Ethique : quand l’industrie de la tech prend ses responsabilités

Jusqu’ici, les entreprises technologiques évaluaient leur performance en fonction de la croissance et du profit qu’elles généraient. Cependant, si l’innovation technologique a largement contribué à l’amélioration de notre qualité de vie et au progrès de notre société, elle a également engendré des conséquences négatives inattendues.

Un véritable "Techlash" a vu le jour ces derniers mois. L’industrie s’attire progressivement la méfiance du grand public, tandis que l’incapacité des individus à utiliser ces technologies de façon responsable est à l’origine de toujours plus de préoccupations.

Le rythme de l’innovation continue de s’accélérer et, avec lui, la possibilité de résoudre les plus grandes problématiques auxquelles notre époque est confrontée. Prenons l’exemple de deux technologies contemporaines et prometteuses : l’Internet des objets (IoT) et l’intelligence artificielle (IA). Alors que la production alimentaire actuelle suffirait à nourrir le monde entier, de nombreuses personnes continuent de souffrir de malnutrition. Or, l’IoT peut d’ores et déjà nous aider à limiter le gaspillage en améliorant le rendement des récoltes et leur stockage, et en réduisant la quantité de nourriture perdue. L’IA peut également transformer l’industrie mondiale de la santé en prédisant les résultats des traitements médicamenteux sur les individus, et en recommandant une approche extrêmement personnalisée auprès des patients susceptible de donner de meilleurs résultats.

Toutefois, certains objets connectés présentent des vulnérabilités laissant aux hackers la possibilité de les contrôler à distance. Lorsque l’on sait que les villes intelligentes sont équipées de milliers de capteurs, il est essentiel de sécuriser ces systèmes pour empêcher des cybercriminels de s’en emparer et de provoquer le désordre. Ils se servent d’ailleurs eux-mêmes de l’intelligence artificielle pour contourner les dispositifs de sécurité et faire des ravages sur Internet, provoquant des problèmes réels majeurs. Tout récemment, cette technologie a été utilisée pour imiter la voix d’un dirigeant d’entreprise afin d’inciter un de ses employés à transférer plus de 220 000 € sur un compte.

Le sujet de l’éthique est aussi crucial. Les technologies d’IA étant paramétrées par leurs développeurs, le risque que des préjugés inconscients non pris en compte ou mal gérés soient involontairement programmés dans ces outils est décuplé. C’est ainsi que des événements de discrimination raciale ou sexuelle par des logiciels ont éclaté dans le cadre de recrutements ou de demandes de prêt immobilier par exemple.

L’époque de l’autorégulation dans la tech serait-elle révolue ?

Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que de nombreuses personnes appellent à une régulation du secteur. Désormais, la réussite d’une entreprise ne peut et ne doit plus être jugée uniquement sous le prisme de la croissance et des profits. Son impact sur la société et l’environnement doit également être mesuré et contrôlé. Le secteur de la tech doit rendre des comptes.

Étonnamment, bon nombre d’entreprises du secteur partagent ce point de vue alors qu’elles ont tendance à s’opposer à une régulation accrue de leurs activités. Tim Cook, le CEO d’Apple, a ainsi appelé le gouvernement des États-Unis à intervenir pour assurer la protection des droits et le respect de la vie privée des utilisateurs, mettant en avant l’exemple du RGPD européen comme une pas dans la bonne direction. Mark Zuckerberg, le patron de Facebook, s’est lui aussi prononcé en faveur d’un renforcement des régulations sur quatre axes : les contenus préjudiciables, le respect de l’intégrité des élections, la confidentialité et la portabilité des données.

En cherchant à protéger la société des dangers, ces réglementations risquent bien entendu de freiner l’innovation et de mettre la liberté d’expression en péril. Mais malgré la complexité du problème, il est évident que nous aurons bientôt droit à davantage de régulation et de législations.

Les entreprises technologiques intelligentes adoptent une gouvernance de qualité

Et cela implique tout d’abord de remettre de l’ordre dans leurs pratiques. Si les acteurs technologiques font preuve d’un sens éthique, prennent leurs responsabilités et gèrent leur impact sur l’environnement et la société de façon proactive, ils sauront s’adapter quand les réglementations entreront en vigueur. Les entreprises doivent montrer à leurs actionnaires et à leurs investisseurs potentiels qu’elles intègrent tous ces changements à leurs stratégies et s’appliquent à produire un impact à long terme. Beaucoup d’entre elles sont déjà engagées dans cette voie.

L’alternative consisterait à continuer de placer les profits et la croissance à court terme au-dessus de tout, et de courir le risque d’être douloureusement mis au pied du mur au moment de l’entrée en vigueur de nouvelles législations et réglementations.

Prendre ses responsabilités et générer un impact mondial

Les nouvelles technologies ne sont ni bonnes, ni mauvaises, mais il faut s’en servir pour faire le bien, que de nouvelles réglementations soient introduites ou non. Les problématiques et questions qu’elles soulèvent sont indéniablement complexes et difficiles à résoudre. Pour y répondre pleinement, l’industrie toute entière doit changer ses modes de pensée, d’action, et d’interaction. Chaque entreprise du secteur doit amorcer ce changement, remettre de l’ordre dans ses pratiques, pour le bien de de la planète, et in fine pour son propre bien.