Hugues Pelletier (Ooshop) "Ooshop met au point un modèle de livraison plus adapté aux centres-villes"

Le cybermarché de Carrefour utilise une plateforme d'éclatement des commandes au centre de Lyon pour livrer cette zone avec des petits véhicules électriques, explique son directeur.

JDN. Ooshop adopte actuellement une organisation différente pour ses livraisons dans le centre de Lyon. Quelle est votre intention et comment procédez-vous ?

pelletier 275
Hugues Pelletier, directeur d'Ooshop © S. de P. Ooshop

Hugues Pelletier. Pour Ooshop, la livraison constitue un enjeu essentiel. C'est notre seul point de contact physique avec nos clients, c'est un domaine d'innovation important et c'est notre deuxième poste de coûts après les marchandises. Nous avions déjà réalisé un premier test fluvial à Paris mi-2014, mais ce que nous mettons en place à Lyon sera pérenne. Cela tourne depuis un mois et l'inauguration officielle est prévue pour juin.

Dans cette ville, nos clients sont souvent des femmes actives habitant au centre de la ville, sur la presqu'île et dans le vieux Lyon, qui sont des zones difficiles d'accès pour nos camionnettes. Dans le cadre de notre participation au cluster Logistique Urbaine Rhône-Alpes, nous avons identifié l'Espace Logistique Urbain des Cordeliers, mis à disposition par le Grand Lyon et hébergé par Lyon Parc Auto. Un emplacement stratégique au cœur de la presqu'île, où le prestataire de transport Deret était présent depuis deux ans. C'est sur cet ELU que nous nous appuyons désormais pour livrer les commandes des 1er et 2ème arrondissements de Lyon, c'est-à-dire la presqu'île, et le bas du 5ème arrondissement, le vieux Lyon. Ceci du lundi au samedi de 8h à 22h sur des créneaux d'une à deux heures, celui de 7h à 8h restant assuré par nos camionnettes classiques en direct depuis notre entrepôt de Vénissieux.

Concrètement, quel trajet empruntent les commandes qui transitent par l'ELU ?

Elles sont préparées en amont à Vénissieux. Un camion de Deret passe les prendre et les transporte jusqu'à l'ELU. Ces trajets sont effectués en horaires décalés et dans des véhicules hybrides, en mutualisant les colis avec les clients BtoB de Deret. Ceci est vrai pour la marchandise sèche, le gros du volume. Quant au frais et au congelé, ils sont déposés à l'ELU par nos propres camionnettes. Ensuite, les commandes sont dispatchées au sein de l'ELU, qui sert de plateforme d'éclatement.

Puis deux véhicules électriques - opérés par Commagnac Distribution mais qui disposeront bientôt d'un marquage Ooshop - livrent les acheteurs au cours de tournées "marguerites". Plutôt que de livrer toutes les commandes en une seule tournée avec une grosse camionnette, rester à une distance très proche de l'ELU permet de réaliser des bouclettes de 4 à 6 livraisons seulement. En l'occurrence, nous testons le Mooville du Français Muses, qui peut contenir jusqu'à 37 bacs soit à peu près 6 commandes, ainsi que le Nissan E-NV200, qui contient jusqu'à 24 bacs soit 4 commandes environ. Les livreurs nous diront à l'usage leur sentiment sur ces deux véhicules. C'est du test&learn !

"Cette organisation peut assurer jusqu'à 60 livraisons par jour"

Quelle volumétrie cette organisation vous permet-elle d'assurer ?

Jusqu'à 60 livraisons par jour sur un rayon de 2km autour de l'ELU, soit 6 000 colis par mois ou 90 tonnes de marchandises.

Un des points forts de cette nouvelle approche est que ces véhicules, beaucoup plus petits, circulent et se garent beaucoup plus facilement que nos grosses camionnettes. Donc on gagne du temps, l'impact sur la circulation est plus limité et pour préserver l'environnement, les véhicules sont électriques. Ils sont en outre réfrigérés et contiennent un bac spécial pour le congelé. Nous livrons donc en trois températures.

Projetez-vous déjà d'étendre ce fonctionnement au-delà de Lyon ?

Tout à fait. Si le retour d'expérience est positif, nous déploierons ce modèle de livraison sur d'autres zones géographiques. A commencer par Paris, ce qui s'accordera très bien avec le plan antipollution d'Anne Hidalgo voté début février.

En quoi consistait votre expérimentation parisienne de l'été dernier et comptez-vous la réitérer ?

Elle a duré 15 jours en juillet 2014 et s'est pour sa part déroulée dans le cadre du cluster de logistique urbaine de la chambre de commerce de Paris Ile-de-France, avec une dizaine d'entreprises partenaires. Nous préparions les commandes dans notre stock de Villeneuve-la-Garenne, les placions dans des containers spécifiques, modulaires et partageables avec d'autres acteurs, que des camions emportaient jusqu'à une péniche accostée à Gennevilliers. Toujours en trois températures, la péniche transportait les commandes jusqu'au port du Gros Caillou, près du Pont de l'Alma, où nous les déchargions et les livrions dans le 7ème arrondissement de Paris, là-encore avec des véhicules Muses.

Nous avons beaucoup appris durant ce premier test, notamment en matière de mutualisation des véhicules électriques ou de rupture de charge. Il est encore trop tôt pour pérenniser ce système de livraison mais nous ne voulons pas nous arrêter là. Nous allons donc réaliser d'autres tests de même nature.

Hugues Pelletier est le directeur d'Ooshop.com. Ingénieur diplômé de l'Ecam Lyon et titulaire d'un MBA de HEC, il débute sa carrière chez MPO Compact Disc en 1996 avant de rejoindre Cap Gemini Ernst&Young en tant que consultant stratégie et transformation. En 2002 il est nommé product delivery manager chez Covisint puis, en 2003, account manager chez GNX. Il intègre Carrefour en 2004 en tant que manager e-sourcing et devient en 2007 directeur du centre de compétences BtoB/BtoC du groupe. En 2009 il prend la fonction de directeur projets & process multicanaux. Depuis 2010, il est le directeur d'Ooshop.com, le cybermarché de Carrefour.