Pascal Rialland (SAP) "A titre personnel, je n'ai jamais eu de discussions tendues avec l'USF"

Le directeur général de SAP France fait le point sur les résultats financiers de sa société et évoque les raisons de la récente hausse des tarifs de la maintenance applicative.

Les prestations de maintenance applicative semblent plus que jamais apparaître comme l'un de vos principaux leviers de croissance : est-ce pour cette raison que vous avez décidé d'augmenter les tarifs de plus de 20% ?

Je ne pense pas que, dans notre annonce, il s'agisse seulement de la hausse de la maintenance. Ce que l'on a souhaité faire, c'est harmoniser les performances globales de maintenance et de support fournies à nos clients dans un contexte d'environnement applicatif de plus en plus complexe où les interactions avec d'autres briques applicatives non fournies par SAP sont de plus en plus nombreuses. Ce nouveau contrat de maintenance permet donc d'assurer un niveau de qualité de service optimum et existait d'ailleurs déjà sous la forme de Premium Support.

Ce que l'on a décidé de faire, c'est de généraliser à l'ensemble de nos clients un modèle de maintenance qui vient remplacer un précédent modèle qui n'avait d'ailleurs pas bougé depuis 10 ans. Cela étant, il ne s'agit pas d'une hausse sèche mais d'une montée progressive du coût de la maintenance sur 4 années. Lissée par année, la hausse s'établit à 8%, pour un taux final de +22% au bout de cette période.

"A la lumière des critiques, nous avons effectué des aménagements"

Lorsque nous avons annoncé la réorganisation de notre offre de maintenance, la première réaction a été de voir uniquement une augmentation des prix mais pas de la valeur ajoutée apportée à nos clients.

Cependant, à la lumière des critiques, nous avons effectué des aménagements comme par exemple offrir une durée de maintenance plus longue, garantie sur une durée de 9 ans, soit jusqu'en 2017. Ensuite nous nous sommes engagés à fournir sans supplément de coût dans l'offre Enterprise Support plusieurs jours gratuits de conseil en architecture par nos consultants.

Comment qualifieriez-vous vos relations avec l'USF, le club des utilisateurs SAP francophones ?

A titre personnel, je n'ai jamais eu de discussions tendues avec l'USF et nos relations ont toujours été fondées sur la base du professionnalisme, avec pour objectif d'accroître la proposition de valeur à nos clients.

Les revenus issus de votre activité ASP/SaaS semblent pour le moment limités à la portion congrue de votre chiffre d'affaires : prévoyez-vous à terme un retournement de tendance ?

Notre activité ASP, avec Business ByDesign, devrait connaître d'une année sur l'autre une croissance de l'ordre de 30%, pour un total de 4 millions d'euros en 2008, dont la moitié sur les grands comptes. Nous sommes conscients que cela ne représente pas beaucoup en volume, mais les perspectives de croissance sont celles que nous espérions.

"Nous comptons donner un coup d'accélérateur à notre activité ASP"

Nous comptons donc donner un coup d'accélérateur à notre activité ASP car ce qui nous intéresse, c'est de piloter les ambitions du marché et offrir aux entreprises la seule offre réellement crédible en matière d'ERP en mode ASP.

Comment positionnez-vous Business ByDesign dans votre gamme progicielle ?

Business ByDesign est très complémentaire de nos deux autres offres SAP Business All-In-One et SAP Business One, en proposant une alternative intéressante tant d'un point de vue économique que fonctionnel et technique. Par ailleurs, nous sommes convaincus que les services proposés par Business ByDesign peuvent aussi aider des entreprises plus importantes dans le déploiement dans certains départements ou filiales, ce qui est complètement cohérent avec la stratégie SOA de SAP.

Cela étant, l'ASP demeure une source de revenus complémentaire et nous ne comptons pas à terme dégager la majeure partie de nos revenus de cette activité.

Pensez-vous revoir à la baisse vos ambitions dans l'ASP/SaaS ?

Lorsque nous avons lancé notre filiale SAP Hosting, nous tenions à maîtriser de bout en bout l'ensemble des paramètres liés à la commercialisation d'une offre complètement accessible en ligne, BusinessByDesign. Car la plus belle application du monde n'est rien sans une infrastructure suffisamment performante pour la soutenir.

Mais notre métier, c'est d'abord de développer des applications et non de faire de l'hébergement. C'est pourquoi nous sommes ouverts, à terme, sous réserve de trouver les partenaires garantissant le niveau de qualité de service que l'on aura défini, pour déléguer cette fonction d'hébergement. Cela fait partie des scenarios possibles de décisions à terme.

Compte tenu de résultats trimestriels en deçà des attentes, quels sont vos objectifs pour l'exercice en cours ?

"Un certain nombre de contrats, principalement ceux des grandes entreprises, ont été décalés dans le temps"

Effectivement, nous avons publié des résultats financiers pour notre troisième trimestre en deçà des attentes du marché. Cela s'explique notamment par notre modèle de business où l'essentiel des signatures de nos gros contrats s'effectuent en fin d'année.

