Quand le nouvel intranet ne communique pas …

Les outils collaboratifs ne sauront remplacer l’intranet de communication, sous peine d’engendrer des frustrations chez les salariés.

Réseaux sociaux, outils de publication multi-auteurs, espaces collaboratifs sont complémentaires à l’intranet de communication, qui reste le vecteur de la communication institutionnelle interne.
Les réseaux sociaux d’entreprise, outils de publication multi-auteurs et autres espaces collaboratifs, permettent d’échanger des informations entre les collaborateurs d’une entreprise, sans s’arrêter aux statuts, frontières géographiques, hiérarchiques, fonctionnelles et organisationnelles. Aussi, ils induisent un gain de productivité considérable, et leur ROI en termes de transversalité, de capitalisation, d’émulation et d’agilité n’est plus à prouver. En tant que consultante "entreprise 2.0" je serais particulièrement mal placée pour le contester (même et surtout que la réalité de ces outils est devenue telle que le buzzword « 2.0 » est déjà passé de mode).
Et pourtant, dans certaines entreprises, on observe un sentiment d’insatisfaction vis-à-vis de la plateforme « 2.0 » mise en place par la DSI. Mais que pourrait-il donc manquer à des outils qui permettent à chacun de communiquer avec tous les interlocuteurs pertinents pour un sujet
 – ne devraient-ils pas couvrir tous les besoins qu’on puisse imaginer ?

* Premièrement, pour atteindre leurs objectifs, les outils collaboratifs nécessitent un accompagnement (conception adaptée aux utilisateurs, incitatifs, organisation, gouvernance, promotion, formation etc.) qui fait souvent défaut. Mais ceci fera l’objet d’une autre chronique.
* Deuxièmement, et c’est sur ce point que je souhaiterais insister aujourd’hui :
les outils collaboratifs ne remplacent pas l’intranet « traditionnel » qui relève de la communication interne institutionnelle, et qui est une expression du leadership dans l’entreprise. Et pourtant, les deux fonctions se trouvent de plus en plus souvent confondues : un seul outil pour tous, dédié à la communication interne, avec comme seul moyen de différenciation des droits de lecture et d’écriture propres à chacun.
Or, dans le cadre de la communication interne institutionnelle,
un manager ne parle pas en son nom, mais en tant que représentant d’une fonction dans l’entreprise. Il adaptera son discours aux exigences de la fonction et les récipients du message sauront parfaitement l’interpréter : nul ne pensera qu’il s’agit d’un avis personnel, ou même d’une prise de position en tant qu’expert de tel ou tel domaine.
Les outils collaboratifs en revanche sont gouvernés par la logique des expertises métier des intervenants. Le discours y est souvent réduit à sa plus simple forme, car on sait de quoi – et à qui – on parle. Seules comptent la rapidité et la pertinence des échanges d’information. Ceci n’est pas compatible avec une logique de communication interne où l’autorité d’une fonction s’exprime au nom de l’entreprise.
Naturellement, l’autorité associée à une fonction dans l’entreprise dépend de multiples facteurs, dont notamment la culture, la structure et surtout la taille de l’organisation. Dans une TPE tous les moyens sont bons tant qu’on s’entend, et le formalisme d’une communication interne institutionnelle ferait rire les collaborateurs (alors qu’on utilise des outils collaboratifs pour la gestion des projets, documents et savoirs). Nul besoin d’un intranet de communication « verticale » dans une TPE, nous sommes d’accord.
Dans une grande entreprise au contraire, les salariés s’attendent à ce que l’on s’adresse à eux avec certains égards, que les managers jouent le rôle de leur fonction, que l’entreprise se donne du mal pour s’assurer le soutien, la motivation voire l’identification des salariés – bref, dans l’entreprise à partir d’une certaine taille
, la communication interne institutionnelle fait partie du contrat, et l’intranet est un de ses piliers. Remplacer un intranet de communication par des outils collaboratifs peut faire croire aux salariés que l’entreprise ne leur parle plus, qu’elle est indifférente à leur opinion, leur approbation, leur attitude, qu’elle manque de leadership, voire pire, qu’il n’y a « pas de pilote dans l’avion ».

De son côté, la  communication interne institutionnelle n’exclut pas pour autant la possibilité pour les collaborateurs de donner leur avis et d’interroger la direction – dans un cadre institutionnel et bien défini. De la sorte, l’intranet de communication institutionnelle peut devenir tout à fait bi-directionnel, « 2.0 ».
Dans la plupart des cas, on voudra articuler et intégrer toutes les dimensions au sein d’un « portail » ou poste de travail virtuel. La mise en avant de tel ou tel élément relèvera de choix stratégiques, l’essentiel étant qu’à chaque moment l’utilisateur sache à quel type d’information il a affaire.