Pourquoi les cryptomonnaies sont indispensables à l'Europe

Alors même que Christine Lagarde estimait il y a une semaine dans une tribune du FMI que les crypto-actifs constituaient une "menace émergente", le Conseil de Stabilité Financière déclare que "les crypto-actifs ne font pas courir de risque à la stabilité financière mondiale". Dans cette cacophonie, l’Europe ne doit pas se tromper, elle a un rôle essentiel à jouer.

Pendant que notre continent peine encore à rattraper son retard sur la transition numérique, les financements précoces, parfois dix fois supérieurs, octroyés aux start-up dans la Silicon Valley, permettent l’émergence de Gafa et sont en passe de pérenniser notre statut de colonie numérique des Etats-Unis.

Le vrai risque auquel l’Europe s’expose est celui de ne pas encourager le virage de l’économie mondiale vers les cryptomonnaies.

Maîtriser le réseau bitcoin : un impératif concurrentiel dans un monde gouverné par la data

Les entreprises qui centralisent le plus de données détiennent un avantage concurrentiel déterminant à l’aube d’une économie contrôlée par les algorithmes. Avec la décentralisation et la mise en œuvre de la “preuve de calcul” sur le réseau bitcoin, on oppose une barrière physique, à savoir une dépense d’énergie, à la manipulation de la base de données des transactions (la “blockchain”). Aucune organisation, fut-ce un Etat ou un Gafa, ne réunit les moyens financiers, opérationnels et juridiques qui lui permettraient de perturber durablement ce réseau. La valeur d’un bitcoin ne peut tomber à zéro que si l’utilité du réseau disparaît. Or, tant que les terriens trouveront utile de passer des transactions sans contrainte, il y aura des utilisateurs, des développeurs et des mineurs pour maintenir le réseau bitcoin. Neutre et ouvert à tous les utilisateurs, il ne contraint personne à divulguer ses données personnelles, comme c’est le cas quand un administrateur central gère le réseau. Cette ouverture favorise l’inclusion financière, l’innovation et positionne bitcoin comme une valeur de réserve mondiale, au même titre que l’or, rivalisant avec les 5 devises “mondiales” répertoriées par le FMI.

L’Europe aurait tort de se priver du bitcoin : avec plus de 13 millions d’utilisateurs, la plateforme américaine Coinbase dépasse désormais Charles Schwab, le courtier grand public historique pour les actions détenues par les particuliers aux Etats-Unis.  Sans bitcoin, nous assistons déjà à la prise en main de l’intelligence artificielle nourrie au “big data” par les plateformes des autres continents et à la revente aux acteurs (Etat, entreprises, citoyens) de leurs propres données.

Création de valeur : comment tirer le meilleur parti des cryptomonnaies ?

Premièrement, il faut donner une valeur légale à la certification des documents électroniques dans la blockchain, signatures de transactions et documents d’identité compris. Une identité numérique auto-souveraine via la blockchain bitcoin permettrait à chacun de prouver l’authenticité de ses documents électroniques et de monétiser ses données personnelles auprès des éditeurs d’applications et autres réseaux privés.

Deuxièmement, il faut reconnaître le caractère libératoire d’un paiement via une transaction bitcoin d’une somme en euros. L’adoption des réseaux de paiements en logiciels libres permettrait aux petits commerçants d’équilibrer le rapport de force avec les réseaux privatifs en position dominante (cartes bancaires, Paypal, iTunes…).

Troisièmement, il faut clarifier la fiscalité des bitcoins et des tokens tout en l’harmonisant avec celle de nos voisins. En particulier, la taxation des plus-values réalisées en investissant dans une cybermonnaie devrait être couverte par la “flat tax” à 30%. Comme elle en est exclue actuellement, pour un particulier, le taux peut monter à 62%, incitant à la thésaurisation ou à l’évasion fiscale.

Toutes ces mesures permettront de rassurer les utilisateurs des bitcoins et autres cryptomonnaies, sans les contraindre. L’Europe n’a rien à craindre des nouvelles technologies : en les embrassant de manière intelligente, elle pourrait en faire un levier de développement pour regagner sa souveraineté numérique.