En 2012, le sport sera-t-il dopé aux nouvelles technologies ?

2012 fait la part belle aux sports. Une occasion idéale pour étudier la digitalisation de ce secteur. Quels sont les rapports de force entre sport et TIC ? A l’ère du 2.0, quelles sont les évolutions attendues ? Avec quels modèles économiques ? Le numérique va-t-il vider ou remplir les stades ?

Quelques jours après le Super Bowl US qui a battu tous les records d’audience cette année et à quelques semaines de l’ouverture de grands rendez-vous sportifs tels que les JO de Londres, l’Euro de Foot en Pologne et en Ukraine, ou bien encore le départ du Vendée Globe  sans oublier « les classiques  » (Tour de France cycliste, Tournoi de Roland Garros, Championnats du Monde de moult disciplines), 2012 est une année résolument sportive.

Tout a commencé en 1948 ...

Historiquement, le sport a toujours accompagné l’essor des nouvelles technologies de l’information et de la communication et a particulièrement stimulé l’innovation des diffuseurs. De 1948, année du premier tournage à l’extérieur par voie hertzienne pour l’arrivée du Tour de France cycliste, à 1992, année où les Jeux Olympiques d’Albertville ont été l’occasion d’effectuer la première démonstration en Europe de télévision haute définition, le sport a souvent été l’occasion de tester de nouvelles technologies. Monique Berlioux, ancienne Directrice du Comité Internationale Olympique déclarait  d’ailleurs dans les années 1960 que si «  la télévision et le sport ne sont pas nés ensemble, depuis un demi-siècle, ils grandissent côte à côte. »
Mais  aujourd’hui le sport a bien grandi et ne se contente plus de la télévision. Car si l’univers sportif était au départ hésitant, il accueille désormais les technologies numériques à bras ouverts. La révolution numérique des dix dernières années est venue modifier l’équilibre entre les différents acteurs du sport que sont les sportifs, les clubs et fédérations, les diffuseurs et les fans. Social, communautaire et fonctionnant en temps réel, le Web ne pouvait que satisfaire les supporteurs !
« Le web fait évoluer de manière radicale le sport et sa perception par le public » assure même Arthur Xanas P-DG de l’agence de marketing online Heaven lors des rencontres Sport Numericus en novembre 2011. Le numérique va d’abord offrir au sport de nouveaux canaux de diffusion via l’Internet fixe et mobile. Il vient ensuite bousculer les relations entre les différents acteurs du sport et le public. L’avènement du « Web 2.0 » va transformer cette nouvelle audience en une nouvelle communauté qu’il va falloir atteindre en temps réel avec des outils de plus en plus mobiles. Comme toutes les marques, les acteurs du sport doivent alors adapter leurs relations avec les pratiquants et les fans.

D’un téléspectateur passif à un supporteur fan et connecté
Cependant, le numérique n’a pas été perçu de la même manière par l’ensemble du mouvement sportif. Les sports ayant davantage de mal à se faire une place à la TV ont ainsi rapidement perçu le digital comme une formidable occasion de diffuser et de communiquer autour de leurs contenus sportifs. La Fédération Internationale d’Escrime, par exemple, a ainsi choisi de diffuser les derniers championnats du monde sur une chaine Youtube dédiée à l’évènement.  
Une appétence qui rejoint celles des nouvelles plateformes de diffusions qui  investissent de plus en plus sur du contenu à forte audience et donc sur du sport. Après la création de Youtube Live, Dailymotion a annoncé début 2011 sa volonté de passer à la vitesse supérieure sur les évènements en direct et a récemment diffusé un match de coupe Europa de foot opposant le Stade Rennais à l’Etoile Rouge de Belgrade. Suivant le même mouvement, Google + a diffusé les matchs de pré-saison de la NBA, le championnat de basket « made in USA ».
Le sport étant un contenu hautement communautaire,  la diffusion d’un évènement sur Internet va permettre d’augmenter l’interaction avec les supporters et leur fidélisation en transformant le spectateur passif en un acteur partageant ses contenus et commentant l’évènement en direct. Pour les sports en quête de diffusion, c’est donc également l’opportunité de créer un lien avec ses licenciés via les nouvelles technologies. La Fédération Française de Basket Ball a ainsi créé un outil de CRM permettant de fidéliser les fans du Basket à travers les réseaux sociaux.

