Warren Buffett est-il devenu un investisseur lambda ?

Warren Buffett : l'investisseur ultra-médiatisé et ultra-riche mérite-t-il vraiment son titre de génie de la finance ? Si ses succès sont nombreux, ses échecs le sont aussi mais ont bien sûr été moins médiatisés. Retour sur la carrière incroyable de l'oracle d'Omaha.

Véritable personnalité publique, Warren Buffett est reconnu pour être virtuose des marchés financiers. Homme d’affaire considéré et respecté, régulièrement cité dans le classement Forbes des hommes les plus riches du monde, il reste un milliardaire toujours aussi ambitieux malgré son âge.

Avec une fortune entachée par la crise du coronavirus et estimée à un peu plus de 67 milliards de dollars, il se hisse aujourd’hui à la quatrième place en 2020 de ce classement. Mais derrière cet éloquent succès se cache bien évidemment de retentissants échecs liés à des investissements pas toujours très bien appréhendés.

Le premier trimestre 2020 lui a occasionné la plus grosse perte de son histoire avec près de 50 milliards de dollars perdus en bourse, de quoi remettre en cause ses compétences jusqu’ici inébranlables.

Portrait d'un homme puissant

Warren Buffett est un brillant homme d'affaires et grand investisseur américain. Surnommé "l'oracle d’Omaha", il a impacté notamment le monde des placements boursiers. C'est d'ailleurs le secteur d'activité dans lequel il a véritablement bâti son immense fortune. Grand élève de Benjamin Graham, il évolue sous l’aile de ce dernier après ses études à Columbia. Il exerce durant deux années à la Graham - Newman Corporation. C'est là où il se forge et perfectionne sa méthode d'investissement qui fait ses preuves au fil des années. 

Il retourne après ce court passage dans sa ville natale pour y fonder une entreprise familiale. Ce n'est qu'en 1965 qu’il rachète Berkshire Hathaway, une société spécialisée dans l'industrie du textile. Il transforme progressivement cette dernière et l'érige plus tard en une impressionnante firme de holding pour ses investissements.

Dans les années 1990, ses détracteurs l'attaquent en prophétisant même sur sa chute.  Buffett n’en est pas déstabilisé et il se sent plutôt galvanisé par cette situation. En effet, sentant les dégâts du boom des valeurs technologiques et des dotcoms se profiler à l'horizon, il se retire de ces valeurs, se muant notamment en observateur. Cette démarche s’avérera plus tard ingénieuse car au final, c'est bien lui qui a eu raison. Dans le même sillage, sa stratégie connaît une belle réussite après l'éclatement de la bulle Internet. Ces événements répétés ont accru sa notoriété et forcé l'admiration de tous.

Par ailleurs c'est aussi un stratège hors pair. Investisseur dans la valeur, il reste fidèle à ses principes. L'une de ses célèbres phrases peint le mieux sa technique : "Dans l'investissement, tout n'est qu'affaire de choix : choisir les bonnes actions au bon moment et les garder aussi longtemps que les entreprises restent de bonne qualité". Son astuce reste assez simple car elle se fonde sur la valeur marchande intrinsèque de la société. Partant de cette affirmation, il se montre très souvent assez attentiste pour mener les bonnes actions au meilleur moment. Sans doute ceci constitue l'arme la plus efficace avec laquelle il a dominé plusieurs années durant le secteur des investissements.

Warren Buffett : colosse aux pieds d’argile

Si le génie de Buffett ne fait aucun doute, il n’en reste pas moins humain, avec son lot potentiel d’erreurs et d’échecs. Ses qualités de négociation et son culot, moins médiatisés, lui ont offert quelques investissements juteux. Alors difficile de se rendre compte de ses réelles performances boursières tant les performances entrepreneuriales semblent avoir été fleurissantes.

Mais il est possible de retracer les échecs suivants. Son immense fortune a en effet chuté entre 2019 et 2020, en raison des pertes enregistrées sur ces récents placements.

En 1993, par le biais de Berkshire Hathaway, Warren Buffet a négocié le rachat de Dexter Shoes un fabricant et distributeur de chaussures pour un montant de 433 millions de dollars. En absence de concurrence dans le secteur. A l’époque, cet investissement ne fut pas couronné de succès. En effet, à l'issue de cette opération, les actionnaires enregistreront de colossales pertes à hauteur de 3,5 milliards de dollars. Cette expérience constitue sans doute l'une des plus amères de la riche carrière de l'homme.

Quatre ans auparavant, il négocie des parts d'actions à valeurs privilégiées d’US Airways. Il misait beaucoup sur une croissance du chiffre d'affaires de la société. Mais très vite, il se rend compte de son illusion. L'entreprise subissait d'énormes charges qui ont littéralement plombé sa rentabilité. La firme a, certes, réalisé d'excellents chiffres mais, au final, peu de bénéfices. De cette opération, il a appris bien à ses dépens que la croissance économique n’induisait pas forcément de rentabilité.

L’homme s’en est fort heureusement pour lui très bien sorti, puisqu'il revend plus tard toutes ses parts et ne perd donc pas sur ce coup, mais ne réalise pas non plus de profits.

En 2008, il prend de nombreuses parts d'actions Conoco Philips à prix exorbitants. Il s'est certainement laissé avoir par l'euphorie qui entourait cette société dont le prix des actions avait été très largement surévalué. Cet investissement qui a suscité beaucoup d'optimisme se révèle un échec épatent.

Plus récemment, il avoua s'être trompé lourdement en 2015 lors de l'opération de fusion des sociétés Kraft Heinz. En gros, ce sont plus de 4 milliards de dollars engloutis en pertes à la bourse.

Une année auparavant il avait enregistré près de 433 millions de perte lors d'une opération avec le groupe britannique Tesco. Il déclarera plus tard avoir manqué de flair en ne cédant pas un peu plus tôt sa participation.

Génie de la bourse ou personnage chanceux ?

Malgré ses débâcles, on ne peut que constater que parmi les boursicoteurs, il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus. Combien ont réussi à bâtir un empire aussi important que celui de Warren Buffett et à le conserver sur la durée ? Aucun.