Et malheureusement, la bulle a véritablement éclaté en septembre, ce qui ne correspondait pas à la meilleure période pour nous, où un certain nombre de contrats, principalement ceux des grandes entreprises, ont été décalés dans le temps.

Nous n'avons pas non plus souhaité fixer des prévisions de croissance en raison d'un trop fort degré d'incertitude en termes d'activité sur l'économie globale. Mais aujourd'hui, nous disposons d'une bien meilleure visibilité sur ce qui se passe et sur la manière dont les différents secteurs vont pouvoir bénéficier des plans de relance au niveau macroéconomique.

Et pour le prochain exercice 2009/2010 ?

Il est encore un peu tôt pour donner des prévisions. Par contre, je considère que l'activité de SAP en France est en ordre de marche pour bien fonctionner. Nous comptons gérer l'activité avec sérénité en nous appuyant sur les secteurs où la demande en termes de solutions est la plus dynamique.

Ce sera tout particulièrement le cas du secteur public, poussé par une transformation majeure en termes de modernisation, comme c'est le cas pour le pilotage économique à Bercy, la réforme de la santé aux Hôpitaux de Paris, la mutualisation des ressources des universités ou encore l'appel d'offres en cours autour de la mise en place d'un opérateur national de paye.

"Le secteur public va donc drainer une partie significative de nos revenus en 2009"

Le secteur public va donc drainer une partie significative de nos revenus en 2009 mais ce ne sera pas le seul. Le secteur de la distribution sera également un segment très demandeur de nos solutions, notamment dans le domaine de la qualité du pilotage financier, du calcul des marges et de l'ABC. Pour ce qui concerne les autres secteurs, on ne peut pas tout mettre dans un même panier.

Dans l'automobile, par exemple, il existe un certain nombre de projets en phase de finalisation qui vont permettre de dégager du business, alors que dans certains cas, nous allons devoir accélérer le processus de mise en œuvre des projets afin de générer des gains financiers en réduisant les coûts. Pour y parvenir, on pourra envisager de libérer des ressources métiers pour les réaffecter sur ces projets et gagner ainsi en réactivité.

Quels leviers opérationnels et stratégiques comptez-vous actionner pour doper vos revenus ?

Nous allons nous focaliser, dans chaque pays, sur les secteurs qui permettront de drainer un maximum de croissance. En France, il s'agit donc du secteur public, mais également du secteur des banques et des assurances qui, même s'il traverse une période difficile, conserve d'ambitieux projets de transformation. A ce titre, le rachat de BO nous a ouvert des portes qui nous étaient par ailleurs un peu fermées, précisément dans le secteur financier où nous n'étions que modestement présents.

Ensuite, nous ne comptons pas non plus oublier les pays émergents, en Asie-Pacifique, mais également en Russie, où il y a de quoi faire du business. Enfin, nous comptons accroître notre présence sur le marché des PME, aussi bien dans les pays matures que ceux qui le sont moins, et tout particulièrement en France.

Pensez-vous que le plus gros de la crise économique est derrière vous ?

"La plupart des entreprises sont entrées en phase de resserrement budgétaire"

On est passé très près d'une période de panique, où l'on aurait risqué de voir tomber par terre 25% de l'économie mondiale, à une phase de décroissance et de ralentissement, certes très marquée, mais aujourd'hui semble-t-il maîtrisée par la mise en place de mécanismes de protection de l'activité.

Bien sûr, cela ne protégera pas de l'élévation de la montée du chômage ou de la hausse de l'endettement. Mais si on touche du bois, on a échappé à la catastrophe. En 2009, nous prévoyons en ce qui concerne notre activité une stagnation, voire une légère croissance, mais on sait que ce sera difficile. Mais nous n'avons d'ailleurs jamais caché l'impact négatif que la crise a pu avoir sur la vente de nos licences.

Ne craigniez-vous pas que la crise économique oblige les entreprises à tailler dans leurs dépenses de licences logicielles et vous contraigne à réduire la voilure ?

Nous sentons que la plupart des entreprises sont entrées en phase de resserrement budgétaire et de leurs coûts opérationnels. Notre posture, qui s'inscrit dans l'ADN de SAP, c'est de les aider à contrôler leur budget en leur proposant des solutions qui leur permettent d'optimiser et de réduire le plus efficacement possible leurs coûts.

En cela, la finalisation du rachat de BO en février dernier a permis de leur donner une meilleure visibilité sur les offres stratégiques. Ce rapprochement a été effectué sans avoir à passer par une perte de collaborateurs. Mais nous restons réalistes sur l'activité en cours et c'est pourquoi nous avons pris la décision de geler le processus d'embauches en attendant que la situation économique s'améliore. Ensuite, tout dépend de notre performance.

Pascal Rialland est directeur général France de SAP.