Michel Koch (Quelle - La Source) "Nous réfléchissons à créer des sites de niche"

Le directeur e-commerce du vépéciste Quelle - La Source revient sur la guerre des prix en ligne, détaille sa stratégie d'approfondissement de l'offre et dévoile ses prochains projets.

JDN. Tous les acteurs historiques de la VAD sont contraints de réorganiser leur activité. Vous aussi ?

 

Michel Koch. Nous avons entamé une restructuration il y a deux ans, après être sortis du groupe Quelle allemand, pour abaisser nos coûts fixes et nous recentrer sur notre coeur de métier : le commerce. Nous avons donc pris de l'avance sur le marché, puisque nos confrères de la région entrent en ce moment dans cette démarche douloureuse mais nécessaire. La logistique et le call center ont été cédés et nous réduisons la partie support et services. Parallèlement, nous renforçons l'aspect multicanal de notre activité. Le e-commerce représentait, en 2008, 39 % de notre chiffre d'affaires, mais cette proportion se rapproche maintenant de 50 %. Ce modèle bi-canal doit maintenant trouver un équilibre.

Actuellement vous affichez, une fois n'est pas coutume, des prix en baisse de 75 %. La guerre des prix sur Internet va-t-elle durer longtemps ?

L'ensemble des acteurs se trouve effectivement dans une logique enfermante de communication sur les prix bas. Cela ne fait que renforcer cette tendance, alors qu'il n'y a pas non plus de panique chez les consommateurs. Nous sur-réagissons peut-être un peu. Le besoin de résultats sur le court terme nous pousse sans doute vers cette solution de facilité.

En même temps, l'un des aspects de notre positionnement est précisément d'être accessible. Nos clientes sont des femmes de 30 à 45 ans qui ont des moyens limités mais veulent se faire plaisir avec la mode. Nous sommes donc habitués à pratiquer ce type de promotions, tandis que les autres ne l'avaient peut-être pas prévu dans leur compte de résultat.

Avez-vous intérêt à cette guerre des prix ?

Non, tout de même pas. Il va donc bientôt falloir abandonner cette surenchère : nous ne voulons pas faire de déstockage permanent mais au contraire renforcer notre marque. Nous allons devoir identifier les clientes qui ne réagissent pas uniquement au prix et trouver d'autres logiques : service, conseil, adéquation aux tendances... C'est d'ailleurs dans cette optique que nous lancerons cet été une marque en propre : La Source Créations.

Travaillez-vous, comme beaucoup de vos confrères, sur la réduction des frais de livraison, voire leur suppression ?

"D'ici fin 2009, nous aurons développé au site une dimension communautaire"

La livraison est un service qui a un coût. Si l'on en fait cadeau, ce n'est jamais qu'une remise déguisée. Mais qui laisse penser que la livraison ne coûte rien et finalement dénigre le service. De plus, supprimer les frais de livraison est très destructeur de marge. Nous préférons proposer toute une gamme de modes de livraisons et mettre en avant le moins coûteux. Offrir exceptionnellement la livraison, pourquoi pas, le banaliser, jamais.

Quels sont vos projets pour les mois à venir ?

Nous passerons à une nouvelle version du site fin juillet, qui verra la refonte du processus de commande, de l'accès au compte client et le changement de l'hébergement. Nous visons de meilleures performances techniques, pour s'adapter aux volumes que nous traitons, mais aussi en matière de facilité d'utilisation et de transformation, notamment en présentant davantage notre offre sous forme de looks, comme en magasin ou dans le catalogue. Ce sera aussi l'occasion de transformer définitivement la marque Quelle en La Source et de communiquer sur ce passage de marque. D'autre part, d'ici fin 2009, nous aurons développé une dimension communautaire, en apportant au site des notes et des avis clients.

Envisagez-vous de vous diversifier, par exemple au travers d'une galerie marchande ?

Au contraire, nous nous avançons plutôt dans la démarche inverse. Nous voulons nous positionner sur le prêt-à-porter et sur la décoration, mais uniquement sur ces deux secteurs. Nous avons d'ailleurs abandonné la vente d'électroménager qui était plutôt destructeur de valeur : les gens ne viennent pas chez Quelle pour acheter une cafetière. En revanche, nous voulons être présents sur des carrefours d'audience en tant que spécialistes. Par exemple, donc, dans les galeries marchandes d'autres e-commerçants. Aujourd'hui, notre audience atteint déjà 3,5 millions de visiteurs uniques mensuels et nous sommes dans le Top 15 Mediamétrie-Fevad des sites marchands. Mais nous voulons accueillir plus de trafic.

"Les pure-players eux-mêmes commencent à envoyer des catalogues papier"

Allez-vous élargir votre offre mode et déco ?

Oui, nous réfléchissons à créer des sites de niche. De façon expérimentale, nous avons déjà mis en œuvre cette idée en ouvrant il y a un an un site de lingerie et de charme, Atoutdesirs.fr. Nous examinons actuellement nos axes forts pour poursuivre cette logique d'exploration sur des domaines à la fois pertinents et rentables, sur lesquels nous pourrions développer des catalogues plus restreints mais plus pointus.

Quelle est votre vision du marché du textile et de la mode sur Internet ?

Globalement, le secteur du textile souffre, car ces dépenses baissent dans le budget des Français. Mais côté e-commerce, il évolue significativement. Depuis des années, le modèle de la VAD est grippé. Nous devons repenser nos pratiques et nos métiers. Pour autant, ce n'est pas le e-commerce qui va sauver l'entreprise à lui tout seul. Notre savoir-faire en matière d'offre, de logistique, de service client est fondamental. A titre d'exemple, 30 % des commandes passées en ligne sont faites par des clients qui rentrent directement les références : le catalogue a donc toute son utilité.

Vous réfléchissez comme La Redoute et les 3 Suisses à l'évolution de son rythme et de son format de publication...

Bien sûr. Et comme eux, nous conserverons le catalogue. Il est d'ailleurs intéressant de constater que les pure-players eux-mêmes commencent à envoyer des catalogues papier : Cdiscount le fait, Patrick Robin de 24h00.fr l'envisage... Le papier renforce la marque et remplit une attente du public.