La crise du milieu et la fin du CSP

La première crise de l'ère digitale provoque une fragmentation des comportements des consommateurs qui signifie la mort de la notion de CSP tel qu'elle a existé jusqu'à aujourd'hui.

Un des effets reconnus de la Révolution Digitale est une fragmentation forte des comportements consommateurs. Avec un accès libre à l'information, la multiplication des offres et des canaux de distribution et la capacité à comparer les prix, les consommateurs sont devenus experts dans la gestion de leurs priorités en termes de dépenses.

 

Ainsi, un même consommateur sera dans les "gros consommateurs" dans certaines catégories tout en profitant d'offres dites "Low Cost" dans d'autres. Prendre un vol à bas prix pour un week end dans un 6 Etoiles Luxe ou garer sa BMW sur le parking de Gigastore sont des comportements consommateurs aujourd'hui communs. Cette gestion individuelle du pouvoir d'achat engendre une polarisation des marchés, avec comme conséquence une position très inconfortable pour le milieu de gamme. Dès 2005, Mc Kinsey analysait le phénomène (sans pour autant le relier au Digital) dans son étude "The Vanishing Middle Market".

 

Alors que le pouvoir d'achat des consommateurs est sous pression et que se profile une récession élargie, ce phénomène ne va que s'amplifier. La difficulté pour les directeurs marketing est le côté insaisissable du phénomène si on n'utilise que les outils et concepts "traditionnels" du marketing. En effet, cette fragmentation des comportements signifie en fait la mort du CSP tel qu'il a existé jusqu'à aujourd'hui.

Le fait qu'un même consommateur puisse être considéré CSP+ pour certaines catégories et CSP- pour d'autres produits et services signifie de facto l'obsolescence du CSP comme outil de travail pertinent. C'est donc une approche plus fine, par catégorie et par groupe de consommateurs qui doit prendre le relais, avec comme objectif l'appréhension du consommateur par catégorie, et non par consommateur toutes catégories confondues.

 

Cette crise du milieu pose des questions stratégiques pour l'ensemble des marques qui se sont positionnées historiquement sur le "meilleur rapport qualité/prix", sans pour autant être ni dans la fourchette haute et aspirationelle, ni dans la position du meilleur prix. Les réponses sont ici encore dans une approche plus fine du consommateur, et pas nécessairement dans une refonte de l'offre et du prix dans son intégralité.

Il s'agit dès lors de mieux cibler et de présenter la bonne offre à la bonne cible. Pour certains consommateurs, l'offre de milieu de gamme pourra ressembler fortement au bas prix alors que pour d'autres elle sera plutôt haut de gamme. L'enjeu principal porte donc sur la capacité à sortir du message moyen délivré en masse à des CSP moyens. Et c'est dans cette perspective que le Digital peut jouer un rôle déterminant, dans sa capacité unique à apporter le bon message au bon moment aux bons consommateurs. C'est le facteur nouveau de la récession qui s'annonce : les annonceurs ont dans l'exploitation massive et déterminée du Digital une solution efficace alternative à couper leurs investissements en croisant les doigts.

 

La crise qui se présente devant nous est une crise de confiance qui touche l'ensemble des catégories de consommateurs. Cette crise va nécessairement impliquer une plus forte attention des consommateurs à leurs dépenses, et donc renforcer encore la polarisation des comportements. La survie (voire la croissance) des budgets marketing en temps de crise dépend exclusivement de l'efficacité de l'Euro investi. Et chaque Euro mis dans le marché du milieu sur base de CSP traditionnels sera sans aucun doute gaspillé.