Vendre en ligne vers l'Allemagne et l'Espagne

L'Europe représente le plus grand marché du commerce de détail. Pourtant, les échanges transfrontaliers ne sont pas encore très développés : seul un consommateur européen sur trois prévoit de réaliser un achat dans un autre pays de l'Union ! Si vous êtes e-commerçant, comment exploiter les possibilités de ventes vers l'Allemagne et l'Espagne ?

A l'Echangeur PME de la CCI de Paris se tenait le 9 novembre un séminaire passionnant en présence d'experts éminents et des témoignages d'Ulric Jérome (Pixmania) et d'Hervé Bourdon, notre directeur marketing, qui venaient témoigner de leurs expériences sur ces marchés.

Il est étonnant de constater que relativement peu de commerçants en ligne se consacrent au commerce transfrontalier, alors que les distances sont courtes et l'intérêt des clients pour les produits des pays voisins est manifeste. D'ailleurs, les grandes enseignes comme Pixmania ont fait de ce business un axe de développement considérable. Pixmania couvre l'ensemble des pays européens, en doublant sa présence en ligne de points de vente physiques dans certains pays, avec un succès considérable !

Si la Commission européenne s'est fixé comme objectif de mettre 50% des Européens à l'achat en ligne (on part de 36% aujourd'hui), c'est pour favoriser ce (e)commerce "de proximité nationale" qui devrait passer de 7 à 20% !
Car les pays de la communauté additionnés représentent un espace commercial supérieur à celui des Etats Unis d'Amérique (188 milliards d'euros contre 110 milliards d'euros, hors Tourisme et Finance) pour 5% du commerce de détail. Cependant, l'addition ne fait pas le compte dans une zone euro en mosaïque, fractionnée par les habitudes de consommation, les différences de moyens de paiement, les lois applicables, etc. Merci à L'Acsel pour ces chiffres.
Dès maintenant, les pays européens doivent travailler pour transcrire dans leurs législations nationales les directives de la commission (existantes ou à venir) touchant ce domaine, ce qui rendra homogènes les règles applicables entre chaque pays de l'Union européenne. Vaste chantier...

Pour un e-commerçant français qui ne serait pas encore du calibre de Pixmania, quelles sont les clés de la réussite dans ce domaine, en particulier vers nos voisins les plus proches : l'Espagne et l'Allemagne ?

Avant de rentrer dans le vif du sujet, nous avons pu constater les différences  entre ces marchés, ceci grâce aux interventions très compétentes de MM Denis Neumayer, Directeur des centres domiciliation et gestion à la Chambre de commerce et d'industrie française en Allemagne et de Manuel Moreno, Directeur commercial de la Chambre franco-espagnole de commerce et d'industrie, que je vous invite à rencontrer impérativement si vous voulez vous lancer sérieusement.

L'Espagne abrite 29 millions d'internautes pour un chiffre d'affaires e-commerce de 9 milliards d'euros, alors que l'Allemagne compte 65 millions d'internautes pour 39 milliards d'euros de chiffre d'affaires e-commerce (contre 44 millions d'internautes  et 32 milliards d'euros en France en 2009), avec de très grandes différences historiques. De culture VAD (vente à distance), les Allemands sont très soucieux de sécurité et de confidentialité, l'e-commerce complète une offre commerciale de proximité aux horaires peu souples mais dans un contexte économique assez sûr. L'Espagne offre plus de ressemblance avec la France avec des taux de croissance forts de 25 à 30% l'an depuis des années. Même si le pays a souffert très fortement de la crise, la mutation de la distribution vers le commerce électronique, en particulier pour les vêtements et les biens culturels, est nette : c'est là que se trouvent les opportunités actuellement.

Quoi qu'il en soit, l'approche stratégique majeure consiste à adopter la technique du caméléon, si vous voulez vendre chez nos voisins.
Votre boutique en ligne doit impérativement, avant même de répondre aux obligations légales (fortement coercitives en Allemagne), vous faire identifier comme un site national. Il ne s'agit pas seulement de traduire votre site, mais aussi d'adopter les coutumes commerciales locales. A ce titre, les dispositions juridiques qui entourent votre activité en ligne sont de bonnes indications, commerciales toujours ! Car si le client espagnol se réjouit toujours d'avoir de vos nouvelles par email, accepte de vous laisser ses coordonnées, etc., le client allemand exigera une parfaite tranquillité et un absolu respect de sa vie privée. N'imaginez pas dupliquer d'un pays à l'autre vos opérations marketing ou vos processus de paiement et de suivi de commandes.
Utiliser des places de marché locales, comme eBay, qui occupe une large part du marché e-commerce en Allemagne par exemple, sera un atout en termes d'expérience.
Car le comportement du client lui-même pourra s'avérer déroutant pour qui n'aura pas été préparé. Un client allemand est susceptible de commander plusieurs articles déclinés en tailles/couleurs pour ne garder que celui qui lui convient. Vous devrez donc soigner en amont la procédure de retour des produits. Ce même client est également susceptible de doubler ou tripler sa commande chez différents fournisseurs pour ne réceptionner que l'envoi du marchand le plus rapide !

Pour être synthétique, voici la check list des points à valider avant de vous lancer :
- Une offre dédiée à votre clientèle, convenablement traduite et documentée.
- Une offre logistique visible et adaptée en termes de délais et de retours.
- Des moyens de paiement locaux et populaires (virement en Allemagne par exemple).
- Une conformité juridique avec les textes s'appliquant localement, CGV obligatoire incluse.
- Des informations complètes sur le plan du service client.
- Une politique de communication et de fidélisation pertinente.

Il me reste à vous conseiller de vous inspirer des plus grands ou de vous appuyer sur les places de marché pour vous rôder et de vous lancer sans risques. Le potentiel est là et devrait croitre, à vous de jouer !