Kelkoo est un site publicitaire et doit s'afficher comme tel !
Fait rarissime – quatre arrêts de la Cour de cassation, dont deux du 29 novembre 2011, affirment que Kelkoo est un site publicitaire qui doit le préciser sur chacune de ses pages. Toutefois, en ne le faisant pas, Kelkoo ne commet pas de publicité trompeuse.
Le litige est né d'un contrat de partenariat par
lequel Kelkoo s'est engagée à référencer sur son site Internet les produits de
ce distributeur parisien. Concurrence a résilié l'accord et a ensuite assigné
Kelkoo au motif que cette dernière, se présentant comme un moteur de recherche
de produits et de prix exhaustif, exploiterait en réalité un site promotionnel
et ne respecterait pas les dispositions applicables à la publicité, dont l'article
20 de la loi pour la confiance dans l'économie numérique du 21 juin 2004
("LCEN"), qui impose que toute publicité sur Internet, quelle qu'en
soit la forme (bandeau publicitaire, pop-up, publicité interstitielle…), soit
clairement identifiée comme telle.
En appel, Kelkoo a été condamnée sous astreinte à
identifier son site Internet comme un site publicitaire, sous peine de
commettre des actes de publicité trompeuse.
Le pourvoi soutenait que les mentions légales du
site de Kelkoo indiquaient clairement le caractère non exhaustif des résultats du
comparateur et, surtout, le fait que seules les offres des partenaires commerciaux
de Kelkoo étaient affichées, de sorte que le consommateur ne pouvait pas être
trompé sur la nature du service fourni.
Kelkoo s'appuyait notamment sur une recommandation
du Bureau de Vérification de la Publicité du 13 mai 2005, selon laquelle les
mentions rectificatives sur Internet pouvaient valablement être accessibles par
le biais d'un lien hypertexte, ce qui était le cas en l'espèce via des onglets situés sur chaque page.
Cependant, la Cour de cassation a approuvé la Cour
d'appel d'avoir jugé que le cheminement que devait emprunter l'internaute pour obtenir
l'information sur la nature publicitaire du site était trop complexe : elle
supposait que l'internaute fît "preuve
de curiosité" (un vilain défaut !) et ouvrît plusieurs fenêtres, ce
qui était incompatible avec l'article 20
de la Loi sur la Confiance dans l’Économie Numérique (LCEN).
Le pourvoi de Kelkoo a donc été rejeté sur ce point.
Toutefois, la Cour de cassation a également jugé
que Kelkoo n'était pas tenue d'indiquer les périodes de validité des prix
affichés sur son site, ni de présenter les prix toutes taxes comprises, mis à
jour en temps réel, en précisant l'existence d'éventuels frais (transport ou
enlèvement). Selon la Cour, cette obligation ne s'applique qu'aux offres de
contrat, ce que n'est pas un comparateur. Juridiquement, la pollicitation ne
peut donc s'entendre que sur le site du commerçant.
Le second arrêt rendu le même jour censure la Cour
d'appel de Grenoble, qui avait considéré que le site de Kelkoo était
constitutif de publicité trompeuse au sens de l'article L. 121-1 du Code de la
consommation. En effet, la Cour d'appel n'a pas vérifié si ces omissions
étaient susceptibles d’altérer de manière substantielle le comportement
économique du consommateur. Compte tenu de cette censure, le feuilleton
continue de plus belle.
Ces deux décisions relativement sévères pour un
comparateur de prix sont à rapprocher du jugement du Tribunal de grande
instance de Paris du 15 décembre 2011, qui a jugé que le site Shopping.com
était non pas hébergeur mais éditeur et, partant, responsable à ce titre des
annonces diffusées.
Autrefois en vogue, les comparateurs de prix pourraient
bien faire face à un net reflux.