L’audience télé va-t-elle rester le seul critère qui compte ?
Les sports « majeurs » qui ont pu, au départ, voir l’arrivée des supports numériques comme une menace en raison du risque de piratage de leurs droits sportifs, ont donc besoin de s’y mettre également pour enrichir « l’expérience sport » de leurs pratiquants et fans. Ces nouveaux médias doivent être pensés comme complémentaires au canal traditionnel qu’est la télévision. La chaine de TV américaine NBC a d’ailleurs diffusé, pour la première année, le Super Bowl simultanément à la TV et sur Internet. Résultat, la finale du championnat de football américain se place désormais comme l'événement sportif le plus suivi sur le web (2,1 millions d'internautes) tout en ayant battu son record d’audience TV (111,3 millions de téléspectateurs). Au passage, le show américain a également battu un record sur le réseau social Twitter où plus de 12.233 messages par seconde ont été diffusés à la fin du match !
Mais la diffusion des contenus numériques reste encore difficilement monétisable. L’audience générée sur Internet n’est pas comparable à celle de la télévision et ne peut pas prétendre à des revenus publicitaires importants. Mais cela peut permettre de poursuivre des objectifs différents. En associant la diffusion d’un évènement à l’animation des réseaux sociaux, cela permet de créer des contacts, une vraie communauté qui pourra se transformer dans un second temps en des fans payants. Les sponsors se sont également vite engouffrés dans la brèche numérique. En témoigne  le dispositif digital déployé par Sodebo, sponsor du bateau du même nom barré par Thomas Coville lors de la dernière Route du Rhum en 2010. Les fans de voile ont ainsi pu suivre sa course en direct depuis leur smartphone tout en pilotant virtuellement le Maxi-Trimaran grâce aux technologies de réalité augmentée.  

Le digital ré-enchante les stades
S’il est un espace qui a longtemps résisté à l’impact des nouvelles technologies numériques, c’est bien l’enceinte sportive. Peu sensible aux innovations technologiques, surtout en Europe, c’est pourtant là que se situe le cœur de la rencontre entre les sportifs et les fans. Le stade devrait être le prochain lieu touché par le numérique.  
Avec le développement des smartphones, le supporter a son monde digital à portée de main en permanence. De plus, la majorité des stades ou terrains sportifs est équipée d’écrans géants. Les conditions sont alors réunies pour décliner une stratégie digitale au cœur du stade. Avec la digitalisation de l’enceinte sportive, le spectacle devient interactif. Les franchises américaines de Baseball ont été précurseur dans le domaine avec des premières expérimentations en 2010. Ainsi, afin de ne manquer aucune miette du match, les fans de l’équipe de Philadelphie peuvent commander à boire ou à manger depuis leur siège grâce à une application dédiée. Depuis l’été dernier, une équipe de Los Angeles propose un service de location de tablette à 10$ pour la durée du match. Les supporters peuvent y retrouver le programme du match…et jouer à Angry Birds pendant les temps morts !
Depuis quelques mois, certains clubs de foot européens ne sont pas en reste. Le Real Madrid a fait installer dans son stade (mythique) de Santiago Bernabeu un accès au Wifi haute densité. L’objectif est de permettre aux spectateurs d’accéder sans problème de connectivité à leurs services mobiles, mais surtout de leur « pousser » du contenu sur mesure. Des applications et des animations sur les réseaux sociaux ont ainsi été conçues spécialement pour enrichir l’expérience du spectateur et créer ainsi une relation plus personnalisée avec ses supporters. Autre initiative remarquée début décembre, le club de foot de Manchester City a diffusé les tweets de ses fans sur les écrans géants de son stade, liant ainsi la communauté des spectateurs et des téléspectateurs.   
Ainsi, la digitalisation du sport va continuer à s’accélérer. Le « ré-enchantement des stades », témoin de la digitalisation de l’espace physique, devrait se développer puis se généraliser ces prochaines années avec l’arrivée à maturité des technologies fissurant la frontière entre l’univers physique et le virtuel (réalité augmentée, nfc, etc.).
Côté équipement, l’avènement, promis pour 2012, de la « TV connectée » ou « Social TV » va permettre de renforcer l’interaction entre les fans et les diffuseurs, sponsors et organisateurs lors de leurs évènements sportifs préférés. Gageons d’ailleurs que ces derniers seront en tirer parti pour proposer des applications innovantes à l’occasion des prochains Jeux Olympiques de Londres. Show must go on !