Les technologies pour inverser la courbe du chômage

Un des principaux défis pour l’économie française actuelle est de réduire autant que possible les frictions sur le marché du travail pour permettre aux demandeurs d’emploi et aux entreprises de gagner en efficacité

Internet et les réseaux sociaux professionnels répondent à cette nécessité en renforçant les possibilités d’échange, de partage de l’information, de valorisation des compétences et de contrôle de l’image. Ainsi, les coûts et le poids administratif associés à un recrutement sont réduits. De même, du côté du demandeur d’emploi, le coût du processus baisse également.On peut ajouter à cela le fait que les chances de recruter un travailleur au profil correspondant aux besoins de l’entreprise sont accrues car les réseaux sociaux professionnels permettent au plus large éventail de personnes compétentes possible de se porter candidates.Au moment de la publication de l’offre d’emploi, l’entreprise fait un arbitrage entre l’importance de l’audience touchée et l’adéquation des profils des candidats avec le poste à pourvoir. En effet, si l’offre est uniquement diffusée sur le site de l’organisation qui recrute, l’audience touchée sera très faible, mais l’adéquation des profils avec le poste à pourvoir sera lui, extrêmement élevé. Au contraire, Si l’offre est uniquement diffusée sur une plateforme de recrutement généraliste, l’audience touchée sera très importante, mais l’adéquation des profils avec l’offre sera elle singulièrement faible. Le compromis optimal réside dans une plateforme généraliste, c’est-à-dire avec une très forte audience, capable de traiter les offres en spécialiste, et donner à l’organisation qui recrute les moyens de faire valoir son identité.L’inconvénient est que, facilitant l’afflux de réponses à une offre d’emploi, le recrutement sur internet a eu pour effet indésirable de fondre les « bonnes » candidatures dans une masse de plus en plus importante de réponses. Il convient donc de mettre en oeuvre une stratégie de «prescreening » afin de filtrer une partie des candidats qui ne remplissent pas un certain nombre de prérequis imposés par l’employeur potentiel.Cette étape de la sélection des candidats est intimement liée à deux notions :la transparence et le bruit. On peut définir l’un comme étant le degré d’accessibilité de l’information brute sur l’offre d’emploi ou les candidats, et l’autre comme le niveau moyen d’informations non pertinentes reçues par l’entreprise ou les candidats. Le fait est que les réseaux sociaux actuels ne peuvent agir positivement sur l’un sans impacter négativement l’autre. Les réseaux sociaux actuels n’offrent que peu de solutions à cette problématique. Ils permettent certes d’accéder à de nombreux profils de candidats déclarés ou potentiels, mais l’utilisation d’une solution informatique adhoc en posttraitement s’avère essentielle afin de faire le tri.

Des systèmes de qualification des candidatures ont également été intégrés sur certaines plateformes. Le principe revient à calculer un taux d’adéquation entre l’offre et la candidature. Or il apparait que l’efficacité de ces solutions reste aléatoire. L’autre possibilité a été d’appliquer une « validation sociale » de la diffusion de l’offre d’emploi, similaire à la cooptation. Si cette méthode réduit effectivement le « bruit », elle réduit fortement la diffusion des offres et donc la capacité à toucher un nombre de candidats plus élevé. Le recruteur est très souvent confronté à un volume important de données à traiter lors de la sélection des candidats.

Dans l’erecrutement, la tendance est de travailler sur l’amélioration de la qualification du CV. Le CV est l’outil de communication inévitable du candidat et le domaine des ressources humaines s’interroge sur les moyens de dépasser cette « vitrinisation » des candidats. Cette étape pourrait être franchie par une « décritérisation » du candidat, déplacer l’attention du recruteur sur la dimension humaine et le relationnel. Les solutions actuelles d’e-recrutement restent focalisées sur le CV au sens basique du terme alors qu’il pourrait être enrichi d’informations supplémentaires (comme les références et relations professionnelles, compétences comportementales, etc.) afin de lui donner une dimension plus « sociale ».

De la même manière, enrichir le contenu de l’offre d’emploi (avec par exemple des informations sur les métiers, les filières, la politique RH ou le bilan social de l’entreprise) offrirait un moyen supplémentaire de « filtrer » en amont les candidats en permettant à ces derniers de s’informer sur l’employeur et de déterminer si son profil correspond avec ses attentes.

Ainsi, créer du lien entre recruteur et candidat est l’une des clés de l’efficacité des futurs outils de recrutement. Pour cela il faut sortir de l’acte unique de candidature, et, avec l’accord du candidat, maintenir un lien informationnel avec lui. Parmi les outils de quatrième génération (comme la création d’espace personnel et l’analyse sémantique) ou de cinquième génération (« prescreening », « push ») disponibles dans les entreprises, aucun ne semble permettre de fournir des informations extensives sur le candidat et le recruteur tout en gérant sur la longueur les interactions entre ces deux acteurs. Souvent extraites d’internet, ces informations doivent par ailleurs être soumises à vérification. La phase d’attraction des candidats vers une entreprise et un poste particulier est une étape cruciale de l’e-recrutement, puisqu’elle va déterminer la nature des candidats qui vont se positionner sur l’offre mise en ligne. L’attractivité de l’offre, et donc la capacité d’une entreprise à attirer des candidats à fort potentiel, dépend étroitement de sa propension à séduire ces derniers en leur présentant la structure de manière séduisante, mais aussi à proposer des offres homogènes et cohérentes avec l’image de l’entreprise.

Dans ce contexte, l’équipe de Ressources Humaines mettant en place un recrutement électronique ou digital doit être en mesure de présenter aux candidats potentiels un processus de recrutement bien construit, structuré et jalonné d’étapes claires et projetées dans le temps. De la même façon, la réalisation effective de l’e-recrutement doit se faire de la manière la plus souple et la plus ouverte possible, afin que l’ensemble des candidats ciblés par le recruteur ait la possibilité de s’inscrire dans le processus, sans en exclure de fait un certain nombre.

Philippe Bertrand, Président de Splenday et Pascal de Lima économiste pour Splenday