Notifications : faut-il repenser l'économie de l'attention avant qu'il ne soit trop tard ?

Les notifications trop nombreuses lassent les utilisateurs et fragilisent l'économie de l'attention. Pour rester compétitifs, médias et marques doivent repenser leur stratégie relationnelle.

Alors que les modèles économiques des médias numériques reposent toujours plus sur la rétention et l’engagement, le rejet croissant des notifications par les utilisateurs menace un équilibre déjà fragile. Dans un univers saturé d’offres et de sollicitations, maîtriser ces interactions devient un levier clé de compétitivité et de pérennité.

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Un signal faible d’un désengagement plus profond

Selon le rapport Digital News Report du Reuters Institute for the Study of Journalism, 43 % des utilisateurs qui ne suivent pas l’actualité via les notifications déclarent les avoir désactivées. En cause ? Leur volume excessif ou leur manque de pertinence.

Ce rejet ne vise plus uniquement la quantité. C’est la perception même des notifications qui a changé. Jugées trop souvent intrusives, elles altèrent l’expérience et affaiblissent le lien de confiance avec la marque. Lorsque les alertes se comptent par dizaines chaque jour, elles ne sont plus de simples nuisances : elles deviennent des facteurs de rupture dans la relation audience-média.

Le coût caché des mauvaises expériences numériques

Ce phénomène de « fatigue numérique » dépasse largement la sphère médiatique. Dans l’ensemble de l’économie numérique, les utilisateurs sont devenus nettement moins tolérants face aux sollicitations non désirées qui entachent l’expérience.

Une récente étude montre que 72 % des Français se disent prêts à abandonner une marque après une mauvaise expérience numérique. Parmi les irritants les plus fréquents figurent les bugs, les lenteurs… et les notifications mal calibrées. Loin de simples détails techniques, ces facteurs affectent la qualité perçue du service et l’image de marque.

Dans un univers saturé, où les alternatives pour s’informer se multiplient (réseaux sociaux, newsletters, IA conversationnelles, etc.), la moindre erreur peut entraîner un décrochage rapide et souvent irréversible. La fidélité numérique est devenue fragile ; l’exigence des utilisateurs, elle, ne cesse de croître.

Le risque d’une spirale de désengagement

En France, l’usage des sites et applications d’information a reculé de 10 points depuis 2018, et seuls 22 % des moins de 35 ans les consultent chaque semaine. Chez les plus jeunes, 15 % des moins de 25 ans utilisent désormais des chatbots IA comme ChatGPT pour s’informer, tandis que 44 % des 18‑24 ans font des réseaux sociaux leur principale source d’actualité. Cette évolution rapide oblige les médias à repenser en profondeur leur capacité à capter et maintenir l’attention de leurs audiences.

Un levier clé pour restaurer la valeur

Dans ce contexte, la maîtrise des notifications n’est plus un simple enjeu d’ergonomie ou de marketing : elle est devenue un levier stratégique permettant de renforcer la compétitivité face aux nouveaux acteurs numériques, d’optimiser l’engagement et la fidélisation des audiences, et de préserver la rentabilité des modèles économiques fondés sur l’attention.

Un flux mal géré dégrade l’expérience, accélère le désengagement et détruit de la valeur. À l’inverse, une approche plus responsable, fondée sur la pertinence, le bon rythme et le respect des attentes des utilisateurs, peut restaurer la qualité de la relation et soutenir durablement la performance des médias.

Dans une économie de l’attention sous tension, la capacité à offrir des expériences numériques fluides, utiles, respectueuses et réellement différenciantes constitue aujourd’hui l’une des clés essentielles de pérennité, pour les médias comme pour l’ensemble des acteurs de l’économie numérique.