Charles-Henri Leroy (Hermès) Charles-Henri Leroy (Hermès) : "Le e-commerce chez Hermès est basé sur la notion de service client"

Le groupe Hermès accelère la cadence de ses lancements dans le e-commerce en Europe. Analyse de la stratégie Internet du groupe avec le directeur des relations clients.

 

Depuis combien de temps Hermès est-il présent sur la Toile ?

La maison Hermès est allée à contre-courant de tout le monde sur ce terrain, car elle a entamé sa présence sur Internet par une boutique e-commerce, et non par un site institutionnel. En 2002 en effet, un site de vente a été lancé aux Etats-Unis. C'était la première boutique mono marque de luxe à ouvrir pignon sur Toile. Au début, n'y étaient vendus que les produits en soie - les fameux carrés, des cravates - et les parfums. L'objectif était alors, dans un pays précurseur en termes d'Internet et d'e-commerce, que les clients puissent s'y procurer les produits qu'ils achètent fréquemment, sans se déplacer. A l'époque, nous n'avions qu'une dizaine de magasins aux Etats-Unis. Notre dessein était également que les personnes qui n'osent pas y entrer, aient l'occasion de découvrir la marque et poussent à terme la porte d'une boutique. En 2004, nous avons augmenté notre offre en ajoutant les produits de la maison, les cadeaux de naissance et la bijouterie accessoires (qui ne comprend que des éléments).

Quand avez-vous ouvert en Europe ?

La deuxième boutique en ligne a été ouverte fin 2005, en France. Puis sont venus l'Allemagne et le Royaume-Uni, en 2007. Parallèlement, nous avons encore accru notre offre de produits en soie, en ajoutant les châles et les losanges, et rendu accessibles l'intégralité de notre collection en mousseline, ainsi que la bijouterie argent. Outre-Atlantique, les montres et la bagagerie ont aussi été commercialisés en ligne. Ensuite ce fut le tour des objets en cuir, de l'art de la table, des cadeaux etc.

L'ouverture d'autres boutiques en ligne est-elle prévue ?

Une version pour la Suisse a été lancée il y a un peu plus d'un mois. Le Benelux et la Hollande sont prévus pour le mois prochain. D'autres encore sont programmés d'ici la fin de l'année.

Et du côté de l'offre ?

Nous allons continuer d'en augmenter le champ en intégrant de nouveaux départements de produits.

Quels sont vos objectifs ?

Le développement de l'e-commerce chez Hermès est, depuis toujours, basé sur la notion de service client. Avant toute chose, nous souhaitons donc apporter un vrai service, plutôt que de créer une nouvelle source de business. C'est pourquoi nous avons mis beaucoup de soin à l'organisation du site et à l'efficacité de la chaîne logistique, en prêtant une attention particulière à l'emballage, à la livraison - possible en 3 heures dans Paris, mais aussi à l'échange des produits et à leur personnalisation (initiales frappés sur un agenda en cuir par exemple). Plus globalement, notre stratégie est d'abord de donner à tous la possibilité de se procurer nos produis, puis de l'étendre géographiquement, et enfin d'augmenter la profondeur de l'offre.

Il y a-t-il des synergies avec vos boutiques physiques ?

Bien sûr. Les internautes achètent en ligne, mais vont souvent voir les produits en magasin, pour s'assurer que c'est bien la bonne couleur ou la bon rendu de matière. Parfois même, une fois s'être assurés que c'était bien le modèle désiré, ils retournent l'acheter sur Internet.

Quels chiffres d'affaires sont réalisés en ligne ?

Aux Etats-Unis, il correspond à un très gros magasin et sa croissance est en accélération. C'est même le deuxième point de vente en ce qui concerne la soie et les parfums. En Europe, la boutique en ligne est l'équivalent d'un magasin assez 'conséquent'. Après deux ans et demi d'existence, nous considérons que le site e-commerce y fonctionne très bien et sa croissance est exponentielle. Pour ce qui est des marchés allemand, suisse et anglais, c'est un peu tôt pour juger, mais les premiers résultats sont d'ores et déjà très satisfaisants. Nous n'avons, de toutes les manières, pas d'objectifs chiffrés, si ce n'est celui d'êtres profitables.

Pour vos prochaines ouvertures, privilégierez-vous les pays où vous êtes déjà bien implantés physiquement ou, au contraire, les pays où votre présence est moins dense ?

Les deux ! Dans la mesure où nous avons décidé d'accélérer l'ouverture d'e-boutiques, nous faisons un peu tout en parallèle. Il faut néanmoins que la technologie suive, c'est pourquoi nous allons à notre rythme. Par ailleurs, comme nous voulons que le site marchand soit toujours dans la langue du pays, cela nécessite du temps.

Vos sites marchands font-ils aussi office de sites institutionnels ?

Il est vrai qu'Hermès communique principalement au travers de ses produits, mais il était aussi important pour la marque de se raconter d'avantage. Nous avons donc lancé la partie institutionnelle d'Hermes.com il y a deux mois et demi. C'est une sorte de webzine multiculturel qui présente l'ensemble des valeurs de la maison. L'internaute peut surfer dans l'univers de la marque, tout en retrouvant les fonctionnements de la Toile : zoomer, zapper d'une thématique à l'autre, utiliser un moteur de recherche, visionner des vidéos etc., sans parler de l'aspect participatif qui y est proposé. Il est, en effet, possible d'envoyer des photos ou de raconter des histoires en rapport avec la marque. C'est un site léger, poétique et ludique. Il est actuellement disponible en deux langues, mais d'ici septembre, il le sera en six langues, dont le japonais et le chinois.

 Parcours

Charles-Henri Leroy travaille chez Hermès depuis douze ans. Il a d'abord été chef de zone aux Etats-Unis, puis directeur de la filiale anglaise du groupe avant de prendre ses fonctions, il y a un an, de directeur des relations clients. Auparavant, il a été directeur marketing dans la grande distribution. Charles-Henri Leroy est diplômé de l'université Paris IX Dauphine et de l'Insead.