Distribution automobile : l'analytics pour optimiser la rotation des stocks de véhicules neufs et zéro kilomètre

Pour les constructeurs automobile et leurs réseaux de distributeurs, la reprise de l'activité post-covid cristallise la fragilité du modèle et de sa rentabilité économique.

Malgré le risque sanitaire qui pourrait booster les ventes, la crainte d’une crise économique pousse les consommateurs à retarder leur achat de véhicule, tandis que la prise de conscience écologique de la population accélère indéniablement la transformation du mode de consommation de la voiture. A court terme, constructeurs et distributeurs doivent écouler des stocks conséquents accumulés avant le confinement pour récupérer de la trésorerie. En parallèle, ils doivent revoir leur manière d’approvisionner les véhicules pour stock afin de mieux répondre à la demande et optimiser leurs marges. Jamais il n’a été aussi difficile de prévoir les bonnes configurations de véhicules à approvisionner en concessions. Les méthodes et outils utilisés vont rapidement montrer leur limite.

Face à des consommateurs volatiles et une concurrence forte, les constructeurs dépensent des milliards chaque année dans tous les pays pour faire bénéficier à leur clientèle de rabais commerciaux ; simples remises de bas de page de quelques points pour les véhicules neufs, ces remises peuvent atteindre 20 ou 30% dans le cas des ventes tactiques (véhicules à faible kilométrage vendus en occasion récente - les véhicules de direction).

Structurellement l’offre a longtemps été supérieure à la demande. Pour amortir les coûts de développement et les frais fixes industriels importants, les capacités de production doivent fonctionner aux taux de rendement maximaux et par conséquent, les constructeurs demandent à leurs réseaux de commander à l’avance et en respectant des quotas précis leurs véhicules. Pour écouler les stocks et ainsi contribuer à faire fonctionner le modèle, constructeurs et distributeurs ont donc dû mettre en œuvre tous les moyens commerciaux nécessaires.

La largeur des gammes proposées et la multiplicité des configurations possibles rendent le travail de prévision de ventes très complexe. Avec les contraintes liées à l’industrie qui obligent à figer plusieurs mois avant le lancement de la production les volumes par segment, moteur et boite de vitesses et à quelques semaines les configurations précises, les distributeurs font face à une complexité que les outils actuels ont du mal à appréhender. Approvisionner et stocker sur chaque point de vente des dizaines de véhicules, moyens de locomotion nécessaires pour la plupart, partageables pour d’autres, plaisir pour certains, nécessairement propres pour tous, est de plus en plus compliqué pour les directions commerciales. Et pourtant l’enjeu est bien de proposer aux clients potentiels leur véhicule afin d’éviter de les voir partir chercher leur configuration idéale sur un autre point de vente, chez une autre marque ou même dans un autre pays. Les techniques classiques qui mixent l’utilisation des historiques de ventes et l’intelligence marché apportée par des forces de ventes spécialistes ne suffisent plus.

Pourquoi un client potentiel achèterait-il plus dans ma concession que dans une autre ? Cette question certes anodine, recouvre à la fois une compréhension fine des comportements clients, une analyse du marché local et une anticipation des aspirations. C’est ici que l’analyse des données apporte des perspectives intéressantes. En captant tous les signaux disponibles au niveau d’une clientèle potentielle, l’Analytics permet de mieux appréhender les marchés, les tendances des consommateurs de chaque point de vente et donc d’approvisionner les configurations qui correspondront au mieux aux attentes de ces clients. A titre d’exemple, l’analyse des données permet de croiser les données des véhicules les plus vendus dernièrement (options, couleur…) avec la taxonomie des véhicules ayant plus de 8 ans pour faciliter le processus de précommande auprès des constructeurs. Pour faciliter l’écoulement des stocks actuellement disponibles après ces 3 mois de confinement, analyser les données peut aussi permettre de revoir l’allocation des véhicules entre points de vente afin de mieux capter la clientèle locale. Utilisées par l’industrie des biens à la consommation notamment, les algorithmes d’Intelligence Artificielle permettent d’appliquer aux classiques utilisations des historiques de ventes d’autres facteurs tels que les tendances capturées sur les réseaux sociaux, l’âge moyen du parc roulant, les opérations des concurrents mais aussi l’évolution « locale » du marché de l’occasion, les tendances sur la mobilité. Ces solutions rapides à mettre en œuvre et peu onéreuses peuvent aider les réseaux de distributeurs à mieux gérer leurs stocks et augmenter les taux de rotation.

L’enjeu est double : améliorer la rentabilité des distributeurs et des constructeurs tout en contribuant à fidéliser une clientèle versatile et toujours plus exigeante. Face à une ou des configuration(s) proche(s) de leurs envies, les clients seront généralement moins enclins à demander de gros rabais relativement facilement octroyés par des concessionnaires pressés de vendre des véhicules aux couleurs, configurations et spécifications techniques éloignées des besoins de leurs clients. Et c’est aussi cette capacité à répondre plus vite – les véhicules étant déjà en stock - et juste à la demande qui permettra de fidéliser la clientèle voire capter des nouveaux acquéreurs.

Le marché automobile a évolué très rapidement ces dix dernières années et sa mutation va s’accélérer dans les prochains mois. Les contraintes environnementales et de fait, la perception de la voiture dans les consciences, la crise sanitaire récente et son impact économique, sont d’autant de freins à la consommation sur laquelle l’industrie a bâti son modèle économique et financier. Une meilleure gestion des rabais commerciaux est devenue nécessaire pour permettre de maintenir la filière et lancer les investissements essentiels sur les nouvelles technologies, notamment sur les énergies propres. Distributeurs et constructeurs doivent désormais s’appuyer sur l’Intelligence Artificielle et les sciences cognitives pour proposer à leurs clients les véhicules qu’ils attendent.