Big data, big intelligence ?

Nous vivons à l’ère du soupçon. Les récents scandales associés aux affaires Cambridge Analytica ou autres ont semé le trouble dans les esprits. Considérée de façon neutre pendant des années, la data est devenue sujet à caution.

Aussi, faudrait-il préciser qu’il s’agit plus de l’utilisation de la data que le concept de données en tant que tel. Les réglementations européennes portées par la RGPD sont venues comme une première réponse aux interrogations de tout un chacun. En somme et pour caricaturer, nous aurions vécu une révolution des pôles. Le temps de la data triomphante, porteuse de progrès et croissance aurait fait place à cette ère de soupçons que nous évoquions dans les propos linéaires. Dès lors se pose un défi : réconcilier ces deux visions a priori antagonistes. La question serait donc, comment placer l’utilisation de la donnée au cœur d’un business model tout en assurant et garantissant une vigilance extrême face à tout risque de dérives.

Prenons quelques instants pour rappeler ce qu’est réellement une data. Une définition simple consisterait à la rapporter à une matière première. C’est à mon avis une vision parcellaire voire trompeuse. Qui dit matière première dit transformation. La donnée, au contraire, entre plus dans un processus de circulation d’enrichissement et d’irrigation. De sorte que l’action transformatrice ne consiste pas en une transformation mais dans la maîtrise de la pertinence du flux.

Et, c’est là que le rôle de banquier, le métier de banquier et l’ADN même du banquier prennent une résonance nouvelle. Être banquier c’est être un tiers de confiance au service de ses clients. C’est un engagement moral bien sûr mais aussi réglementaire. La relation entre une banque et son client ne peut s’envisager sans le préalable de la confiance.

Et si on y regarde de plus près, la véritable question posée par le big data est une question de confiance. Prenons un exemple, purement empirique : un ciblage en termes de publicité est opéré auprès d’un consommateur et ne pose en soi pas de réel problème. Qu’en échange d’un service numérique gratuit un utilisateur livre un certain nombre de données ne pose pas non plus problème. Ce sont des pratiques plébiscitées et des business model pleinement acceptés. Google est gratuit et personne ne s’en plaint. Les craintes viennent donc du détournement de la rupture d’un pacte de confiance tacite.

Aussi, faut-il réinstaurer un cadre, des pratiques, des points de vigilance, des outils de suivi et surtout de la transparence. Nous ne pouvons plus concevoir une économie sans data. Cette révolution philosophique et technologique est aujourd’hui trop profondément ancrée au cœur de nos économies pour qu’un hypothétique retour en arrière soit possible. Il nous faut donc imaginer ce monde d’après et apprendre des dérives passées avec enthousiasme, vigilance et un sens certain de la responsabilité.