'investir massivement – et intelligemment – dans le développement durable. Les pouvoirs publics ont commencé à en prendre conscience dans les années 1970, mais semblent réticents à octroyer des crédits à ce pan de l'industrie. Il est vrai que les crises économiques successives – chocs pétroliers de 1973 et 1979, crise des subprimes de 2008 – ont entraîné les gouvernements à prendre des mesures plus conjoncturelles – afin de sauver leur économie –, que structurelles, celles-ci nécessitant de lourds investissements pour une rentabilité incertaine.
Mais la multiplication des études soulignant la nécessité d'agir pour une économie soucieuse de l’écologie et les potentialités offertes par l'industrie verte en vue de la croissance économique, doivent inciter plus que jamais les politiques à investir – capitaux financiers, intellectuels – dans le développement durable, aujourd'hui perçu comme « un levier de sortie de crise très efficace » (Ségolène Royal, ministre de l'Écologie).
Et parce que « ressources naturelles » ne rime pas avec « ressources éternelles », les pouvoirs publics doivent plus que jamais miser sur la recherche et le développement de l’industrie verte, qui représenterait ainsi dans un futur proche un vecteur d’employabilité important et, par-là même, participerait à l’inversion de la courbe du chômage pour atténuer voire guérir in fine la crise des déficits publics.

Les pouvoirs publics au service du développement durable

Cependant, développement durable n’est pas uniquement synonyme de création de biens et de services tournés vers l’écodéveloppement – comme le photovoltaïque ou les énergies renouvelables. Plus largement, la prise en compte de l’écologie dans les politiques économiques d’un Etat se traduit également par la mise en place d’un cadre – juridique, législatif – propre à atténuer les externalités négatives – essentiellement la pollution – produites par l’industrie en général. Mais pour ce faire, la main qui dirige, oriente l’économie d’un État, doit favoriser le développement de cette industrie éco-responsable.
La production de richesses, pierre angulaire de l’économie étatique, à travers la fabrication et la distribution de biens et de services, doit ainsi avoir le souci d’une protection de l’environnement équitable et durable. Et les pouvoirs publics de faire preuve de courage politique, en engageant aujourd’hui des ressources qui bénéficieront aux populations de demain.
Sans s’adonner à une « écologie punitive », économiquement inefficace et politiquement sanctionnable, les gouvernants possèdent les armes nécessaires pour mettre à contribution les entreprises dans leur quête du respect de l’environnement dans la production de richesses. Entre autres mécanismes juridiques, celui dit du « pollueur-payeur », adopté par l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) en 1972 et présent dans l’Acte unique européen de 1986, est, à l’échelle mondiale, le plus utilisé. Mais alors que Ségolène Royal, ministre de l’Écologie, évoquait dès son entrée au gouvernement la suppression de l’écotaxe, pourtant destinée à faire appliquer le mécanisme du « pollueur-payeur », le devenir de cette arme écologique est directement remis en question. D’autant que la mesure alternative proposée – taxer les camions étrangers qui traversent le pays – vient d’être retoquée par Bruxelles.
Il est cependant primordial de « remettre à plat » l’écotaxe, selon les mots de la ministre, les recettes devant participer au développement de l’industrie verte en France. Encadrer l’activité industrielle afin d’en limiter les externalités négatives est donc tout aussi important que produire biens et services liés à l’écodéveloppement. Ce sont les deux maillons d’une chaine vertueuse qui doit mener, in fine, à une efficacité économique optimale dans le cadre du développement durable. Mais le jeu de la politique étant ce qu’il est, les pouvoirs publics tardent à engager des réformes de fond en la matière, alors qu’il conviendrait d’appuyer massivement la recherche et le développement, ainsi que la sensibilisation accrue aux bienfaits économiques de ce secteur. Et ce pour des enjeux bien plus précieux que la santé d’une économie : le bien-être de l’Homme.