Comment l'IA Générative renforce le leadership des Big Tech

La vague ChatGPT a déposé une traînée de nouvelles startups de l'Intelligence Artificielle : OpenAI bien sûr, mais aussi HuggingFace, Cohere ou encore Anthropic, qui sont nés ou se sont fait connaître.

Des capacités d’investissement virtuellement illimitées au service de l’Innovation

Les IA Génératives actuelles sont nées entre 2010 et 2020 principalement dans les équipes de recherche et développement d’Alphabet et META, qui financent chaque année en dizaines de milliards des recherches sur l’IA permettant notamment d’alimenter leurs modèles de ciblage publicitaire. AWS et Microsoft, dont le business modèle est lié aux infrastructures, ont bâti leurs offres d’IA différemment. Microsoft a mobilisé ses réserves de cash pour prendre une longueur d’avance en s’appuyant sur OpenAI, intégré à la plateforme Cloud Azure et au moteur de recherche Bing dès février 2023. Dans le même temps, AWS a choisi de construire des partenariats diversifiés avec des startups comme HuggingFace, Anthropic, Stable Diffusion ou A21 Labs.

Ces partenariats se fondent sur la mise à disposition des gigantesques infrastructures disponibles sur le Cloud Public pour entraîner et exécuter les modèles des startups. Les fournisseurs de cloud se transforment ainsi en marketplace de l’IA Générative. AWS comme Microsoft propose désormais plusieurs dizaines de modèles déployables en quelques clics sur leur Cloud. Dans le même temps, sous l’impulsion de META, le marché se dirige vers des modèles principalement Open Source et gratuits. Cela complexifie les stratégies de monétisation des pure players de l’IA et les pousse encore davantage à s’allier aux grands fournisseurs de cloud dans des partenariats technologiques et économiques.

Des plateformes dopées à l’IA Générative

Au-delà des infrastructures, les BigTech ont tourné leur gamme de services vers l’IA Générative. En premier lieu, ils ont équipé les plateformes destinées aux développeurs avec des assistants (GitHub Copilot, Amazon CodeWhisperer et Duet AI for Google Cloud), avec des gains de productivité entre 30 et 60%. L’enjeu est majeur pour les entreprises du numérique et les équipes informatiques des grands groupes, et renforce encore la valeur des offres des grands Cloud Public, mais aussi la dépendance à ces offres. A encore plus grande échelle, Microsoft et Google ont annoncé des services liés à leurs suites bureautiques Microsoft 365 et Google Workspace et permettant d’accroitre la productivité des salariés. Le service Microsoft sera vendu 30€ par mois et par utilisateur pour une base installée de plus de 250 millions d’utilisateurs sur Microsoft 365.

Des places à prendre sur les solutions orientées métiers

Les BigTech laissent ainsi peu de place aux nouveaux entrants. Cela doit inciter les acteurs Européens à réfléchir à leur proposition de valeur, en prenant appui sur ses offres lorsque cela permet d’être plus performant.

L’adoption de standards open source sur les modèles est par exemple une opportunité pour faire émerger des alternatives - peut-être même publiques - correspondant à notre conception de l’IA éthique et responsable, en particulier sur les questions d’éducation et de santé.

Quant aux enjeux de conquêtes commerciales pour nos entreprises et nos startups, ils seront à n’en pas douter sur les usages et en lien avec nos industries fortes. On peut citer en illustration le partenariat sur le commerce conversationnel entre deux acteurs français, iAdvize et Cdiscount, mais aussi les expérimentations de Mercedes et BMW autour de l’automobile intelligente.

Notre vigilance vis-à-vis des grands acteurs du Cloud doit davantage se porter sur les effets de dépendance ou « lock-in » qui existent déjà aujourd’hui. Les mouvements actuels du marché doivent d’autant plus inciter nos entreprises à diversifier leurs partenariats technologiques et à adopter des stratégies multi-plateformes. Une fois conscient de cela et sans se disperser, beaucoup d’opportunités sont à saisir pour transformer nos business model ou en créer de nouveaux.