Viadeo : ces chiffres qui peuvent inquiéter les investisseurs

Viadeo : ces chiffres qui peuvent inquiéter les investisseurs Le document d'introduction en bourse du réseau professionnel français est une mine d'informations... pas toujours rassurantes.

Etape cruciale dans la vie du réseau social professionnel, Viadeo, vient d'annoncer qu'il allait s'introduire en bourse d'ici début 2015 visant une valorisation de 180 millions d'euros. Comme toutes les sociétés qui enclenchent le processus, le groupe a dû publier un document d'introduction auprès de l'AMF. Et donc révéler des informations qui jusque-là avaient toujours été tenues secrètes par ses dirigeants. A juste titre, car toutes ne sont pas rassurantes...

1/ 95% du chiffre d'affaires est réalisé en France

Disponible dans 8 langues et s'appuyant sur 450 collaborateurs répartis entre Paris, Pékin, Moscou, Casablanca et San Francisco, Viadeo est une société qui se veut globale. Elle a axé une part importante de son développement sur l'international, en particulier en Chine et en Russie. C'est cette ambition qui avait d'ailleurs présidé à la levée de fonds de 24 millions d'euros réalisée en 2012 auprès de la BPI et de ses actionnaires historiques. Aujourd'hui, elle revendique 59 millions de membres dans le monde. Problème, sur les 30,9 millions d'euros de chiffre d'affaires réalisés par la société en 2013, 95% provenaient... de l'Hexagone. La Chine comme la Russie ou l'international en général représentent une ligne de revenus minuscule à ce stade. Et le groupe concède n'avoir "toujours pas engagé d'action de monétisation concernant les 27 millions de membres répartis dans le reste du monde". 

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La répartition du CA de Viadeo par pays.  © Viadeo

2/ 20 millions de membres en Chine mais 0 abonnement vendu

Si le réseau social revendique plus de 20 millions de membres en Chine, où il est le leader de son secteur, il y a fait le choix de laisser l'ensemble des fonctionnalités gratuites (alors que beaucoup sont payantes en France) pour privilégier sa croissance. C'est d'autant plus gênant que les abonnements payants constituent son premier levier de monétisation, pesant pour 51% de son chiffre d'affaires en 2013. Portée par quelques activités de communication et de RH, sa plateforme Tianji, ne représente donc que 3 % de ses revenus en 2013.

Aujourd'hui le groupe indique qu'il n'envisage pas de basculer vers un modèle payant avant d'atteindre une "taille critique". Viadeo estime à près de 300 millions son potentiel de marché sur les 788 millions d'actifs que compte la Chine. Reste que ce changement majeur de l'expérience utilisateur (avec nombre des fonctionnalités qui passeront en payant) ne sera certainement pas sans conséquence sur la fréquentation du site. Surtout, la menace LinkedIn commence à devenir sérieuse. L'Américain compte aujourd'hui près de 5 millions d'utilisateurs en Chine... à peine trois mois après son arrivée sur le marché.

3/ Le chiffre d'affaires a reculé de 4% au premier trimestre 2014

Dans un secteur où le moindre ralentissement de sa croissance donne des sueurs froides aux investisseurs, Viadeo a réalisé au premier trimestre 2014 un chiffre d'affaires de 6,75 millions d'euros, en recul de 4,1% par rapport à l'année précédente. Une décroissance inquiétante qui affecte aussi bien les abonnements en ligne que les revenus générés par l'activité publicitaire, tous deux en retraits de 6%. Seule l'activité recrutement et formation reste stable. Le groupe attribue cette contre-performance à "l'impact du changement de plateforme en 2013 et [à] la croissance de l'usage mobile encore très peu monétisé". Aujourd'hui, 40% du trafic de Viadeo dans le monde passe sur mobile.

De son côté, LinkedIn vient de publier un chiffre d'affaires trimestriel de 473 millions de dollars, et dépasse aussi bien ses propres prévisions que celles des analystes. L'activité de recrutement (+50%) comme la vente d'abonnements premiums (+46%) sont en effet en forte croissance, portées notamment par l'implantation de la société... en Chine !

4/ Les deux cofondateurs ont touché plus d'1,2 million d'euros en 2013

Alors que les pertes de Viadeo se sont établies à 13,1 millions d'euros en 2013, les rémunérations touchées par ses deux principaux dirigeants ont de quoi donner le tournis. Ses cofondateurs, Dan Serfaty (PDG) et Thierry Lunati (directeur général délégué) ont touché près de 837 000 euros au titre de l'exercice. Le PDG, missionné en Chine, pour y porter le développement de la société, bénéficie, outre son salaire de 389 000 euros, d'un logement de fonction qui a coûté 162 500 euros en 2013.

A ces confortables rémunérations s'ajoutent d'autres émoluments. En 2013, Viadeo a versé près de 500 000 euros à deux sociétés, KDS et Kadomi, dirigées... par ses fondateurs. La société de Dan Serfaty, KDS, a ainsi facturé 185 000 euros à Viadeo en 2013 pour ses conseils stratégiques et commerciaux. 67 000 euros de cette somme lui reviennent directement au titre de quote-part. Celle de Thierry Lunati, Kadomi, a facturé 322 000 euros pour une mission de conseil technique à Viadeo. Au total, tous deux ont donc touché la bagatelle de 1,2 million d'euros l'année dernière... soit près de 10% de la perte de Viadeo.