gmoney (9dcc) "Le Web3 a encore beaucoup à faire en tant qu'industrie pour parvenir à l'adoption de masse"

Après des années à tisser sa renommée de façon anonyme, derrière un avatar de Cryptopunk, gmoney a révélé son visage en novembre dernier. Influenceur du Web3, le créateur de la marque 9dcc donne au JDN son regard sur ce secteur.

JDN. Votre marque de vêtements prépare un nouveau drop de NFT et vous avez annoncé une grande chasse au trésor en plein air. Pouvez-vous nous en parler ?

gmoney. Le prochain drop se déroulera durant NFT.NYC à New York, le 12 avril. Nous allons occuper une bodega et distribuer des casquettes dans des coloris différents, ce sera le début d'une chasse au trésor dans la ville de New York qui durera plusieurs jours. Ce sera un parcours pour permettre de découvrir les endroits que j'affectionne à New York et qui ne sont pas forcément connus du grand public car peu touristiques. Pour moi, lorsque l'on parle de créer des communautés dans un monde numérique, l'une des meilleures utilités des NFT est de permettre aux communautés numériques de se rencontrer dans le monde physique.

Justement, le terme "communauté" revient constamment dans le Web3. . N'est-il pas quelque peu galvaudé ?

C'est un terme qui est beaucoup utilisé et parfois brandi comme un bouclier mais je pense vraiment que c'est une notion puissante. Vos clients les plus fidèles sont aussi les plus critiques. Si je fais une erreur sur ma stratégie, ma communauté va me le faire savoir très rapidement. Je les laisse exprimer leurs inquiétudes, même s'ils ne connaissent pas forcément le contexte dans son intégralité, mais peut-être qu'ils ont en tête quelque chose auquel je n'aurais pas pensé. Dans les cinq minutes suivant une annonce sur Discord, il est possible de voir comment une communauté accueille un projet. C'est incroyablement puissant et moins cher que de payer des tests auprès d'échantillons de la population. Toutes les marques qui deviennent importantes disposent d'une grande communauté. Ces communautés existent pour les marques traditionnelles mais ne sont pas officiellement parties prenantes. Je crois que la tokenisation d'une communauté lui permet de le devenir.

Dans le même temps, cela permet à une marque d'identifier les protagonistes les plus actifs et d'interagir avec eux. Par exemple, je pense que les prochaines personnes que nous engagerons viendront de notre communauté car ce sont déjà des passionnés, très impliqués, et ce, sans même être payés. Ils seront donc sans doute encore bien plus actifs une fois salariés.

Comment le Web3 peut-il profiter au marché du luxe, dont vous vous réclamez ?

Lorsque j'achète des sneakers, un vêtement, j'aime savoir combien d'exemplaires existent. Nous avons tous été devant ces produits présentés comme éditions très limitées or, dans ce cas, on fait confiance aux vendeurs sur la quantité réelle produite car on ne peut pas réellement le vérifier. C'est ce qui est beau avec la blockchain, elle offre cette possibilité au consommateur sur le marché primaire, comme elle permet de vérifier l'authenticité du produit sur le marché secondaire, sans avoir besoin d'un expert. Je pense que c'est très important. Par exemple, pour le marché des montres de luxe, une Rolex vaut bien davantage avec un acte d'authenticité que sans, bien que ce ne soit juste qu'un bout de papier. Plus vous avez la garantie de l'authenticité d'un produit, plus sa valeur intrinsèque est élevée et c'est dans l'intérêt d'une marque de vouloir cette certification car le marché de la contrefaçon est considérable.

Vous qui êtes entré dans le Web3 il y a plusieurs années maintenant, quel est votre regard sur son évolution ?

Cela a évolué bien plus rapidement que je ne l'aurais pensé. Sincèrement, je pensais que cela prendrait cinq à sept ans pour en arriver là où nous en sommes en termes d'acculturation, de connaissance des NFT. Cela s'est produit en cinq mois. En raison des cycles de marché, d'un retour des prix à la baisse, les gens sont forcément moins excités à ce sujet mais c'est très intéressant de constater qu'à EthDenver (grande conférence de développeurs tenue entre le 24 février et le 5 mars, ndlr), il y avait 26 000 personnes là-bas, ce qui est me parait dingue, en particulier dans un marché baissier. Cela démontre qu'il y a une vraie émulation au sujet de la technologie et de ce qu'elle signifie pour l'avenir.

