E-commerce & retail : quelques devoirs de vacances pour préparer la rentrée

La période estivale est un moment rare pour lever la tête et réfléchir aux fondamentaux. Façon devoirs de vacances, voici quelques réflexions stratégiques à méditer pour les dirigeants du retail.

1. Reprendre le contrôle de sa politique tarifaire

L’UFC-Que Choisir a frappé fort : selon son enquête récente, 85% des promotions affichées sur les principales marketplaces (Amazon, Shein ou Cdiscount) seraient trompeuses, en infraction avec le droit européen.

Une piqûre de rappel pour toutes les marques qui opèrent du marketplace out* sur ces plateformes. En vendant sur des places de marché, elles peuvent perdre le contrôle de leur politique tarifaire, avec des promos parfois déclenchées sans leur accord et voient leur image de marque fragilisée. Si elles ne centralisent pas leurs actions commerciales pour piloter leurs ventes, elles se retrouvent prises au piège d’une guerre des prix qu’elles ne maîtrisent plus.

À méditer : Où sont mes informations produits/prix/promotions ? Comment j’accède et je garde le contrôle sur les données qui partent vers ces plateformes ? Comment linéariser sur l'année mon action commerciale sur le digital ?

2. Passer en mode start-up

Après Camaïeu, San Marina, Jennifer, et plus récemment Princesse Tam Tam ou Comptoir des Cotonniers… le retail français s’essouffle. Les difficultés ne sont plus conjoncturelles, elles sont structurelles.

Pendant ce temps, Shein et Temu investissent sans compter, comme Amazon hier, pour prendre massivement des parts de marché, sans chercher la rentabilité immédiate.

À méditer : le retail français est-il prêt à penser comme une startup ; investir d’abord, consolider ensuite ? À accepter de sacrifier la rentabilité sur 2 ou 3 ans pour reprendre des parts de marché ? Ai-je l’appui de mes investisseurs ? Peut-on encore gagner en retail en cherchant la rentabilité à court terme ?  

3. De l’IA conversationnelle à transactionnelle : comment garder la main ?

En quelques mois, l’IA générative est devenue une évidence dans l’e-commerce : 31% des Français utilisent déjà ChatGPT ou un assistant IA pour faire leurs achats. Le client ne navigue plus sur un site web : il interroge désormais une IA.

Dans ce contexte, les enseignes doivent solidifier leurs fondamentaux avant de céder à l’effet de mode. D’abord, structurer et soigner la gouvernance de leurs données. Les IA choisissent ce qu’elles comprennent.

Les acteurs du e-commerce doivent aujourd’hui pouvoir piloter leurs ventes digitales depuis une console centrale. Cette capacité à gérer plusieurs points de contact via les API est primordiale, tout comme produire du contenu de qualité, bien structuré, pour apparaître dans les réponses des assistants.

Avant de repenser le SEO, qui tend à chuter en termes de poids dans les canaux de vente, comment l'IA interprète ces données produits/prix/promotion ? Tout comme IOS hier, ces nouvelles 'boîtes noires' conservent l'information client. Or, aujourd'hui, garder le client final est clé dans l’atteinte de la rentabilité, les coûts d'acquisition étant de plus en plus importants.

À méditer : Comment rendre disponible ces informations sans perdre mes data clients ? Puis-je proposer ma propre expérience IA ? Utiliser des standards comme les MCP* me feront-ils perdre cette connaissance, ou puis-je mettre en place d’autres moyens de recouper l'information client ?  

4. Efficacité logistique : passer du simple OMS au DOMS

L’efficacité logistique est un levier commercial. Contrairement à un OMS traditionnel, qui centralise la gestion des commandes de manière relativement linéaire, le DOMS (Distributed Order Management System) permet d’orchestrer dynamiquement les flux de commandes à travers plusieurs points de stocks (entrepôts, magasins, partenaires) et en fonction de règles de priorité, de disponibilité, de délais ou de coûts. C’est une couche supplémentaire d’intelligence logistique indispensable dans un monde où le commerce se fait sur tous les canaux.

Le cœur d’un DOMS, c’est sa capacité à décider. Qui prépare quoi, depuis quel point et selon quels critères ? Un bon moteur d’orchestration permet d’arbitrer automatiquement entre coût, délai, engagement client ou empreinte carbone, tout en laissant la main aux opérationnels pour ajuster les règles en période de forte activité ou de tension logistique.

Franprix vient d’annoncer sa nouvelle stratégie de livraison. Désormais, seuls les pure players tels que Uber eats ou Deliveroo se chargeront de la livraison une fois les préparations de colis réalisées en magasin. Dans ce modèle, quid de la maîtrise de l’expérience client sur l’ensemble de la chaîne de valeur ?

À méditer : ma chaîne logistique est-elle prête à absorber la complexité du ship-from-store, du retour cross-canal ou du dropshipping… sans casser la promesse client ? Ais-je une maîtrise suffisante et abordable des implications logistiques ? Mes équipes sont-elles prêtes à s’adapter à de nouvelles attentes clients ?

5. Ne pas sous-estimer le mobile-first

Chaque été, le trafic mobile explose : achats de dernière minute sur la plage, réservations à la volée, comparaisons de prix en boutique. Pourtant, trop de sites restent mal optimisés pour ces usages. Tunnel de paiement trop long, UX bancale, performances mobiles dégradées…

À méditer : votre site est-il vraiment conçu pour un achat en 3 clics sur un écran de 5 pouces ? L’été est-il le stress-test parfait ? Quel modèle adopter sur le mobile : application, site responsive ou PWA* ? 

* marketplace out : capacité pour une marque ou un distributeur à vendre ses produits sur des marketplaces tierces en connectant son catalogue et ses flux logistiques à ces plateformes externes.

*MCP : Model Communication Protocol est un standard qui définit comment différents modèles d’IA communiquent entre eux, échangent des informations ou coordonnent leurs actions au sein d’un système distribué.

*PWA : Progressive Web App est une application web qui offre une expérience utilisateur similaire à celle d’une application mobile, sans les contraintes de cette dernière.