Le cloud français Platform.sh lève 140 millions de dollars

Le cloud français Platform.sh lève 140 millions de dollars Le groupe de Frédéric Plais entend propulser son tout nouveau produit : FleetOps. Une digital factory taillée pour industrialiser jusqu'à plusieurs milliers de sites web en mode NoOps.

La plateforme cloud parisienne Platform.sh boucle un nouveau tour de table à hauteur de 140 millions de dollars. Une série D dont il convient de saluer le montant compte tenu d'un contexte qui ne cesse de s'assombrir sur le terrain du capital risque. L'opération est menée auprès de trois fonds : le français Revaia, l'allemand Digital+ Partners et l'américain Morgan Stanley. Elle porte à 180 millions de dollars le total des investissements privés glanés par la société depuis sa création en 2014. Le nouvel apport a pour vocation d'assoir FleetOps, une digital factory clé en main basée sur le PaaS de l'éditeur.

On ne présente plus Platform.sh. Son point fort demeure le même depuis ses débuts : pouvoir créer à la volée, grâce à un socle de containers logiciels, des environnements de pré-production identiques à la pile applicative déployée, à l'octet près. Via ce mécanisme de clonage, il est possible de lancer autant de projets d'évolution que nécessaire en parallèle, avec leur stack de test et de recette, tout en ayant la garantie d'un rendu rigoureusement identique lors de la mise en ligne. Le cas échéant, l'environnement permet à tout moment de revenir à la version précédente.

9 régions multicloud

Python, PHP, Java, Go, Ruby... Platform.sh prend en charge les langages de programmation parmi les plus utilisés. Idem pour les frameworks, avec le support de Symfony, Laravel, Spring, Node.js, React ou Angular. Côté CMS, des templates WordPress, Drupal, Typo3, eZ Platform et Strapi sont proposés. "Nous offrons un environnement très étendu", reconnait Frédéric Plais, CEO et cofondateur de Platform.sh. "L'un de nos principaux défis désormais est de nous faire connaitre auprès des communautés de développeurs au-delà des communautés PHP et Python qui sont nos technologies d'origine."

Les trois cofondateurs de Platform.sh, de gauche à droite : Ori Pekelman (chief strategy officer), Frédéric Plais (CEO) et Damien Tournoud (CTO). © Platform.sh

Aux côtés de son mode NoOps, Platform.sh propose une console d'observabilité basée sur la technologie issue du rachat de Blackfire début 2021. Une console conçue pour analyser la performance des applications PHP, Python ou Go. En phase de test, son profileur évalue le temps d'exécution des scripts ainsi que la consommation mémoire et réseau. Le tout en continu. Il identifie les goulots d'étranglement dans les transactions et appels de service : SQL, HTTP, files d'attente... Enfin, il recommande des solutions sur la base d'une IA. De quoi outiller une démarche de perf by design. En aval, un outil d'APM (pour application performance monitoring) mesure les temps de réponse et le niveau de sollicitation des ressources IT une fois l'application déployée.

Sur cette base, Platform.sh est parvenu à convaincre Adobe d'héberger sur son PaaS la déclinaison cloud de Magento (Magento Commerce). Idem avec Ibexa DXP et son CMS eZ Platform. Dans la même perspective, Platform.sh vient de signer un partenariat avec Shopware, le Magento allemand.

Dernier né des services de Platform.sh : FleetOps. Reposant sur la plateforme historique du Français, il bénéficie de tous ses avantages. Y compris de son hébergement multicloud. Réparti sur neuf régions cloud à travers le monde, Platform tourne à la fois sur AWS, Microsoft Azure, Google Cloud, Orange Flexible Cloud et OVHCloud. La philosophie de FleetOps ? "Un grand groupe peut avoir 100, 200 sites souvent hébergés et gérés de manière disparate. Avec cette offre, nous leur proposons de les regrouper sur une plateforme à l'état de l'art en termes de sécurité, avec un contrôle d'accès et une gestion fine de la localisation des données, sans oublier une visibilité globale sur l'ensemble de la flotte de sites ou d'applications web", explique Frédéric Plais.

"Une fois une montée de version réalisée sur un site web, FleetOps pourra la répliquer automatiquement sur 10, 100, 1 000, 2 000 autres sites"

La marque de fabrique de FleetOps ? Industrialiser la maintenance applicative. "Une fois une montée de version réalisée sur un site web, FleetOps pourra la répliquer automatiquement sur 10, 100, 1 000, 2 000 autres sites, quels que soient le langage, le CMS et autres frameworks utilisés", illustre Frédéric Plais. Résultats : des gains de temps significatifs accompagnés d'économies d'échelle du fait de la consolidation des projets chez un provider unique. "FleetOps a nourri notre croissance ces trois dernières années. Cette solution nous a permis de remporter des comptes de plus en plus importants, comme Nestlé, Pinterest ou Unity Technologies. Nos clients s'adossent à FleetOps pour gérer d'une dizaine de sites jusqu'à plusieurs milliers", commente Frédéric Plais.

Platform.sh compte 350 clients ayant opté pour FleetOps. Aux côtés de ces organisations, la société parisienne revendique 400 agences partenaires qui recourent à l'outil pour opérer les sites web de leurs clients.

L'enjeu du green IT

Suite à sa série D, Platform.sh entend à la fois renforcer ses équipes commerciales et marketing, mais également poursuivre ses développements produits. "Nous souhaitons renforcer notre présence dans les communautés de développeurs en proposant pour chacune les bons points d'entrée vers notre technologie, avec les bons exemples et les bons templates pour démarrer", souligne Frédéric Plais. Côté R&D, la société compte renforcer sa brique d'observabilité. Objectif : donner aux clients une meilleure visibilité sur la consommation de leur infrastructure et leur permettre d'ajuster plus finement la taille de leur container logiciel. Autre chantier de R&D prioritaire : l'edge computing, du CDN à la sécurité anti-DDoS.

Enfin, le cloud français prévoit d'intensifier ses investissements dans l'informatique verte. "Le green IT passe par l'observabilité et l'optimisation des performances intrinsèques des applications. Mais aussi par la densité de ressources IT que nous offrons. A performance égale, elle est 12 fois supérieure à celle de Kubernetes sur serveur dédié", argue Frédéric Plais. Dans la même logique, l'éditeur espère à terme pouvoir comparer l'emprunte carbone des data centers des clouds providers sur lesquels son PaaS est hébergé. "Elle dépend notamment du réseau électrique du pays où ils sont localisés. Par exemple un centre de données allemand dépend à 80% de centrales au gaz et au charbon. Ce qui conduit à un taux d'émission de CO2 moyen de 556 grammes par KWh, contre 60 grammes pour la France", constate le CEO de Platform.sh. Reste un enjeu de taille pour Platform.sh en vue de produire des tableaux de bord green complet : convaincre les cloud providers de lui transmettre des données et indicateurs comparables.

Fort d'un effectif de 350 salariés, Platform.sh a pour ambition de passer à 450 personnes d'ici la fin de l'année, puis à 600 collaborateurs d'ici fin 2023. En termes RH, la société mise sur un télétravail à 100%, et se limite à un bureau unique, basé à Paris. Avec plus de 50% de croissance par an, Platform.sh a franchi la barre symbolique des 40 millions de dollars de chiffre d'affaires en 2021. L'Amérique du Nord représente la majorité de son activité, devant l'Europe, avec en tête l'Allemagne, le Royaume-Unis et la France.