E-pub : les pièges à éviter, les astuces à connaître (1ère partie)

Les opérations commerciales sur Internet doivent respecter des impératifs juridiques. A défaut, cette négligence pourrait coûter cher à l’annonceur, qui risquerait également de voir son image de marque durablement détériorée. C’est pourquoi, dans deux articles, nous de ferons le point sur les règles générales qui trouveront à s’appliquer (1er article), avant de faire un zoom juridique sur quelques techniques publicitaires prisées des annonceurs (2ème article).

Selon Médiamétrie, la France comptait en juillet 2010 plus de 37,5 millions d'internautes, soit une hausse de 13 % par rapport à juillet 2009. Cela représente encore 65,6 % des foyers français, avec une connexion à Internet de qualité puisque le taux de pénétration des connexions câble, fibre ou ADSL dépasse les 97 %.

Un tel succès technologique fait que le Web, à l'instar des supports médias traditionnels (presse écrite, télévision, radio), est aujourd'hui impossible à négliger dans le cadre d'une opération publicitaire. Le Web permet en effet de contacter une audience importante - 50 sites du Web sont ainsi visités par plus de 3 millions de visiteurs uniques français par mois  - mais également ciblée, grâce aux "cookies", traces laissées par les internautes lors de leur visite d'un site.

Par ailleurs, les formats de communication sur Internet (site Web pour une campagne de branding, référencement dans un moteur de recherche, marketing viral ou comportemental, diffusion d'un message mêlant son, vidéo et photo) sont plus libres qu'ailleurs et permettent de compléter très efficacement une campagne publicitaire "multicanal".

1.    LA CAMPAGNE PUBLICITAIRE SUR INTERNET

Deux importantes séries de questions nous semblent se poser en général, au regard de la mise en œuvre d'une campagne publicitaire sur Internet.

1.1.    LES RELATIONS ENTRE ANNONCEUR, INTERMÉDIAIRE ET RÉGIE PUBLICITAIRE

En premier lieu, le marketing sur Internet est une affaire de professionnels : l'annonceur avisé ira consulter des agences spécialisées, qui joueront un rôle d'intermédiaire avec les différentes régies publicitaires.

Or, les relations entre l'annonceur d'une part, et un intermédiaire (agence conseil ou  centrale d'achat d'espace publicitaire), d'autre part, doivent être formalisées selon l'architecture fixée par la loi n°93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques (dite "Loi Sapin"), interprétée par la circulaire du 19 septembre 1994 relative à la transparence et à la non-discrimination dans la publicité.

En effet, afin d'établir la transparence des flux financiers et limiter les coûts cachés des agences de publicité, le législateur a considéré qu'il fallait soumettre les entreprises de ce secteur a un formalisme particulier. En substance, l'intermédiaire ne doit agir (pour un contrat d'achat d'espace publicitaire ou de prestation ayant pour objet l'édition ou la distribution d'imprimés publicitaires) pour le compte d'un annonceur qu'en vertu d'un contrat de mandat obéissant à des formalités spécifiques. Par ailleurs, l'intermédiaire ne peut recevoir sa rémunération que de la part de l'annonceur, et est obligé de facturer des honoraires, sans prendre de marge sur la revente des affichages.

En l'occurrence, il apparaît difficile de sécuriser le dispositif juridique dans un environnement particulièrement flou. Ainsi, la circulaire d'interprétation de la loi Sapin est notoirement mal rédigée, et va parfois contre la lettre même de la loi Sapin .

La jurisprudence semble également bafouiller face aux questions soulevées par l'application des dispositions de cette loi. Ainsi, la Cour de cassation a jugé de façon surprenante que la loi Sapin "n'interdit pas aux parties à un contrat d'achat d'espace publicitaire ou de prestation ayant pour objet l'édition ou la distribution d'imprimés publicitaires de convenir que le prix en sera facturé au mandataire"... contredisant directement la rédaction de l'article 20 de la loi Sapin "Même si les achats [d'espace publicitaire ou de prestation ayant pour objet l'édition ou la distribution d'imprimés publicitaires]  ne sont pas payés directement par l'annonceur au vendeur, la facture est communiquée directement par ce dernier à l'annonceur."

Pourtant, ces dispositions trouveront à s'appliquer dans de nombreuses opérations de communication (plan média sur le Web mobile, opérations de référencement payant, développement et promotion d'une application pour smartphones...).
Il paraît donc incontournable de sécuriser les activités de l'entreprise entrant dans le périmètre de la loi Sapin, faute de quoi la responsabilité pénale de l'entreprise et de son dirigeant pourra être engagée.


1.2.    LE CONTENU DU MESSAGE PUBLICITAIRE

En second lieu, le message publicitaire en lui-même doit obéir à des obligations de sincérité, de transparence et de loyauté.

Ainsi, à l'instar d'autres pratiques commerciales, la publicité trompeuse est interdite. A ce titre, l'annonceur devra ainsi faire figurer (dans le cas de la promotion d'un bien ou d'un service) les caractéristiques principales du bien ou du service considéré, l'adresse et l'identité du professionnel, le prix TTC et les frais de livraison à la charge du consommateur (ou leur mode de calcul), s'ils ne peuvent être établis à l'avance, ainsi que les modalités de paiement et l'existence d'un droit de rétractation. Devront également figurer les modalités de paiement, de livraison, d'exécution ou de traitement des réclamations des consommateurs (si elles sont différentes de celles habituellement pratiquées).

Néanmoins, la loi a adopté une tolérance pour les "circonstances qui entourent" le moyen de communication utilisée : il serait donc possible de faire un renvoi à une page Web accessible qui permettra de faire figurer de façon explicite ces informations.

Par ailleurs, et sous l'impulsion de la construction européenne, la publicité comparative est réglementée. Selon le Code de la consommation, la publicité comparative ne peut porter que sur une comparaison objective de caractéristiques "essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives" de "biens ou services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif".

A défaut de respect de la règlementation applicable, un concurrent pourra rechercher la responsabilité civile de l'annonceur sur le fondement du dénigrement.

A suivre, prochain article "zoom sur les techniques publicitaires les plus prisées du web".