Isabelle Bordry (Retency) "Nous permettons aux magasins d'optimiser leurs flux et d'améliorer l'expérience utilisateur"

En créant des analytics pour les commerces, Retency leur donne les clés pour perfectionner leur organisation et cibler les visiteurs de façon non-intrusive.

JDN. Que propose Retency aux magasins ?

Isabelle Bordry, cofondatrice et PDG de Retency © S. de P. Retency

Isabelle Bordry. Les magasins ont bâti leur fonctionnement sur les notions de chiffre d'affaires et de clients. Contrairement à Internet où, les taux de conversion étant très bas, on a toujours travaillé sur les visiteurs. Sauf qu'aujourd'hui, les standards de la relation client sont drivés par le Web. Or ils y sont très élevés, que l'on parle des retours produits, de la personnalisation des recommandations… Cela représente un vrai défi pour les magasins. D'autre part, de même que la consommation de médias est passée de grands rendez-vous à un usage à la demande, les grands rendez-vous courses vont s'étioler. On se rendra toujours en centre commercial mais pas toujours par nécessité. La notion de visiteurs va donc devenir de plus en plus importante dans la distribution physique.

En récupérant des informations sur ce qui se passe entre l'entrée du magasin et les caisses, Retency permet aux enseignes de mieux appréhender cette notion. Cela a l'air basique quand on vient du Web, mais des KPI comme la durée moyenne de visite ou le repeat business, qui n'existe que dans l'alimentaire avec les encartés, sont très nouveaux pour les magasins. Les analyser permet d'optimiser les flux et d'améliorer l'expérience utilisateur. Par exemple en réorganisant l'agencement du magasin ou la répartition des vendeurs. Ou en poussant les produits qui vont être achetés. Ou en rendant le passage en caisse plus fluide. Mais pas en disant aux gens d'aller à la caisse 12 : en faisant en sorte que lorsque le client arrive, une caisse soit libre, parce que 10 minutes avant on a anticipé qu'il faudrait en ouvrir deux de plus.

Pour quelles enseignes travaillez-vous en France ?

Nous avons une grosse trentaine d'enseignes clientes. Leroy Merlin utilise notre solution pour analyser les flux de visiteurs dans plusieurs de ses magasins et optimiser l'organisation de ses équipes. Marionnaud également. Nous faisons beaucoup de choses pour C&A depuis quelques mois, aussi bien sur l'analyse des flux en magasin qu'en matière de publicité mobile. Nous travaillons également avec des centres commerciaux comme Wereldhave et Klépierre. L'analyse de flux les intéresse d'autant plus qu'ils n'avaient rien de semblable auparavant, mais avec Klépierre nous faisons aussi de la pub mobile, et nous diffusons des campagnes sur de grands écrans pour les peintures Tollens. Tous clients confondus, nous comptons actuellement 1 500 boîtiers actifs en France.

"Des KPI comme la durée moyenne de visite ou le repeat business sont très nouveaux pour les magasins"

En quoi consiste votre technologie ?

Nous avons développé nos propres boîtiers, sur lesquels on peut détecter et brancher ce qu'on veut : radiofréquences, RFID, caméras, capteurs GPS associés à des émetteurs sur les chariots de courses pour en suivre les mouvements en temps réel… La solution est agile, agnostique, sans barrière à l'entrée pour le magasin dont elle ne perturbe pas les systèmes existants. Très simple, le déploiement est le plus souvent réalisé par les équipes des enseignes. Il n'y a qu'à brancher les boîtiers sur le secteur. En une heure et demie, vous couvrez 6 000 ou 7 000 mètres carrés. Les caméras, plus longues à installer, ne sont déployées que pour des besoins très spécifiques.

Sous quelle forme les données sont-elles remontées ?

Un back-office semblable à celui de Google Analytics permet de visualiser les KPI à J+1, mais nous savons aussi envoyer les informations dans les tableaux de bord de nos clients. Pour l'organisation des équipes, les informations sont envoyées en temps réel vers l'écran du manager ou les tablettes vendeurs avec une signalétique très simple, des voyants rouges et verts, pour une prise en compte immédiate. Pour que nos outils soient efficaces sur le terrain, nous travaillons main dans la main avec les enseignes pour comprendre leurs besoins. Ensuite, un mois de développement suffit.

Vous proposez aussi une solution de ciblage en magasin qui s'appuie sur vos boîtiers…

Contrairement aux solutions américaines d'analytics in-store comme RetailNext, qui se bornent à tracker les données à des fins de merchandising, d'organisation des équipes et de surveillance des vendeurs, nous assurons aussi l'articulation avec le marketing. Dans l'e-commerce, on déploie beaucoup d'efforts pour fluidifier le parcours d'achat et réduire les étapes du tunnel en apportant l'information au visiteur. En boutique aussi, l'information doit venir à lui. Mais le smartphone ne nous semble pas le bon vecteur pour cela, c'est trop intrusif. Nous avons donc imaginé un autre dispositif basé sur des devices en magasin.

"Pour les visiteurs, la technologie s'oublie, tout est naturel"

A quels scénarios répond-il ?

Le visiteur entre dans le magasin muni d'une carte de fidélité RFID ou de son mobile en opt-in, qu'il laisse l'un comme l'autre au fond de son sac. Nos boîtiers le repèrent et poussent sur la tablette vendeur son profil ou les suggestions du moteur de recommandation du site marchand : nous faisons le lien avec le CRM.

Nous apportons aussi des capacités de ciblage à des écrans de proximité. Un boîtier sait qu'autour de lui, tant de personnes sont intéressées par tel type de produits, ou que 25% étaient déjà là samedi dernier ? L'intelligence marketing prend le relais et pousse la bonne campagne sur l'écran auquel il est raccordé. De façon similaire à Amazon qui, sachant que les visiteurs du rayon peinture enchaînent souvent sur le rayon cuisine, poussera alors le rayon cuisine. Cela nécessite aussi de savoir ce qu'on a en stock. Ensuite, plus on dispose de données, plus on est intelligent. Pour les visiteurs, la technologie s'oublie, tout est naturel. Et même s'ils n'achètent pas immédiatement, ils achèteront peut-être plus tard sur leur mobile ou chez eux.

Vous dites accompagner C&A et Klépierre en matière de publicité mobile. Que faites-vous exactement ?

Nous travaillons avec les régies publicitaires mobiles MobValue et Mobile Network Group pour mesurer l'efficacité des campagnes de géolocalisation. Lorsque l'annonceur est notre client, nous savons dire en fin de campagne que tant d'ID mobiles parmi ceux indiqués par ces régies sont passés dans ses points de vente. Nous déclinons d'ailleurs cette possibilité pour les médias offline. Et à l'inverse, si les utilisateurs ont accepté d'être géolocalisés, nous savons s'ils sont entrés en boutique et pouvons proposer à MobValue et Mobile Network Group de les recibler.

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