"Ledger mène la danse pour favoriser l'adoption du Web3"

Selon nos informations, vous allez collaborer avec Ledger. En quoi cela va-t-il consister ?

Je crois que FTX nous a montré que si vous n'avez pas la clef privée, vous ne possédez vraiment pas votre wallet et c'est vrai ! FTX a été une vraie sonnette d'alarme. Ce qui est beau avec la blockchain et la décentralisation, c'est qu'elles vous donnent le choix. Aujourd'hui, si vous violez les termes de votre compte en banque, celle-ci le fermera et vous serez exclu du système bancaire. Avec la crypto, vous pouvez utiliser des solutions tierces comme Coinbase, Kraken et Binance ou vous pouvez utiliser vos propres solutions, vos propres wallets et dormir avec la certitude que vos actifs ne seront pas utilisés à votre insu.

Mais nous avons encore beaucoup à faire en tant qu'industrie avant de parvenir à l'adoption de masse. Il faut rendre les choses vraiment faciles, il faut qu'elles deviennent suffisamment simples pour ma grand-mère et nous n'y sommes pas encore. En 1997, c'était impossible que l'on se partage nos photos à distance. Aujourd'hui, on le peut grâce à Instagram mais cela a pris une dizaine d'années pour y parvenir. Je pense que nous sommes dans une situation similaire à l'heure actuelle et je pense que Ledger mène actuellement la danse pour favoriser l'adoption en sécurisant avec simplicité les actifs des gens et en éduquant.

Vous nous parlez là du cœur de métier de Ledger mais quel sera votre rôle ?

Je ne peux pas en dire davantage à ce stade, c'est encore trop tôt.

D'après nos informations, vous levez également des fonds pour votre marque 9dcc. Quel est votre objectif et quels sont vos investisseurs ?

Je ne peux pas encore donner plus de détails.

En tant que créateur de NFT, quel est votre regard sur la guerre des places de marché Blur et OpenSea qui menace la distribution des royalties ?

Je pense que ces plateformes vont revenir en arrière. Je travaille moi-même sur un système qui encourage le paiement des royalties. Nous allons voir la naissance des marketplaces détenues par les créateurs avec des incitations pour les utilisateurs. D'ailleurs, un créateur devrait aussi vouloir le contrôle sur l'expérience utilisateur, je n'ai jamais compris pourquoi des projets se lancent sur OpenSea : construisez votre propre rampe de lancement, c'est tellement facile de nos jours, on peut le faire en moins de quinze minutes et ainsi bénéficier d'une relation plus étroite avec sa communauté, sans avoir à se soucier de ces plateformes qui se disputent des parts de marché avec à peine 500 wallets actifs. Je pense que la raison du comportement de Blur est qu'ils ont des VC derrière et doivent montrer des parts de marché en hausse mais que sur le long terme, cela va les rattraper.

Vous avez dévoilé votre visage pour la première fois il y a quelques mois, après des années cachées derrière votre avatar Cryptopunk. Etes-vous toujours à l'aise avec ce choix et pourquoi ne pas avoir encore révélé votre nom ?

Je suis toujours assez à l'aise avec ça. Je pense que pour élever ma marque au niveau où je veux l'amener, il fallait que je montre mon visage, montrer qu'il y a des leaders identifiables dans ce secteur. Je pense que c'était important. Ma vie n'a pas changé tant que ça, hormis le fait d'être davantage reconnu. Je pense que cela a été une bonne décision et que cela m'a permis de bénéficier d'une visibilité que je n'aurais pas eu autrement. Je suis cool avec ça. Mon nom se trouve sur une centaine de tables de capitalisation environ donc il est connu par de nombreux entrepreneurs, dès lors je pense que le fait qu'il n'ait pas été révélé publiquement en dit long sur la qualité de ces acteurs et sur ma bonne réputation.