Repenser la conception parasismique des bâtiments passe par l'informatique

Le séisme qui a frappé l’Italie début avril a révélé le navrant décalage entre les ambitions réglementaires et la réalité terrain. A l’heure où l’informatique permet aux différents métiers du bâtiment de faire converger leurs expertises, il est impératif de renforcer le dialogue autour de la conception parasismique.

Au lendemain du tremblement de terre meurtrier qui a ravagé les Abruzzes, la presse italienne et les experts, à l'image de Franco Barberi, chef de la commission d'évaluation des risques de la Protection civile italienne, dénonçaient le manque de contrôle de la qualité des constructions, estimant qu'en Californie, un tel séisme n'aurait pas fait un seul mort.

Moins soumise au risque sismique que l'Italie, la France n'est cependant pas exempte de risques et connaît une sismicité moyenne ou modérée, présente essentiellement dans les Pyrénées, les Alpes, la Provence Côte d'Azur et l'Alsace. On estime à pas moins de 10 000 sur 36 000 le nombre de communes exposées aux tremblements de terre. Elles sont en ce sens directement concernées par les normes de construction parasismiques, qui demeurent le moyen le plus efficace de sauver des vies et limiter les dégâts matériels. Si certains bâtiments neufs intègrent de telles normes, la situation est en revanche plus complexe pour le bâti ancien, qui doit, selon les régions et la vulnérabilité des structures, faire l'objet d'un renforcement parasismique.
 
Les récents événements en Italie témoignent de l'importance de ces normes dans les processus de construction, mais aussi de la nécessité de mieux évaluer le risque au niveau du parc ancien.

Ne pas anticiper est criminel
 

Le risque sismique représente une menace contre laquelle il n'existe pas d'autre protection que la prise de dispositions permettant d'en minimiser les conséquences matérielles et humaines. Cette approche préventive implique une bonne connaissance du risque régional ainsi que la mise en place de dispositifs d'information et de préparation des services concernés et de la population. Elle passe surtout par le seul élément réellement efficace pour limiter les dégâts : l'adaptation des bâtiments et des infrastructures aux sollicitations dynamiques probables, via des méthodes de construction dites parasismiques et ce, dès la conception. Pour cela, les ingénieurs structure ont désormais à leur disposition des outils logiciels spécialisés, permettant de modéliser les structures et d'en contrôler la souplesse et la résistance à tout type de catastrophe naturelle.

Une construction parasismique est avant tout une construction qui sauve la vie de ses occupants tout en limitant les dégâts structurels. Elle prend en compte divers éléments indissociables les uns des autres : le choix du site d'implantation, la conception architecturale (l'implantation de la construction sur le site doit favoriser un comportement adapté au risque), le respect des règles parasismiques, la qualité de l'exécution et la maintenance des bâtiments. L'ensemble de ces éléments correctement pris en compte, une structure peut tenir, même face à un séisme particulièrement violent.
 
En France, les règles PS 92 encadrent le processus de construction pour les bâtiments neufs. Elles ont été rendues obligatoires pour les zones sismiques depuis 1998. Au niveau européen, un code de construction parasismique est en cours d'élaboration. La norme relative à la construction en zone sismique est l'Eurocode 8, devant mettre à disposition des professionnels du bâtiment des documents de référence reconnus par les 27 Etats membres de l'UE et applicables pour la conception et le calcul des bâtiments et des ouvrages de génie civil. Ces normes permettent de réelles avancées et généralisent la philosophie de la sécurité dans la construction.

Au carrefour de l'intégration européenne et de l'innovation technologique, l'informatique constitue une interface majeure entre les différents métiers du bâtiment, permettant à l'ensemble des acteurs d'un projet de collaborer de façon intelligente tout en intégrant les normes en fonction des contextes inhérents à chaque région (langue, risque, etc.). Il est possible aujourd'hui d'anticiper la menace mais aussi d'améliorer la réponse donnée aux situations d'urgence, en favorisant le dialogue entre les différents corps de métier concernés, de l'architecture à la construction, en passant par l'ingénierie et le géospatial.

Les nouvelles technologies peuvent sauver des vies ; ne pas les mettre en œuvre pour anticiper est un acte criminel.