La sobriété numérique n'est pas une option

Bien que l'on ne cesse jamais d'innover dans le digital, avec notamment l'avènement de l'IA, il est nécessaire de prendre en considération la transition environnementale dans nos usages du numérique.

Inscrite dans l’air du temps, la transition environnementale devient un sujet de plus en plus prioritaire pour les différents acteurs de notre société. Si cela passe principalement par notre façon de produire de l’énergie, notre mobilité, ou encore nos méthodes de consommation, des réflexions se construisent également sur nos usages à l’ère du numérique. Dans une époque où la quasi-totalité des structures utilisent des ordinateurs et stockent leurs données dans des data centers, la réduction de l’empreinte environnementale du numérique semble une évidence.

La sobriété numérique : incompatible avec l’innovation digitale ?

La question revient souvent de savoir si la sobriété numérique est compatible avec la sécurité ou encore l'intelligence artificielle. Même si la question peut sembler légitime, il faut essayer de ne pas la poser en ces termes et de changer de paradigme : la sobriété numérique doit être intégrée dans tous les aspects du numérique, aussi bien dans ses enjeux (comme la sécurité) que dans ses innovations (comme l’IA). La question n'est donc pas de savoir si c'est compatible, car l'un ne va pas sans l'autre. La sobriété numérique n'est pas une option.

Dit autrement, tout service numérique se doit d'être écoconçu. Il n'y a pas d'un côté le numérique et de l'autre le numérique responsable. De la même manière, on ne peut se contenter d'un numérique réservé à une élite : il nous faut concevoir un numérique pour tous.

Plus qu’un reflet de nos échecs, une nouvelle façon d’avancer

Bien sûr, on peut regretter de ne pas l'avoir fait plus tôt. Tout comme pour l'utilisation du plastique, il peut sembler ridicule de lui avoir donné une place aussi prépondérante dans nos usages pour aujourd'hui l'interdire. Les choses évoluent et on tente tant bien que mal de corriger les erreurs liées à notre ignorance initiale. Mais cesserons-nous un jour d'être ignorants ? Ce qu’il est possible de faire, c’est sortir d’une binarité qui nous limite à opposer des extrêmes. Soyons plus créatifs pour raisonner les usages plutôt que de les interdire.

On peut vite être paralysé par l'ampleur du changement à mener. La peur de l'échec, la crainte de faire du greenwashing et du qu'en dira-t-on, ou simplement de s'acheter une bonne conscience pour un impact incertain ou dérisoire. À l'échelle individuelle, l'envoi d'un courriel représente 0,3 g de CO², mais à l'échelle mondiale, ce sont près de 294 milliards d'e-mails qui sont échangés quotidiennement. Sans arrêter complètement ce service, que peut-on faire pour réduire l’utilisation des emails ?

Plutôt que stigmatiser, permettre le changement à tous les niveaux

Comme dans l'échelle d'impact social d'Ashoka, chacun choisit son niveau d'intervention. Certains chercheront un impact systémique, d'autres un service quotidien. Les politiques sont à même de changer le cadre légal, d'imposer des normes et des obligations, comme par exemple un score de conformité au RGESN.

En tant que citoyen, notre impact est dans de petits gestes au quotidien. Supprimer régulièrement ses mails, ses photos, acheter moins d’appareils, se tourner vers le reconditionné, ou utiliser son équipement plus longtemps, sont quelques exemples de bonnes pratiques qu'il est possible de mettre en place. En tant que parent, notre impact est dans nos choix d’éducation pour nos enfants et comment l’accompagnement se réalise à travers leur utilisation du numérique. En tant qu’entreprise, notre impact est à chercher dans les produits et les services proposés : sont-ils écoconçus ? Leurs usages sont-ils responsables ? Quelle est leur raison d’être ? La sobriété numérique nous invite à questionner tout autant le quoi, le comment et le pourquoi.

La transformation digitale sera responsable, sobre et inclusive, ou elle ne sera pas. Il ne faut pas refuser les actions de chacun sous prétexte qu’elles ne s'adressent pas à la globalité du problème. C’est tous ensemble et à tous les niveaux qu’il nous faut permettre d’agir.